Parmi tous les outils et le jargon de l’excellence opérationnelle, il est étonnant de noter que l’AMDEC (ou FMEA en anglais) est de ceux qui suscitent le plus de questions dans Google. Cela méritait donc un article de notre part.

Dans la boîte à outils de tout bon consultant en excellence opérationnelle figure l’AMDEC (Analyse des modes de défaillance, de leurs effets et de leur criticité) ou FMEA (Failure Mode and Effect Analysis) en anglais.

Pour mémoire, ces méthodes consistent à réunir autour de la table les différentes parties prenantes d’un projet ou d’une activité et d’identifier les « modes de défaillance » ou « facteurs de risques » le mettant en risque. La criticité de chacun des facteurs de risques, est définie par l’appréciation de :

  • sa probabilité d’occurrence
  • son impact
  • Et le niveau de maîtrise, c’est-à-dire la capacité à détecter à temps le problème.

La formalisation des facteurs de risques donne ensuite lieu à la mise en place d’un plan d’action pour les couvrir. La revue des risques et des actions est actualisée selon une périodicité régulière.

 

Selon nous, ce qui fait la puissance et l’intérêt de ce type d’approche, c’est avant tout :

  • Le fait de mettre autour de la table toutes les parties prenantes du processus et les amener à partager de manière transparente leurs problèmes et leurs craintes
  • Le fait de sortir avec un véritable plan d’action et de le piloter

En cela, on se situe dans la droite ligne des principes d’amélioration continue : être transparent, faire remonter les problèmes, mettre en œuvre des actions d’améliorations, itérer.

 

Malheureusement, dans de nombreux contextes, l’exercice se transforme en :

  • Cocher une case « j’ai fait une analyse de risque pour être en conformité en cas d’audit » parfois sous la pression ou l’animation d’une Direction des risques, sans vraiment en tirer des conséquences opérationnelles
  • Réaliser un exercice intellectuel de calibrage de probabilités et de criticité, qui alimente des reportings vers les plus hautes sphères de l’organisation
  • Réaliser de ce fait un exercice de communication politique déconnecté de la réalité opérationnelle, parce que jouer le jeu de la transparence serait trop dangereux pour les parties prenantes
  • Ou réaliser une analyse en chambre, pour les mêmes raisons (si on demande leur avis aux autres, ils risquent de dire que cela ne va pas, et on court au-devant de graves ennuis) ou parce qu’on a peur de se noyer dans les considérations très opérationnelles des représentants terrain, alors qu’on veut faire une communication compréhensible par la Direction

Dans ce type de contexte, il est peut-être malheureusement inévitable de créer une sorte d’analyse de risque à deux vitesses : celle de la communication politique et celle de la « vraie vie » opérationnelle. Nous ne prétendons pas qu’il s’agit là d’une bonne pratique dans l’absolu, nous pourrions plutôt qualifier cela de technique de survie dans un environnement très hiérarchisé et pyramidal.

Il est clair qu’introduire une culture de la confiance, du crédit d’intention, du droit à l’erreur, etc… est sans doute un préalable pour éviter ce genre d’écueils.

 

Si l’on en revient à la démarche proprement dite, l’un des écueils possibles est à l’inverse la noyade dans une trentaine de facteurs de risques, tous du même niveau. La méthode d’analyse de criticité devient en soi une méthode de priorisation qui permet de se focaliser sur les facteurs de risques principaux, car aucune organisation n’est en mesure de mener en parallèle, et en plus du « business as usual », les actions de couverture d’un nombre pléthorique de risques.

En général, les actions de couverture se focalisent sur une dizaine de facteurs de risques principaux. S’il y a plus de dix facteurs en criticité maximale, alors sans doute une action de fond allant au-delà de l’analyse de risque est-elle à mener. Peut-être, dans ce cas, faut-il songer à un véritable chantier de transformation en profondeur du processus concerné.