Nombreux sont probablement ceux qui se sont posé cette question iconoclaste (sans l’avouer peut-être), au sein des entreprises en général et des Directions de Systèmes d’Information (DSI) en particulier. Nous tentons ici une réponse focalisée sur les DSI, mais qui pourrait s’appliquer à d’autres fonctions opérationnelles.
Il y eut une ère de l’informatique artisanale, où des « pionniers » et des « héros » maîtrisaient toute la chaîne, étaient capables de tout faire, mais ne bénéficiaient pas d’une organisation leur permettant de déployer de grands projets.
Puis vint l’ère de l’industrialisation et de la taylorisation, qui a tout codifié, séquentialisé en s’appuyant sur des référentiels multiples. La méthode est alors devenue incontournable, mais a, malheureusement, parfois conduit à un système perçu comme rigide, technocratique, administratif et qui aboutit – hélas – souvent à une perte de réactivité et d’efficacité.
Aujourd’hui pour augmenter leur performance, les organisations doivent passer de cette époque taylorienne à une époque plus mature où cohabitent des processus structurés et des personnes polyvalentes capables de s’adapter. Comment ?
Les référentiels CMMI, ITIL, ISO (…) constituent des repères importants de bonnes pratiques dont les DSI peuvent s’inspirer. Mais elles ne doivent pas essayer de plaquer des modèles « tout faits » avec ordre aux équipes d’appliquer la méthode sans se poser de questions. Une entreprise « Lean » évitera ainsi que ses opérateurs deviennent les récitants d’une partition écrite par la Direction Méthode ou Qualité. Elle préfèrera une Direction Méthode qui aide les opérateurs à écrire leur propre partition, convenant à leur contexte.
Pour cela, et pour trouver un équilibre entre un optimum global et une efficacité à l’instant T sur un projet, les facteurs clés de succès sont culturels et humains : il faut des agents opérationnels automnes, polyvalents, capables de s’approprier les enjeux globaux, de respecter un processus tout en jouant avec. Il faut une culture collaborative pour éviter que chacun n’optimise ses propres tâches au détriment de l’efficacité globale. Et il faut que chacun soit guidé par le sens de ce qui est bon pour le client.
Tout cela prend du temps. Mais lorsque l’organisation se tourne vers le client et que ses opérateurs ont une vision globale suffisante, les processus deviennent plus agiles et les gaspillages s’éliminent progressivement d’eux-mêmes : contrôles ou reportings inutiles, paperasse, tâches sans valeur ajoutée. Seul subsiste l’essentiel.
Cela implique un Directeur « chef d’orchestre » et une équipe Qualité et Méthode qui soit un soutien et non une contrainte. Respecter la méthode sera toujours moins important que de bien servir le client.
Alors ne tuons pas les méthodes qualité, mais apprenons au corps social à les utiliser avec souplesse et intelligence.
Christian Semé – Directeur Associé d’ISlean Consulting
Bonjour Christian,
Je partage complétement vos propos sur « essayer de plaquer des modèles « tout faits » avec ordre aux équipes d’appliquer la méthode sans se poser de questions ».
Je trouve que l’ISO 9001 est un référentiel de bon sens qui permet de mettre en place une dynamique d’amélioration continue de l’organisation, au service des clients (leur satisfaction) mais également à l’entreprise (sa performance). Il impose de mettre en place des verrous organisationnels, mais il ne dit pas comment le faire. Cela laisse toute latitude à l’entreprise de choisir ses solutions.
Le management par les processus proposé par l’ISO 9001 permet d’orienter les processus métiers vers les clients, en s’appuyant sur les processus supports de l’entreprise (ressources humaines, informatique interne, …).
Je trouve que le référentiel ITIL introduit trop de « processus ». Cela amène, d’après moi, confusion et lourdeur. Ce référentiel permet toutefois aux entreprises de réfléchir à comment elle peut mieux servir ses clients. Attention toutefois à ne pas monter « des usines à gaz ».
Mettre en place des choses simples en ayant à l’esprit le Bon Sens Pratique (BSP) n’est pas toujours évident. L’être humain a souvent tendance à compliquer les choses.
Pensez « valeur ajouté » pour ses clients (internes à l’entreprise pour un service informatique ou externes pour un prestataire de service) permet de simplifier les organisations.
Le système de management de la qualité n’est pas un « train électrique » du service Qualité. C’est une « caisse à outils » des collaborateurs au service de la satisfaction des clients.
Mettre en place des organisations efficiente n’est pas facile. Il faut rester humble. Il faut le faire progressivement en s’appuyant sur une culture de amélioration continue.
Au plaisir de vous lire.
Pascal Weber