Quiconque s’intéresse à l’excellence opérationnelle a entendu parler des certifications Green Belts et Black Belts. Mais au fait, cela sert-il à quelque chose ?

Si vous ne savez pas ce qu’est un Green Belt

Les notions de Green Belts, Black Belt, et Master Black Belt sont nées avec le Six Sigma, lequel, bien qu’apparu chez Motorola, a été popularisé et généralisé chez General Electric. Dans cette dernière entreprise, cette méthode d’amélioration est devenue partie intégrante de l’ADN de la société, et des certifications très exigeantes ont été mises en place pour s’assurer que les meilleurs collaborateurs étaient en maîtrise des techniques d’amélioration, que ce soit en termes de design et d’animation des chantiers de transformation, ou en termes de maîtrise des outils statistiques dont le Six Sigma est très friand. Les Green Belts sont sensés savoir mener des projets d’amélioration continue et y consacrer environ 25% de leur temps. Les Black Belts sont nécessairement dédiés à ces projets, maîtrisent parfaitement la méthode, et peuvent encadrer les Green Belts. Les Master Black Belt peuvent encadrer, coacher et former les Black Belts, et concevoir des transformations globales.

Les projets d’excellence opérationnelle se sont déployés depuis 10 à 15 ans dans tous les secteurs. Ces programmes ont conduit à la convergence des boîtes à outils du Lean, du Six Sigma, de la théorie des contraintes, etc. Le marché parle d’ailleurs désormais très souvent de « Lean Six Sigma. » Ils ont toutefois tous adopté les certifications du Six Sigma. Celles-ci sont exigeantes : pour franchir chaque niveau, il faut compter au moins 5 jours pleins de formation, un examen de forme QCM de 4 heures qui est loin d’être « donné » (en tous cas pour les organismes de certification vraiment professionnels), et, normalement, beaucoup de pratique.

C’est là que le bât blesse : quelle que doit la qualité du contenu de sa formation, n’importe qui disposant du budget et du temps pour se former et bachoter peut se faire certifier. Cela en fait-il pour autant la bonne personne pour conduire vos transformations ?

La « ceinture » n’est une condition ni nécessaire, ni suffisante pour faire un bon accompagnateur de la transformation

Condition insuffisante : combien de consultants, fiers de leur certification, ravis de pouvoir dérouler ce qu’ils ont appris, mais qui n’ont finalement pas acquis la capacité à animer correctement des groupes de travail pour leur faire produire les résultats attendus, qui n’ont jamais appris à traiter, au-delà du rationnel, les éléments politiques et émotionnels qui permettent d’emporter les décisions et de mettre en mouvement les plans d’actions, qui n’ont pas la capacité à « sortir du cadre » ou le niveau d’exigence sans lequel il n’y a pas vraiment de résultats probants possibles ?

Condition non nécessaire : à l’inverse, je connais de nombreux consultants spécialisés en transformation, passés par la rude école des grands cabinets de conseil, qui savent concevoir des programmes complexes, avoir un impact incroyable sur leurs clients pour les amener à évoluer en profondeur, et qui pourtant ne sont pas certifiés.

Alors, pourquoi nos consultants ont-ils quand même tous leur ceinture ?

Première raison : parce que le contenu des formations certifiantes est très bon, parce qu’il amène une boîte à outil structurée et une remise en perspective de choses que nous leurs apprenons déjà par ailleurs. Les limites évoquées plus haut n’en font pas moins un bagage utile. Non suffisant, mais utile.

Deuxième raison : parce que le marché ne comprendrait pas que nous ne soyons pas certifiés. Dès qu’une entreprise consulte pour mener un programme d’excellence opérationnelle, quel qu’il soit, la seule choses mesurable et compréhensible pour l’acheteur est de savoir si vos consultants sont certifiés. Il faut donc l’être pour pouvoir travailler durablement sur ces sujets.

Alors, vivent les ceintures, mais n’oublions pas les bretelles : le savoir-faire et l’exigence du consultant de haut niveau.