Le 30 juin passé, nous avons animé une soirée de l’entrepreneuriat dont beaucoup d’entre vous ont dû entendre parler, appelée le Club du Grain Numérique. Cette soirée fut l’occasion pour la communauté ISLEAN de découvrir les entrepreneurs que nous avions rencontrés au cours de l’année. Ils nous ont chacun présenté leur startup, puis ont participé à une table ronde animée par Louis-Alexandre Louvet (Associé ISLEAN) sur le sujet « Pandémies, guerres, inflation, climat : entreprendre malgré tout ! ». Revenons dessus.
Table ronde sur le sujet « Pandémies, guerres, inflation, climat : entreprendre malgré tout ! »
Les quatre entrepreneurs ayant participé à cette table ronde sont :
- Jonathan Foureur, co-fondateur de Phedone, entreprise qui traite les retours clients en masse en utilisant l’intelligence artificielle
- Ilfynn Lagarde, co-fondatrice de youzd, une plateforme de vente de mobilier et d’électroménager de seconde main
- Camille Corman, fondatrice de 1Food1Me, un programme de nutrition digital personnalisé fondé sur des analyses biologiques
- Julien Blondeau, co-fondateur d’Hackuity, une entreprise de cybersécurité qui accompagne les organisations dans la gestion des vulnérabilités de leur infrastructure informatique
Un court pitch de chacune de ces startups est disponible dans cet article, et vous pouvez trouver leurs entretiens détaillés ainsi que ceux d’autres entrepreneurs dans notre Cahier des entrepreneurs 2022.
La table ronde de cette année fut particulièrement intéressante et pertinente. En effet, l’époque actuelle est incertaine et marquée par diverses tragédies et problèmes sociétaux, comme les pandémies, les guerres, l’inflation, et l’état d’urgence environnementale. Entreprendre dans ce climat implique donc plus d’incertitudes et de challenges. Nous voyons ici comment ont réagi certains entrepreneurs et quelles leçons ils ont tirées de ce parcours.
Durant ces dernières années qui furent marquées par le Covid, les guerres, l’inflation et la crise climatique, quelles ont été les bonnes surprises ?
Pour Jonathan et Camille, la pandémie a donné l’occasion de converger vers un business model plus avantageux beaucoup plus rapidement. En effet, Jonathan nous raconte que la fonte des budgets lors de la pandémie a mis en évidence quels pôles d’entreprise avaient réellement de l’intérêt et du budget pour leur produit. Du côté de Camille, le modèle BtC prévu au départ a perdu de la vitesse, puisque les particuliers ne pouvaient que difficilement se rendre en laboratoire pour les analyses nécessaires au programme. Ils ont donc décidé de se tourner vers les entreprises, les mutuelles et les assurances, qui ont en effet montré de l’intérêt. Cela a même motivé le recrutement d’une personne en charge du secteur commercial, ce qui n’était pas prévu aussi tôt !
Les dernières années ont également vu les habitudes changer. En effet, Camille a remarqué que l’absence de restauration collective lors du confinement a provoqué une prise de conscience de l’impact de l’alimentation sur le bien-être au quotidien. Cela a donc impacté favorablement le développement de 1Food1Me. De son côté, Ilfynn nous raconte qu’à cause de l’urgence climatique, les gens réfléchissent beaucoup plus à leur impact en tant que consommateurs. De plus, le pouvoir d’achat français a baissé à cause de l’inflation. Ce changement des modes de consommation est donc bénéfique pour youzd.
Comment le confinement a-t-il impacté le travail en équipe ?
Du point de vue de la collaboration en équipe, le confinement a également réservé quelques bonnes surprises pour ces entrepreneurs. Pour Ilfynn, la collaboration avec son associé lors de la fondation et du démarrage de l’entreprise s’est passée presque essentiellement à distance. Dans ces conditions de travail compliquées, elle a donc pu se rendre compte de leur complémentarité et de leur bonne entente avec sûreté.
Pour Julien, l’avantage du télétravail réside dans l’agrandissement considérable du périmètre de recrutement. Puisque les employés vont télétravailler, peu importe qu’ils le fassent depuis l’autre bout du pays, ou même depuis l’étranger !
Ces entrepreneurs ont donc su rebondir et tirer parti de l’imprévu et de l’adversité. Une manière de réagir qui est d’ailleurs au cœur-même de l’attitude entrepreneuriale. On peut dire qu’ « il faut savoir transformer le pépin en pépite » pour être entrepreneur !
La rencontre avec le premier client et son impact sur l’entreprise
Les premiers clients aident souvent l’entrepreneur à finaliser (ou poursuivre) la mise au point son produit. Pour youzd, le premier client a été le déclencheur d’une innovation cœur de l’entreprise : la possibilité d’acheter à plusieurs vendeurs lors de la même commande et d’être livré en une fois. C’est d’ailleurs le seul site de seconde main qui propose cela !
Le premier client de 1Food1Me, un acteur de la grande distribution, a permis l’établissement d’une passerelle entre le programme de nutrition et le panier d’achat sur le site d’e-commerce du magasin. Cela a donné l’opportunité à la startup de développer cette fonction, qui est maintenant intégrable sur le site d’autres chaînes de supermarchés. Une voie complètement différente du modèle en BtC initialement pensé a donc été ouverte !
Julien nous raconte que le premier client d’Hackuity a motivé une grosse modification du produit au point de vue du nombre de données traitées. Ils se sont donc adaptés et ont obtenu une solution qui répond maintenant a bien plus de problèmes qu’envisagé initialement !
Les attentes envers les associés et l’équipe et complémentarité
Une idée qui se détache très clairement sur ce sujet est la nécessité que les associés aient des forces et des expériences complémentaires, autant quand l’équipe est constituée dès le début (youzd, Hackuity), que quand elle se forme au fur et à mesure des problèmes rencontrés (Phedone, 1Food1Me). Dans certains cas, les âges et les localisations des membres de l’équipe dirigeante sont également différents, ce qui doit donner plus de perspectives à l’entreprise.
Néanmoins, même si la complémentarité et donc la différence sont nécessaires dans un partenariat, celui-ci est souvent motivé par une vision commune de la manière de fonctionner d’une entreprise. Cela aide fortement à la cohérence de la gérance de l’organisation.
Par ailleurs, une bonne pratique partagée par Ilfynn sur le management est l’instauration d’une courte réunion quotidienne à laquelle toute l’équipe participe, afin de partager les activités de la journée et de demander de l’aide si nécessaire.
Quel type d’accompagnement rechercher chez un investisseur, au-delà de son apport financier ?
Comme l’expliquent Jonathan et Ilfynn, cela dépend de deux critères. Tout d’abord, de la personnalité des associés : certaines personnes recherchent un accompagnement tandis que d’autres jugent déjà savoir comment s’y prendre (à tort ou à raison) et seront hermétiques aux conseils. Ensuite, l’état de développement de l’entreprise joue un rôle important sur cette question. Au fur et à mesure de la vie de la startup, les problèmes seront différents et l’accompagnement devrait s’adapter. Ensuite, une fois que la startup a passé sa période de développement initiale, les entrepreneurs estiment souvent qu’ils ont forgé leur propre expérience, savent comment diriger leur entreprise et nécessitent juste un apport purement financier.
Julien mentionne également l’influence très positive qu’a eu un fonds d’investissement portugais sur Hackuity. Ils les ont en effet poussés à s’implanter à l’international beaucoup plus rapidement que les associés ne l’auraient envisagé, avec des conséquences remarquablement bénéfiques pour l’entreprise !
Comment devrait se positionner une entreprise du point de vue de son impact écologique ?
Pour Ilfynn, toutes les entreprises se veulent à impact. En effet, la base de l’entrepreneuriat est la résolution d’un problème. En ce qui concerne l’impact contre le réchauffement climatique, elle espère que c’est une cause qui motive de plus en plus de personnes. Le challenge, de son point de vue, serait plutôt de concilier l’esprit écologique avec la capacité à générer du business, afin que l’entreprise soit viable.
Jonathan nous indique le versant de cette réflexion en nous disant qu’« il faudrait qu’aucune entreprise n’ait un impact négatif ». C’est-à-dire qu’il faut distiller dans la méthode de création des startups une prise de conscience particulière et immédiate au bilan carbone de l’entreprise. S’il n’est pas possible de réduire fortement ce bilan dans une période de temps donnée, il y a toujours des possibilités de réinvestissement d’une partie des bénéfices dans la compensation de l’impact négatif.
Julien met également en avant qu’outre l’impact écologique, il en existe d’autres qui ne sont pas moins importants, comme l’impact sociologique et l’impact financier. C’est sur ceux-ci qu’Hackuity influe surtout, puisqu’en protégeant les organisations des attaques, elle aide à leur survie et au maintien de leurs postes de travail.
Si cet évènement vous intéresse, rendez-vous sur sa page internet, où vous pourrez également découvrir les entrepreneurs des années précédentes !