Le 10 mars 2020, nous organisions une conférence  sur le thème des impacts du numérique sur notre système de santé (compte-rendu ici). Une semaine plus tard, la terre entière était confinée pour cause de pandémie liée à un virus, le bien connu Covid-19. 

Cette situation fort particulière contraint les organisations à adapter leur activité au fonctionnement à distance, dans la mesure du possible, et avec l’aide des outils de l’internet.

Les entrepreneurs Medtech, qui nous présentaient quelques jours plus tôt les principales réticences à l’adoption unanime du numérique en matière de santé, ont vu leurs solutions propulsées au devant de la scène. Tout comme le télétravail pour les entreprises, la télémédecine est apparu comme la solution évidente pour les acteurs de la santé. Au coeur de ces pratiques, divers outils numériques accessibles depuis chez soi et qui permettent de communiquer avec son médecin de la même manière qu’avec son collègue, ou de s’informer en prévision du virus.

Si la crise de Covid-19 a permis d’accélérer la transformation digitale des organisations (voir notre article), qu’en est-il du milieu de la santé ? Voici quelques faits illustratifs et retours d’expériences en cinq points.

5 effets boost de la crise du Covid-19 en faveur de la e-santé

1. Tous les acteurs de la santé se sont mobilisés en un temps record

Action, réaction.

Si la plupart des activités se sont retrouvées au ralenti voire à l’arrêt, le milieu de la santé a été a contrario hautement sollicité. Le personnel soignant au front et directement en lutte contre le virus, mais également de nombreuses initiatives liées au numérique appliqué à la santé, permettant à chacun d’agir depuis chez soi en second plan.
« Nous sommes aujourd’hui à un tournant et l’épidémie de Covid-19 l’a montré », a souligné le Cédric O, Secrétaire d’État chargé du Numérique, à la sortie du rapport sur le potentiel de la e-santé publié en juin 2020 par l’Institut Montaigne. En quelques semaines, acteurs privés et publics se sont mobilisés avec une rapidité sans précédent afin de lutter contre le virus à travers l’utilisation d’outils numériques. Des plateformes de prévention ont vu le jour (ex : mesconseilscovid.fr par le Ministère de la Santé), des tentatives de coordination des initiatives (ex : plateforme G-nius), et surtout, un assouplissement réglementaire en faveur de la télémédecine qui jusque là peinait à faire surface.
L’institution de nouvelles pratiques digitales dans un vaste milieu centré sur l’humain prend du temps, et n’était jusque là pas jugé pertinent à l’unanimité, laissant en rade télémédecine et autres nouvelles pratiques digitalisées. Mais à l’arrivée d’une crise sanitaire où les hôpitaux sont surchargés, où chaque déplacement est risqué, les considérations ont été largement revues.  « Le développement de solutions numériques dans le contexte de la pandémie de Covid-19 a dévoilé les formidables capacités d’innovation de l’écosystème français du numérique en santé » a précisé le rapport précédemment cité.

2. Les principales barrières concernant la télémédecine ont enfin sauté

Avant la crise, des contraintes réglementaires limitaient l’usage de la téléconsultation : celle-ci n’était prise en charge seulement dans le cas où le patient avait déjà consulté le praticien. Dès mars 2020, plusieurs décrets ont levé cette barrière en permettant un remboursement du patient, médecin traitant ou non. Le recours à la téléconsultation s’est alors vu fortement encouragé afin de maintenir les gestes barrières tout en déchargeant les hôpitaux, permettant également le maintien du suivi médical. Pour les médecins réticents à l’utilisation de cette pratique, plusieurs entreprises du milieu proposant des solutions de télémédecine ont adapté leurs services allant jusqu’à la gratuité afin d’encourager les médecins à passer le cap. Tel en est l’exemple de Doctolib (plateforme de gestion des consultations en ligne) qui, à l’annonce de la gratuité de son service de téléconsultation, a multiplié ainsi par 4 le nombre de RDV pris en téléconsultation.

Le retour d’expérience de nos entrepreneurs en télémédecine

  • Pour Medaviz, plateforme de téléconsultation, le nombre de médecins inscrits a été considérablement multiplié.“En février, nous comptions environ 100 médecins inscrits par semaine. Au plus fort de la crise, c’était environ 500 par jour !” me confie Stéphanie Hervier, co-fondatrice de la start-up.
    Elle poursuit :
    “L’assurance maladie a annoncé 60 000 téléconsultations sur le territoire en 2019. Sur les 6 premières semaines de confinement, nous étions déjà à 70 000. Avec la crise du Covid-19, les médecins passent de 10% à 70% de téléconsultation”.
  • Du côté de myDiabby, plateforme de suivi des patients diabétiques, l’activité a augmenté de +50% en moins de 2 semaines. “C’est-à-dire qu’au lieu d’inclure 4 000 nouveaux patients chaque mois sur la plateforme, nous sommes passés à 6 000 nouveaux patients mensuels en quelques jours. Il a fallu s’adapter rapidement !” témoigne Anastasia Pichereau, CEO et co-fondatrice. L’équipe a également décidé d’ajouter une fonction de téléconsultation sur l’application, en complément de la télésurveillance, afin d’assurer un suivi 100% à distance.
    “myDiabby a rendu service à de nombreux praticiens et patients qui ont pu bénéficier de la continuité de leur suivi en étant 100% à distance.”

Retours d’expériences utilisateurs de myDiabby pendant le confinement

3. Le secteur devrait rapporter plusieurs dizaines de milliards par an

Entre 16 et 22 milliards d’euros par an, c’est ce que pourrait rapporter le secteur d’après l’étude du think tank de l’Institut Montaigne. Des chiffres prometteurs qui doivent leur augmentation aux initiatives déployées depuis le début de la crise. Ces estimations se basent sur les 5 à 10 prochaines années, et concernent 5 axes principaux, plus ou moins déjà en vogue ces dernières années, à savoir :

  1. L’autonomisation du patient
  2. La dématérialisation et l’échange des données
  3. La télémédecine
  4. L’automatisation et la transparence
  5. L’aide à la décision. 

Un cas illustré par Medaviz, qui témoigne avoir gagné 21 mois d’avance sur leurs prévisions d’activité tout au long de la crise sanitaire !

4. Santé et numérique, des perspectives d’emploi en hausse

Qui dit augmentation du taux d’activité dit aussi hausse de l’offre d’emploi. Le boost engendré par la hausse d’activité dans le milieu aura bénéficié aux entreprises du secteur. Ces dernières, ayant pour la plupart connu une expansion phénoménale en peu de temps, doivent s’adapter ainsi que leur effectif. “Nous étions à 15 employés en début de crise, nous sommes aujourd’hui 22, et nous serons bientôt 30 !” affirme Stéphanie hervier. La sensation d’être utile à double titre, à la fois pour aider à la lutte contre la crise sanitaire, mais également contre la crise économique.

5. Les applications de e-santé ont aidé les français à (re)prendre soin d’eux !

Malgré une moyenne de 2,5 kg* pris pendant les deux mois de confinement (oops !), les applications de santé et de fitness ont connu un véritable boom : 85% de hausse des téléchargements et 60% d’utilisation en plus. 

Les applications de bien-être et santé ont également fait fureur. Outre les téléchargements massifs des applications liées au Coronavirus (1,5 millions de téléchargement à la sortie de StopCovid, application de traçage du virus en temps réel), les français se sont également tournés vers des applications de méditation, de nutrition ou de yoga. Petit Bambou, application de méditation a vu s’inscrire 10 000 nouveaux utilisateurs par jour entre fin mars et la mi-avril.

*Source : étude Ifop pour Darwin Nutrition réalisée par questionnaire en ligne fin avril 2020 auprès d’un échantillon de 3 045 personnes, représentatif de la population âgée de 18 ans et plus résidant en France métropolitaine

Nombreux sont les français qui ont (enfin) trouvé le temps de prendre soin d’eux et de leur santé, ce qui a bénéficié aux entreprises du milieu, boosteurs de la santé à l’ère digitale.

 

Que faut-il retenir ?
Il aura fallu un bouleversement sanitaire mondial afin de changer certains modèles de fonctionnement, qui jusque là peinaient à se faire une place aux côtés des pratiques digitalisée. Le domaine de la e-santé en est un bel exemple, dont l’avenir s’annonce prometteur. Un état des lieu sera cependant pertinent une fois le gros de la crise passé : ces nouvelles pratiques seront-elles pérennisées ? Nous ne pouvons que l’espérer.