Héritiers de Bossard, nous avons été vaccinés tout petits à la sociodynamique, et nous avons créé ISLEAN avec cette base culturelle. Depuis 2012, ayant rencontré Jean-François Zobrist et participé à la création du MOM21, nous avons entrepris et réentrepris de repenser le fonctionnement du cabinet avec nos consultants. Nous avons beaucoup appris sur nous-mêmes, et avons encore beaucoup à apprendre. Voici quelques retours d’expériences.

Entreprise libérée : des Businessmen, pas des Bisounours

Responsabilité + Formation + Liberté = Bonheur + Performance

Qu’il est difficile de réunir les premiers termes de cette équation !

La responsabilité est exigeante, engageante, se plaindre du contexte et des contraintes extérieures est tellement facile et permet de se défouler, se défausser. Mais cela ne résout rien. Être responsable est abominable car cela comporte essentiellement des devoirs, et peu de « droits », à part celui, immense, de jouir de la liberté que cela procure. On doit travailler, prendre des risques, de manière certaine, et on ne gagne pas toujours.

Pareil pour la formation : il faut travailler. Il faut chercher. Il faut apprendre, parfois avec en plus un esprit critique.

Ensuite il faut un milieu où on puisse avoir les moyens d’exercer sa liberté. Et la meilleure des libertés, c’est un business qui génère des cash-flows positifs et des comptes de résultats bénéficiaires. Là encore, ça ne tombe pas du ciel.

Il faut bosser, s’engager, prendre des coups, parfois en donner.

« Sweat, Blood and Tears » ?

Et si comme Sisyphe, chacun pour ses raisons, on trouvait ça motivant ?

Time isn't the only non-renewable resource. Your talent is too

Les temps et le talent, des ressources non renouvelables

Est-ce que ce que j’aime faire correspond aux finalités de l’institution que j’ai rejointe ?

Pourquoi ai-je rejoint une tribu dans une institution ? Quelles sont les finalités de cette institution ? Et moi, quels sont mes buts ? Qu’est-ce que j’aime faire, être ?

Comme le rappelait Steve Jobs dans le discours d’accueil à Stanford en 2005, si vous devez passer la majorité de votre temps à des activités avant votre mort, autant que ce soient des activités que vous aimez faire. « You’ve got to find what you love. If you haven’t found it yet, keep looking, and don’t settle. » Keep looking, don’t settle. Facile à dire ?

C’est au manager de définir les finalités de l’institution dont il a la responsabilité, de les faire vivre et de les communiquer.

« One does not fit all », manager la complexité, la réalité

Le rôle du manager est de réunir des équipes qui vont s’éclater à poursuivre les finalités de l’institution.

Le bon manager parvient à faire des choses exceptionnelles avec des personnes ordinaires et diverses. La meilleure manière d’y arriver, sinon la seule, est de trouver ce que les personnes aiment faire, là où elles seront focalisées, investies et passionnées, ce qui fera d’elles des personnes extraordinaires.

Une équipe dans sa diversité

« On n’aide pas une plante à grandir en tirant sur sa tige »

J’aime cet aphorisme de François Jullien, repris par Alexandre Gérard, fondateur de Chronoflex. C’est la métaphore de la plante, qui pousse bien si elle a ce dont elle a besoin : terre, eau, lumière, CO2…

« On n’aide pas une fleur à pousser en tirant sur la tige. Il faut parfois savoir ne pas agir, ou agir latéralement, en arrosant la plante, voire attendre que la situation se transforme…« 

Quand on a trouvé ce qu’aiment faire les équipes, il faut leur donner les moyens d’y parvenir. Formation ? Temps ? Capital ? Connaissance ?

Là encore la difficulté est l’extrême diversité des situations, des gens, dont les besoins et les aspirations changent dans le temps ; besoins et aspirations qui par ailleurs ne sont pas toujours clairement conscientisés. Plutôt que de vouloir réduire cette diversité, « je ne veux voir qu’une tête », faisons comme la vie : tirons parti de sa richesse, de la résilience qu’elle apporte.

Après avoir exploré plusieurs moyens de révéler les talents parfois cachés des équipes, c’est aussi la responsabilité du manager que de se séparer sereinement des personnes qui ne savent pas ou ne veulent pas ou plus faire partie de l’institution.

Nous sommes dans un monde contraint

La notion de liberté revient finalement à la capacité à décider de ce qu’on fait de son temps.

Force est de constater que nous n’avons pas toujours cette capacité, car nous vivons dans un monde fini, où d’autres aspirations d’autres personnes limitent les nôtres et leur donnent finalement de la valeur. Quel est en effet l’intérêt de la liberté si on est seul dans un monde sans contraintes ?

La conséquence de ces contraintes est que nous n’avons pas toujours tout le temps pour :

– définir clairement les finalités de l’institution, les faire évoluer, les communiquer,
– trouver, révéler les aspirations des équipes,
– mettre en place et cultiver un environnement propice à l’épanouissement de tous.

Des businessmen, des entrepreneurs

La meilleure manière de dégager du temps est de produire avec efficacité et efficience. C’est l’essence du capitalisme, où un individu ou un groupe d’individus prend un risque et / ou fait un effort d’investir avec l’espoir que dans l’avenir cet investissement va permettre de libérer du temps qui pourra être utilisé de manière discrétionnaire.

C’est pour cela que la première condition pour pouvoir faire émerger et grandir une institution « libérée » est D’ABORD de produire de la valeur, ce qui se traduit en comptabilité en chiffre d’affaires rentable, ou en capital business qui à terme génèrera du CA rentable. Et c’est cela qui caractérise des businessmen, des entrepreneurs.

Pas des bisounours

Imaginer qu’il puisse y avoir des « free lunch », un univers où on puisse avoir des droits acquis sans devoirs, « faire payer les riches« , jouir de liberté sans d’abord investir est au mieux une illusion idéaliste qui se dissipera rapidement sur le mur de la réalité, au pire une frustration et une révolte durable contre un monde injuste qu’on se garde bien d’améliorer.

Un autre rôle du manager est d’expliquer cela. Quand on a une heure pour faire un boulot, on le fait en moins d’une heure, ou on devra sacrifier une autre activité. Quand on a 100 balles de revenus par mois, on n’en dépense pas durablement 130. Il faudra un jour ou l’autre rembourser ou assumer les conséquences d’un défaut : la privation de liberté, d’une manière ou d’une autre.

Eviter ce sujet par crainte de froisser, ce n’est pas du tact, ce n’est pas de la bienveillance. C’est au mieux du laxisme, au pire de la lâcheté. C’est refuser d’aider quelqu’un à progresser, à grandir. C’est l’enfermer en position stérile d’enfant en rébellion contre ses parents, au lieu de lui permettre d’accéder à une relation adulte assertif confronté à d’autres adultes, avec leurs contraintes tout aussi légitimes que les siennes, et la capacité d’échanger et de comprendre voire négocier un terrain d’entente durable.