« Rien n’est permanent sauf le changement » disait Héraclite d’Ephèse. Cette citation est encore plus d’actualité en ce moment où nos habitudes (et/ou certitudes ?) ont drastiquement changé dans cette période inédite que nous vivons. La conduite du changement dans un monde en évolution constante étant désormais « un must have » dans les toutes les organisations, nous avons publié en avril dernier un point de vue sur la conduite changement dans un monde agile. Ce point de vue répond aux questions suivantes : qu’est-ce qui change ? Quels sont les bénéfices attendus des nouvelles approches ? Quels sont aussi les limites ou les points de vigilance ? Cet article – le premier d’une série – reprend quelques éléments clés de ce point de vue sur le concept de conduite du changement et ses fondements.
Qu’est-ce que la conduite du changement ?
La conduite du changement (« change management » en anglais) est une approche structurée permettant de mettre en œuvre des changements dans une organisation et d’assurer les bénéfices durables de cette transformation.
Avec les gros projet ERP dans les années 1990 et l’explosion du numérique depuis 2010, les projets informatiques ont apporté des modifications profondes dans la manière de s’organiser et de travailler. Du fait que les changements organisationnels ont été pour beaucoup liés à l’informatique, la notion de conduite du changement s’est aujourd’hui un peu galvaudée et est souvent devenue un chantier parmi d’autres au sein d’un projet informatique alors que c’est potentiellement beaucoup plus que cela. Normalement, quand on parle de conduite du changement, on parle de transformation profonde de l’entreprise et on agit à la fois sur :
- la culture de l’entreprise et ses valeurs ;
- les processus et les méthodes de travail ;
- les outils ;
- les ressources humaines (les compétences, la façon dont les métiers évoluent le catalogue de formation…).
La conduite du changement a pour objectif de préparer ces changements et leurs impacts auprès des personnes (l’individuel) et auprès du corps social (le collectif). Elle se focalise sur le processus de transformation d’une situation existante à une situation nouvelle.
Pourquoi faut-il en faire une conduite du changement ?
Le changement est une perturbation avant d’être un progrès. L’efficacité naît de l’industrialisation, la recherche de stabilité, de maîtrise dans la manière dont on travaille en répétant des gestes qu’on connait par cœur. Quand on introduit du changement, on introduit une perturbation d’où la fameuse vallée de la mort ou du désespoir qu’on rencontre dans la conduite des projets (voir ici et là mes article sur ce sujet). Et un des enjeux de la conduite du changement est de rendre cette période d’incertitude, la plus indolore possible et la moins longue possible.
Face au changement nous ne sommes pas tous égaux, il existe des promoteurs, des personnes qui ont envie de promouvoir le changement que vous proposez. Il existe également des personnes qui vont être plus attentistes et des réfractaires au changement. Il faut savoir les gérer. A cet effet, l’autre enjeu de la conduite du changement est d’encourager les promoteurs, faire basculer les attentistes et circonscrire les réfractaires.
Le changement part souvent d’une base rationnelle (c’est quelque chose de bon pour l’organisation !). Mais il y a également des aspects politiques (est-ce bon pour moi et ma carrière ?) et les aspects émotionnels (qu’est-ce qui m’attire ou me fait peur dans ce changement ?) à gérer. On travaille sur tous ces aspects quand on travaille sur la conduite du changement.
Les activités habituelles de la conduite du changement
Nous avons formalisé les activités classiques liées à la conduite du changement autour de 5 types de chantiers résumés dans l’image ci-dessous :
Toute conduite du changement part en premier lieu de la gestion des parties prenantes. Il faut traiter dès le début des projets de transformation le positionnement des acteurs face au changement, savoir dès le départ s’ils sont bien informés, s’ils comprennent le changement, s’ils ont les compétences nécessaires. Il faut savoir si les sponsors sponsorisent effectivement le changement comme il se doit (voir mon article sur l’importance du sponsor dans les projets de transformation). Cela peut passer par des sondages, des outils comme la carte des partenaires et doit se faire tout au long du projet.
De la même manière, la gestion des impacts doit se faire dès le début et tout au long du projet. Il faut identifier tous les impacts du ou des changements que vous proposez sur les populations concernées et adapter votre dispositif en fonction.
Les formations et sensibilisations permettront de garantir aux individus l’acquisition des connaissances/compétences nécessaires pour effectuer leur travail de manière optimale dans les nouvelles conditions. Ceci est possible notamment en définissant et pilotant un plan de formation pour toutes les personnes impactées par le changement. On passe souvent par un panachage de différentes approches (formation en présentiel, e-learning sous forme de MOOC ou SPOC, aide en ligne pour les outils informatiques etc.). Il ne faut jamais oublier que la pédagogie est l’art de la répétition !
Le volet communication est indispensable pour identifier et réduire les inquiétudes et incertitudes des collaborateurs, favoriser la compréhension et la mobilisation de tous vers un objectif commun. On définit donc généralement un plan de communication qui précise, pour chaque type d’interlocuteurs, la fréquence, les modalités et les supports de communication. Attention, la communication n’est pas seulement un acte descendant : elle doit fonctionner dans les deux sens – de l’équipe projet qui amène le changement vers les acteurs impactés, mais dans l’autre sens aussi.
Enfin on retrouve le pilotage du changement. Proche conceptuellement du stakeholder management, l’enjeu de ce volet est d’assurer la bonne coordination entre les actions de construction des solutions et les actions de déploiement du changement. Cela passe par la prise en compte, dans les instances et les rituels du projet, de la vision de l’impact sur l’utilisateur opérationnel des solutions définies, qu’il soit représenté ou pas dans l’équipe projet.
En synthèse, la conduite du changement vise à ce que chaque partie prenante adopte progressivement le changement désiré. Et pour qu’un individu accepte de consommer de l’énergie pour changer, il faut que ce changement :
- amène une plus-value pour lui au regard de sa situation actuelle ;
- soit compatible avec ses valeurs et son expérience ;
- soit simple et compréhensible ;
- ne soit pas trop engageant : expérimental, avec possibilité de retour arrière, d’amélioration, d’adaptation.
Dans la suite de cette série, nous évoquerons le rapport entre conduite du changement et agilité.
Merci Ange, je retiens quelques phrases à adopter pour gérer le changement ! J’attends la suite avec impatience, conduite du changement et agilité !
Effectivement Carole ! D’autres articles dans les mois à venir. J’espère que le gros mouvement du changement et la mise en place de l’agilité se déroule bien au COFRAC !
Un article très riche et pertinent. Félicitations.