A l’ère post-covid, les réunions en « visio », dont nous vous avons déjà dressé le bilan de leur impact carbone, sont rentrées dans nos habitudes. Moins contraignantes, notamment à organiser, celles-ci semblent se multiplier. Alors que la France est déjà considérée comme particulièrement portée sur la multiplication des réunions, analysons les conséquences de ce mal et vérifions si cette « maladie », la « réunionite » est si spécifique à l’Hexagone ?
La réunionite : Quésaco ?
La « réunionnite » est un terme qui désigne la multiplication du nombre de réunions. Loin de nous l’idée cependant de remettre en question la nécessité de réunions régulières et de la communication interne. Cette « manie » pointe plus précisément l’idée que ces nombreuses réunions desservent les organisations, notamment par l’absence de contenu et de cadrage clairs.
Plusieurs causes peuvent donc expliquer en quoi ces réunions sont « inutiles » ou « inefficaces » : un nombre trop grand de participants, peu de préparation, durée inadaptée, une mauvaise animation ou gestion du temps, trop de digressions…
Les raisons sont multiples, mais nous rappellerons sans doute à tous quelques ennuyeux souvenirs. Qui ne s’est jamais posé la question de sa présence en réunion, notamment lorsque l’on supporte déjà une charge de travail certaine ?
La question n’est pourtant pas nouvelle, ce qui nous permet d’avoir plusieurs données pour examiner le sujet.
La réunionite : une spécialité française ?
Penchons-nous donc sur les données dont nous disposons désormais pour mieux comprendre l’ampleur de ce phénomène. A titre d’exemple, une enquête de 2018 montre que 92% des cadres participent régulièrement à des réunions, pour une durée moyenne hebdomadaire de 4 heures. Pour autant, seuls 12% des sondés considèrent que « toutes ces réunions » sont nécessaires et productives. Les fonctionnaires ne font d’ailleurs pas exception et une large majorité estime qu’il serait plus pertinent de limiter ces regroupements.
Cette « obsession » n’est évidemment pas sans impact économique. Des chiffres plus récents, notamment regroupés par l’entreprise Sherpany, montrent que ce phénomène s’amplifie. Il est d’ailleurs fort probable que les chiffres post-confinement soient supérieurs.
Pour autant, malgré notre réputation de mauvais élèves, ce phénomène ne peut être qualifié de « franco-français ». En effet, RTS estimait par exemple à 32 milliards d’euros la perte due à ces excès. Les sondés soutenaient ainsi que 2 tiers de leurs réunions étaient inutiles. Si l’on se penche sur nos voisins outre-Rhin, dont on ne cesse de vanter l’efficacité et l’exemplarité, ils ne font pas non plus exception. L’addition de ce « Meeting Madness » s’élève pour eux à 65 milliards d’euros.
En somme, ces nouvelles dérives semblent donc plus propre à une époque, qu’à l’ingouvernabilité d’un pays « où il existe plus de 258 variétés de fromages ». Il reste toutefois indéniable que les réunions demeurent nécessaires au bon fonctionnement d’une organisation. Voici donc quelques uns de nos conseils pour limiter ces dégénérescences.
Nos conseils pour se protéger de ce virus
Même si nous devons également nous rappeler ces principes, en tant que cabinet de conseil, notamment spécialisé en organisation, nous pouvons souvent être confrontés à ce genre d’écueil.
Il semble donc fondamental de rappeler le caractère impératif de la préparation d’une réunion. Même si cela semble évident, l’absence ou la faible préparation d’une réunion est une erreur courante. Elle permet de se projeter, de gagner du temps et de la cadrer.
Ce cadrage s’illustre notamment par la clarté de l’ordre du jour : de quoi parle-t-on ? Pourquoi se réunir pour traiter de ce sujet ? Est-ce nécessaire ou préférable à une autre forme de traitement du problème ? La réunion doit-elle entraîner un arbitrage et des décisions claires sur un sujet ? En bref, vers où naviguons-nous ?
S’il faut évidemment rester agiles et savoir s’adapter à la situation, aux discussions et à ce qui en émane, une bonne gestion du temps est également primordial. A nouveau, une bonne préparation permet d’estimer avec plus de précision la durée nécessaire à une réunion. La position du time keeper, gardien du temps, peut donc s’avérer pertinente pour garantir une bonne gestion du temps. Pour citer Aristote : « in medio stat virtus« , tout est une question d’équilibre, de juste-milieu. Une réunion trop courte sur un sujet fondamental risque de ne pas permettre de remplir les objectifs de la réunion tandis qu’une réunion trop courte risque de favoriser la déconcentration et l’inertie.
Plus présent que le rôle de gardien du temps, l’animateur, le leader de la réunion a également un rôle crucial dans le bon déroulé d’une réunion professionnel. Il permet de trancher lorsque les discussions s’éternisent, de recentrer le débat lorsque l’on s’en éloigne, mais aussi de laisser la liberté de creuser certaines digressions pertinentes.
Enfin, le nombre de participants est un des enjeux qu’il convient évidemment d’évoquer. Si certes, les conseils précédents peuvent permettre de très bien gérer une réunion avec beaucoup de participants, si tant est que la plupart soient silencieux, cette surpopulation est parfois due à une volonté de ne pas froisser les personnes qui ne sont pas invités. Pour autant, plus les invités sont nombreux, plus il est facile de se « fondre dans la masse », d’être « passager clandestin » et vaquer à d’autres occupations. Jeff Bezos a ainsi résumé cette idée par la 2-Pizzas Rule : si deux pizzas ne permettent pas de nourrir l’ensemble des participants, c’est que vous êtes trop nombreux. Notons cependant que la taille des pizzas n’est sûrement pas du même ordre que les nôtres, mais l’idée est assez parlante.
Néanmoins, si la réunion se doit d’être limitée en nombre de collaborateurs, rien n’empêche de diffuser plus largement le compte-rendu de celle-ci. Il s’agit même plutôt d’une bonne pratique. Les participants qui seraient restés passifs s’ils avaient assisté à la réunion pourront adopter une posture plus active en lisant ce compte-rendu.