Dans le cadre de nos rencontres avec des entrepreneurs, nous avons eu la chance de rencontrer Florence Vasilescu, fondatrice d’une plateforme innovante de Financement pour les entreprises, FirmFunding. Florence partage avec ISLEAN le parcours de l’aventure entrepreneuriale et son expérience.

FirmFunding permet aux PME de trouver des nouvelles sources de financement

Quel est le problème à résoudre qui a lancé FirmFunding ?

Le problème à résoudre est de donner accès aux PME à une source supplémentaire de financement.

Il existe 3 grandes sources de financements pour les entreprises : 

  • L’emprunt bancaire : le chef d’entreprise va demander de l’argent à son banquier ;
  • L’augmentation de capital : le chef d’entreprise fait entrer un nouvel actionnaire qui apporte du capital, et qui acquiert en passant des parts sociales, ce qui a pour conséquence de diluer les actionnaires déjà présent ;
  • Enfin, le financement moins connu des PME, avec l’emprunt obligataire : il s’agit d’un d’emprunt, aux conditions connues à l’avance, qui oblige l’entreprise à des remboursements dans le temps, contre un apport immédiat de liquidités.

Les entreprises cotées, grands groupes, connaissent déjà très bien cette troisième source de financement : il y a dix ans, elles étaient déjà à 70% sur l’obligataire et sont maintenant passées à 75%. Cependant, ces entreprises sont expertes en instruments et accès aux marchés financiers.

Les PME n’avaient que très peu accès à dette privé, alors que c’est un outil de financement très utile, notamment pour les aider à gérer leur croissance et se développer partout en France. 

Les ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire) l’utilisent de plus en plus : elles sont passées en 10 ans de 15% à 30% en obligataire. Les PME seulement de 3 à 7%, comme nous l’indique la Banque de France. 

Le problème sous-jacent est que sans financement, les PME ne peuvent pas se développer et que les PME sont souvent le premier moteur de l’économie dans les territoires !

Entrepreneur financement FirmFunding PME

La solution que j’ai imaginée était de chercher à faciliter l’accès au financement privé pour les PME, en utilisant un outil digital. Il s’agissait de faciliter la rencontre entre des investisseurs professionnels (ex : Société de gestion, Family office) et des PME, pour réaliser des financements obligataires de 1 à 20M€.

Dans cette approche de plateforme de rencontre autour du financement, « Marketplace de solutions de dette privée », j’ai pu confirmer qu’il y avait un problème également du côté des investisseurs : lors de mon étude de marché, les investisseurs m’ont également indiqué qu’ils avaient du mal à trouver des PME à financer sans y passer trop de temps. Il leur manquait un bout de la chaine : comment trouver les entreprises à financer.

Comment avez-vous lancé le projet ?

J’ai démarré seule, début 2016, après avoir quitté l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) : cela m’a permis de passer du statut de régulateur à entrepreneur ! Je m’étais donné 2 ans pour y arriver.

J’ai préféré sauter rapidement le pas seule pour donner corps à mon idée, après une première recherche non concluante d’associé. 

Après avoir créé la société en janvier 2016, j’ai rapidement mené une 1ère levée de fonds en juin 2016. Cela a fait monter à bord des personnes de mon entourage qui connaissaient le projet et auxquels j’ai demandé de constituer un 1er comité stratégique pour pouvoir partager la vision. Cela m’a aidé à sortir de la solitude de l’entrepreneur ! Comme il manquait une compétence dans ce premier tour sur le digital, j’ai également pu faire rentrer un investisseur, entrepreneur expérimenté, sur le sujet.

Au démarrage, je suis passée par une entreprise qui développait des plateformes en marque blanche ; cela m’a permis d’aller rapidement tester mon idée avec des clients pour un coût limité. 

J’ai utilisé mon réseau de contacts pour rencontrer des investisseurs, et ai également prospecté : le marché comptait alors assez peu d’acteurs et j’ai pu rapidement en faire le tour. Cette époque m’a amené à affuter mon projet autour du besoin réel du marché. Je me suis également très vite rapproché de BNPParibas, pour avoir une licence bancaire et pour pouvoir être agent payeur, ce qui permet à la plateforme d’offrir un service complet aux clients. Aujourd’hui, devenu 2 offres séparées.

Fin 2017, FirmFunding réalisait son premier chiffre d’affaire !

Depuis 2018, le chiffre d’affaire est devenu récurrent : cette année-là, FirmFunding accompagnait une dizaine de financements via sa plateforme. En 2019, après une nouvelle levée de fonds, la plateforme a pu participer au financement d’une trentaine d’entreprises. 

Entreprenariat PME croissance

FirmFunding aujourd’hui ?

En 2020, malgré le quasi-arrêt lié à la crise sanitaire de la Covid en mars / avril, la plateforme a permis le financement de 22 entreprises.

Après ces quelques années, la plateforme qui porte la marketplace de financement, ce sont 320 millions d’euros de financement, dans une soixantaine d’entreprises, soit 5 M€ de financement moyen.

Ce sont aussi 250 investisseurs professionnels enregistrés sur la plateforme de Marketplace.

Depuis un an, nous avons également lancé une deuxième gamme de services, en tant qu’agent payeur pour des opérations de placement privé et de closings.

Au niveau de l’équipe, j’ai également pu accueillir deux associés : le CTO (Chief Technology Officer) avec lequel nous avons démarré en freelance, pour entièrement réécrire la plateforme, et une de mes anciennes collègue de l’AMF, dotée d’une expertise en droit couplée à une réelle vision du marché. 

Les suites du développement ?

Nous continuons notre développement, notamment auprès des pays limitrophes pour européaniser les financements de la Marketplace. La plateforme est déjà en deux langues. Nous voyons des PME étrangères et aussi des investisseurs étrangers ; ces derniers peuvent investir en France comme nos investisseurs français dans des PME à l’étranger.

La crise sanitaire a des conséquences différentes selon les pays : si la France bénéficie pour le moment d’un très fort soutien de l’Etat, ce n’est pas le cas dans tous les pays. Il y a donc de très belles PME qui cherchent des financements de croissance. 

Globalement, nous avançons de façon pragmatique, avec une belle équipe, et essayons d’être le plus réactif possible aux besoins de notre marché 😊 

Les enseignements pour Florence ?

Certes, c’est important d’avoir un cap, mais il faut d’abord être prêt à tirer des bords imprévus pendant toute cette phase de démarrage. Dans tous les cas, c’est le marché qui a raison !

Entreprenariat startup

Dans le développement d’une startup, il faut donc être assez ouvert sur le chemin à prendre.

Je pense que c’est important de s’entourer le plus et le mieux possible : je suis convaincue qu’il faut parler de ses idées et ne jamais avoir peur de le faire. On gagne tellement plus à recueillir des avis pour avancer vers le marché, qu’à garder la « meilleure idée du monde » dans un coffre-fort. 

Je suis contente de ne pas être restée seule trop longtemps ! Même si j’ai démarré seule, je pense qu’il faut savoir s’ouvrir très vite au reste du monde, même dans le cas où on démarre en équipe. J’ai vu des amis qui finissait par tourner en rond entre associés. J’ai appris à multiplier les points de vue.

Enfin, ce sont les valeurs derrière le projet qui nous font lever le matin et bien travailler ensemble : avec mes associés, nous sommes convaincus qu’il est critique de favoriser la croissance des PME, créatrices d’emplois, dans les régions. C’est seulement cela qui permet d’éviter la désertification des campagnes, faute d’emplois.

Quelques conseils pour ceux qui voudraient se lancer ?

Bien tester le marché, beaucoup échanger avec d’autres personnes avant de se lancer et ne pas s’enfermer dans une idée : tester, tester, tester.

Aller très vite sur le marché avec un produit, avec un MVP (Produit minimum viable) peu complexe et peu cher (même si on n’en est pas propriétaire, mais si le produit est faible technologiquement…). Si le marché est là, on pourra toujours internaliser la plateforme !

S’entourer, ne pas rester seul trop longtemps. Echanger sur le monde extérieur. 

La création d’entreprise, c’est long. Il faut savoir garder patience. Le Marché vit déjà sa vie, il ne nous attend pas. En plus de la patience, il faut s’être organisé sur le plan financier pour ne pas être pris de court. 

Prendre vite un expert-comptable et un avocat. Ces professionnels du chiffre et du juridique évitent les erreurs de départ, permettent de se concentrer sur son business cœur. J’ai vu trop d’exemples où ces sujets avaient été négligés ! Il vaut mieux réfléchir en amont sur ces enjeux très forts : par exemple, un Pacte d’associés rédigé par un avocat permet de bien baliser les sujets au sein de l’équipe et des actionnaires.