Il n’y a pas si longtemps, je me suis rendue à la Maddy Keynote. J’ai vraiment apprécié cet événement même si, il faut se le dire, le succès était tel qu’il n’y avait presque pas assez de places pour tout le monde !
La journée s’est articulée autour de keynotes et de tables rondes sur les sujets de la santé, l’éducation, la nutrition et le divertissement. J’étais particulièrement contente de pouvoir observer des startups dont j’avais déjà entendu parler telles que Agricool, La Ruche qui dit oui et Percko mais aussi de grandes entreprises telles que Total ou Microsoft. Cette journée a été très enrichissante. Vous pourrez revivre le moment en bas de cet article. L’objectif de cet article n’est pas de vous détailler cette journée mais plus de présenter mes interrogations sur les relations entre les entreprises et les start-up. Pourquoi lorsqu’il y a un événement avec des start-up systématiquement des entreprises sont aussi présentes ? Et pourquoi lorsqu’on parle de start-up on entend souvent parler en même temps de grandes entreprises ? Quels sont les liens qui les lient ? Qu’est-ce que chaque partie gagne à être proche de l’autre ? Est-ce une relation win-win ?
Grandes entreprises et start-up : à deux vitesses
Force est de constater que ces deux organisations ne vivent pas au même rythme. J’ai suivi un MOOC de Centrale Paris / Supelec et du BCG qui explique parfaitement cette complexité. Le MOOC présente deux principes : la vitesse industrielle et la vitesse digitale. Les entreprises ont le challenge de faire cohabiter ces deux vitesses avec une prédominance pour celle industrielle alors que la seconde, rythmée par les innovations et l’agilité, est bien plus vécue par les start-up
Dans les entreprises, les décisions ont des impacts sur le long terme. Elles sont organisées en fonctions qui ont chacune des objectifs sur de longues périodes (entre 1 et 5 ans) et leurs résultats sont prévisibles grâce à des audits comptables et financiers réguliers. Cependant elles sont tout de même rattrapées par cette nécessité d’innover et d’être les premières, les précurseurs pour ne pas se faire doubler par les concurrents : c’est à ce moment que la vitesse digitale prend le dessus.
A contrario, on observe les start-up pour lesquelles chaque décision a un impact immédiat et peut exiger une modification importante de l’organisation, des objectifs, des outils et parfois même du produit ou service à offrir. La plupart du temps ce sont des équipes multidisciplinaires qui font tourner la boutique grâce à un travail collaboratif et agile. La start-up est à son tour rattrapée par le vitesse industrielle lorsqu’elle doit anticiper la montée des ventes et être scalable. Très souvent les start-up ne sont pas prêtes à répondre à l’augmentation de la demande par manque de processus et d’outils. D’autre part, elles conçoivent parfois des produits eux-mêmes non scalables (notamment le cas des applications web et mobiles) ou ne travaillent pas avec un écosystème scalable (fournisseurs, sous-traitants…).
Quand les start-up participent à l’innovation des grandes entreprises
Les grandes entreprises sont friandes d’innovation mais ces envies peuvent être freinées par l’instabilité de l’écosystème des start-up et par de faibles ROI. Les principales raisons sont les suivantes :
- Développer un nouveau marché
- Améliorer une offre
- Garder une longueur d’avance dans l’innovation
Nous avons identifié deux types de relations les plus courantes et représentatives.
Les incubateurs corporate
Une organisation qui se répand de plus en plus en France est l’incubateur corporate. A ce titre, nous pourrions énumérer un bon nombre d’incubateurs corporate.
Un concept existe depuis quelques années : l’open innovation. Il existe de nombreuses définitions et applications de l’open innovation mais l’idée principale est que l’innovation doit venir de l’intelligence collective et du partage. Les possibilités sont décuplées lorsqu’on peut innover à partir de l’innovation d’autres entreprises. Les incubateurs corporate s’inscrivent tout droit dans cette lignée.
Les incubateurs se concrétisent en un espace collaboratif interne à l’entreprise où des outils et des experts sont disponibles des start-up. Une fois intégrées, elles apportent leurs idées et leurs concepts, un peu de fraîcheur et d’audace qu’il manque parfois dans les grands groupes rigidifiés par les processus et la peur de l’erreur trop souvent perçu comme un échec. Dans cette cellule, l’erreur est possible et motrice. Tout est à la portée de la start-up pour expérimenter, rater, recommencer et ce à moindre coût pour l’entreprise : pas de coût de main d’œuvre, pas ou peu de nouvelles machines ou outils à acquérir… Marion Carrette pour Le Point définit la start-up au sein d’un incubateur comme « une R&D d’usage pour un grand groupe ».
Une fois que la start-up a pu prouver son concept, elle peut devenir indépendante, enfin presque :
- Une fois qu’elle est autonome, l’entreprise devient un client ou fournisseur mais n’a plus d’autres relations spécifiques avec la start-up
- Ou alors un partenariat peut être mis en place dans la continuité de l’incubateur pour que l’entreprise reste un client ou fournisseur privilégié
- Parfois les entreprises entrent au capital de la start-up et ont un pouvoir de décisions sur les choix stratégiques
- Dans le meilleur des cas, la start-up est rachetée par l’entreprise
[is_spoiler title= »Un exemple d’incubateur corporate un peu particulier : Kamet d’Axa »]
Axa a créé un start-up studio : Kamet. Ils ont pour objectif « d’imaginer puis de développer les start-up et les projets les plus disruptifs » dans le métier de l’assurance et probablement au-delà car ils ont bien l’ambition de faire émerger de nouveaux métiers. Le modèle d’Axa est d’investir sur des entrepreneurs plutôt que sur des start-up. Le studio a en permanence près de 70 idées en stock. Une fois la start-up en marche, Kamet possède une grosse majorité du capital puis continuera à l’accompagner.[/is_spoiler]
Les partenariats
Les partenariats sont de plusieurs natures et peuvent être plus ou moins formels. Les partenariats les plus courants sont le mentoring et de sponsoring. Les entreprises participent à des événements dédiés aux start-up et à l’innovation ou sont présents dans les espaces de coworking tels que la Numa. Cela leur permet de faire de la veille d’innovations et nouveaux business modèles. Les entreprises peuvent aussi participer au financement d’une start-up comme SNCF développement qui a déjà engagé 8 millions d’euros dans l’entreprenariat. Il existe presque autant de types de partenariats que d’association entre entreprises et start-up.
[is_spoiler title= »Un exemple de partenariat : SNCF et Ouicar »]
La SNCF développe de plus en plus d’offres dans le but d’offrir un service « de porte à porte ». Cela signifie que la SNCF vous accompagne de la sortie de chez vous à la gare et à l’inverse, de la gare à chez vous, et assure bien entendu le voyage en train, bus… SNCF n’a à ce jour pas les moyens de fournir ce service par ses propres moyens. Ainsi, SNCF et Ouicar se sont associés pour que des voitures à louer à des particuliers soient disponibles en sortie de gare (vidéo sur le sujet).[/is_spoiler]
Quand les entreprises sont motrices dans la montée de la start-up
Quel que soit le type de relation, cette alliance est une opportunité non négligeable pour une start-up, à condition de bien poser les conditions dès le début. Grâce aux incubateurs corporate, les start-up peuvent ainsi apporter de l’innovation dans des secteurs très réglementés qui demandent beaucoup d’investissement dès le début, comme le secteur de l’aéronautique. D’autre part, elles ont un accès facilité au marché et notamment un premier client, l’entreprise incubatrice. Mais attention aux délais de paiements et prises de décision dans les entreprises qui sont bien plus élevés que dans une start-up ou une importante décision doit être prise dans la journée voire dans l’heure. Il existe aussi un risque que les concurrents de la grande entreprise refuse d’acheter un produit créé dans l’incubateur du concurrent !
Dans l’ensemble un partenariat avec une grande entreprise apporte de la sagesse dans le projet d’une start-up : les compétences stratégiques sont d’une grande valeur notamment les conseils juridiques. Le partenariat crédibilise considérablement le projet et rassure les potentiels clients. Il permet aussi à certaines start-up d’obtenir une aide financière.
Mais attention, le partenariat doit être win-win, j’entends par là que si l’entreprise avait pour objectif de racheter la start-up après le proof of concept et qu’elle est devenue rentable, alors ceci doit être clairement dit entre les deux parties. Si l’entreprise rentre au capital, un autre problème se pose : quelles seront mes libertés ? Serons-nous bridés par les décisions des actionnaires ?
[is_spoiler title= »Un exemple de partenariat win-win : Mediapost et Doz »]
Doz est une plateforme en ligne facilitant étape par étape une campagne marketing digitale. Doz et Mediapost, filiale de La Poste spécialisée dans le marketing, se sont associés pour un partenariat win-win :
- Doz apporte à Mediapost de nouvelles méthodes de commercialisation de leurs offres, de l’agilité mais incite aussi à remettre en question certains fondements
- A l’inverse, Mediapost a permis à Doz d’enrichir ses offres et surtout de gagner en crédibilité
Grâce à ce partenariat, Doz attire désormais de nombreux grands comptes avec son offre commerciale crédibilisée par ce partenariat et termine l’année 2016 avec une augmentation de chiffre d’affaires de 10% en 6 mois.[/is_spoiler]
Qu’en pensez-vous ? Les start-up peuvent-elles survivre sans les grandes groupes ? Et à l’inverse les grandes entreprises ont-elles un avenir sans les start-up ? Partagez-nous votre avis et vos expériences en commentaire !
Voir aussi cet article de la Tribune qui indique les montants de plus en plus importants que les grands groupes investissent dans les start-ups : http://www.latribune.fr/entreprises-finance/le-financement-des-startups-par-les-grands-groupes-francais-en-plein-boom-633946.html