La transformation numérique : 

dématérialisation, numérisation, digital et compagnie

Ces trois notions sont souvent utilisées pour parler du même enjeu : comment utiliser les TIC ou le SI pour faire mieux – voire différemment – son métier ? Comment faire la différence faire entre la dématérialisation, la numérisation et le digital ?

#1 La dématérialisation : du papier à la donnée

  • La dématérialisation consiste à passer du papier à l’informatique, avec toutes les problématiques que cela embarque. Concrètement, il s’agit de scanner des documents clés pour l’entreprise, afin d’en avoir une copie électronique, plus facilement copiable, transférable et stockable. Démarche souvent très chronophage, la dématérialisation peut néanmoins justifier d’un retour sur investissement : on peut par exemple libérer des surfaces dans ses locaux (gains sur les m²), ou du m3 de stockage chez un prestataire dédié (gains sur les charges de prestations) ; on peut également gagner sur la manipulation, les échanges, les archivages et les recherches des documents (gains sur les effectifs) ; on peut enfin éviter des copies, classements et rangement (gains sur les matériels et équipements) et leurs achats (rationalisation du catalogue de fourniture). Ces gains peuvent justifier le lancement d’un projet, qui a pour objectif essentiel de limiter les coûts induits par la gestion physique du patrimoine informationnel existant (ou stock d’informations papiers).

#2 La numérisation : de la donnée native

  • La numérisation a pour objectif de se positionner sur le flux de création des nouvelles informations au sein de l’entreprise. Elle vise à utiliser au maximum les SI au sein de processus existants. La numérisation la plus répandue est l’utilisation des outils bureautique pour écrire une lettre ou un rapport d’étude : dans ce cas, les documents créés sont directement en format numérique. On peut également penser à des équipements moins courants, comme par exemple, celui que le notaire propose pour la signature sur un pavé électronique. La numérisation est fortement répandue, que ce soit dans la vie quotidienne ou dans les pratiques professionnelles, depuis l’utilisation du traitement de texte, en passant par les suites bureautiques, voire les ERP : on peut également saisir un dossier client, dès sa création, dans un format numérique, accessible alors à plus de personnes en même temps. Les avantages sont multiples et bien connus : l’information est ainsi directement captée dans des formats pouvant être facilement dupliqués, accessibles ou transférables.
  • A ce stade, on n’a pas repensé les processus qui gardent profondément la marque des outils précédents : papier, fax, téléphone, assistantes, circuits de courrier… On fait encore largement du vieux avec du neuf, c-à-d. comme avant mais avec de nouveaux outils.
  • Même si la numérisation offre de nombreux avantages, elle ne doit pas créer davantage de désordres : avant, l’entassement des documents papiers poussait à ranger les choses, mais comment éviter de multiplier les couches informatiques ? Il faut donc éviter de penser que la simple bascule sur un format numérique résout tous les problèmes : il crée de la valeur, mais à condition de maitriser son coût et son utilisation.

 #3 le digital : on ne parle plus d’informatique !

  • Le digital est une notion ou une ambition dont les contours se précisent mais ne font pas encore forcément l’unanimité. Souvent associée au départ à la stratégie. Stratégie digitale ? Cette notion est née du monde de l’Internet et des entreprises de communication : la stratégie digitale a été comprise pendant quelques temps comme les relais de communication sur internet, mobile et tablettes de l’entreprise. Tant qu’il restait stratégie, le digital visait à proposer des formats de communication auprès des clients sur de nouveaux media ou appareils (device). Après cette OPA de la stratégie digitale par les groupes de communication, la transformation digitale a fait son apparition : pourquoi les nouveaux appareils seraient-ils exclusivement réservés aux clients ? En effet, pourquoi un salarié mobile n’aurait-il pas le droit lui aussi d’utiliser son mobile pour communiquer avec son entreprise, par exemple ? Bref, les entreprises avaient introduit le ver dans la pomme et le digital était lancé.
  • A mes yeux, le digital se distingue des deux points précédents, car il vise  ou oblige à reconcevoir les pratiques historiques des entreprises. Au-delà des « gadgets » initiaux (site internet, applications mobiles, réseaux sociaux…), le digital part du postulat que la technologie est dorénavant accessible au plus grand nombre. Prenons un exemple : le contrat de vente sera toujours défini par un accord sur la chose et le prix. Les technologies revisitent plusieurs choses : d’abord l’acquisition de la connaissance de la proposition à faire. Quand Criteo est capable de proposer en quelques nanosecondes des offres personnalisées intéressant le destinataire, ou quand l’Ipad a fait rentrer chez vous la capacité à débiter votre compte en banque sur un mot de passe, vous faites évoluer le contexte de l’accord sur la chose et son prix. Par ailleurs, quand vos clients préfèrent passer par les sites internet pour consulter leurs comptes ou faire leurs opérations courantes, vous devez reconcevoir les raisons d’être de votre réseau d’agences. Et donc les métiers des conseillers. Enfin, pour aller encore plus loin, les technologies ont permis à des nouveaux entrants de proposer des offres en rupture avec les pratiques existantes de certaines professions : les VTC ont commencé à inquiéter les taxis quand leurs applications mobiles leur ont permis de proposer en trois clics un moyen de transport au tarif prévisible en moins de temps qu’il faut pour obtenir une centrale d’appel (voire d’avoir la chance d’attraper un taxi disponible à la volée).
  • Si nous revenons à l’exemple de notre pavé de signature numérique de notaire, nous pouvons mesurer la différence entre la numérisation et le digital : le pavé numérique ne menace pas les notaires. Au mieux, l’étude notariale gagnera en productivité et en qualité. Les tarifs des notaires ne seront pas adaptés pour autant (ils sont en partie réglementés, certes) et les pratiques ne seront pas fondamentalement bouleversées par le pavé numérique ou l’utilisation d’outils bureautiques. En revanche, si vous créez un coffre-fort électronique vous guidant pas à pas pour procéder à une transaction immobilière sur BlockChain, accessible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, de n’importe quel point, vous réinventez l’offre. Si en plus, cette application est didactique et pédagogique, vous pouvez répondre à un besoin également couvert de façon hétérogène aujourd’hui.
  • Arrivés à ce stade, on fait donc du neuf avec du neuf ! On a (ré)inventé de nouveaux métiers générateurs de valeur, en partant de ce que les nouvelles technologies pouvaient apporter.

#ccl : 3 paliers de transformation et de changement des métiers

La dématérialisation, la numérisation et le digital sont trois prismes différents dans l’usage et l’impact des technologies :

  • pour la dématérialisation, il s’agit de faire passer l’ancien monde aux nouveaux formats
  • pour la numérisation, il s’agit de tirer le meilleur des nouveaux formats dans l’ancien monde
  • et dans le cas du digital, on cherche à inventer un nouveau monde grâce aux nouveaux formats

Et si ce n’est pas vous qui allez chercher le digital dans votre secteur, alors combien de temps vous reste-t-il avant que d’autres l’inventent pour vos clients ?

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