Didier Louvet, président d’Adminium, nous présente sur journaldunet.com le marché actuel des coffres forts numériques et ses différentes évolutions possibles.
Alors que les offres de « bureaux numériques » (…) en ligne fleurissent à l’initiative des banques, assurances et opérateurs telco, l’intérêt principal des particuliers pour ces service est détourné au profit exclusif des institutionnels qui les proposent… (…)
Imaginées initialement comme des outils de captation de la relation client, ces offres ignorent la coexistence et donc l’indispensable partage de cette relation entre les multiples institutionnels ou marchands dont le particulier est simultanément client. (…)
Pourquoi cette soudaine agitation ?
Peut-être ces institutionnels anticipent-ils à juste titre les 40 millions de clients particuliers « dématérialisés » à horizon 3 à 5 ans. Autant de clients à qui il faudra continuer de parler, alors même qu’ils n’ouvriront plus beaucoup leurs mails, ne recevront plus de courriers papier (…). Le Bureau Numérique, comme partie intégrante de l’espace client, leur apparaît ainsi comme une solution efficace pour maintenir la relation client sous contrôle : tous les documents du client y sont conservés, il s’y connecte donc régulièrement … chaque connexion est un « contact client » particulièrement qualifié, une occasion de lui transmettre un message, une offre ou une proposition d’action … le tour semble joué ! Mais la solution du Bureau Numérique est-elle aussi évidente, aussi performante qu’elle le semble ?
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La conception initiale de ces offres de Bureaux Numériques a été réalisée, avec pour principal objectif, d’apporter un bénéfice à l’institutionnel : garder le contrôle sur ses clients. Les besoins réels des particuliers ne sont envisagés et considérés à ce stade uniquement dans la mesure où ils sont compatibles avec ce premier objectif. (…)
La bonne (et unique) démarche en la matière est de raisonner « consumer-centric » :(i) faire partir la réflexion du client et de ses besoins
(ii) intégrer ensuite à cette réflexion les objectifs et les contraintes du vendeur (l’institutionnel)
(iii) concevoir le service qui répond d’abord aux attentes clients en maximisant l’intérêt du vendeur(…)
1 – Quelles sont les attentes et les besoins des clients ?
La vie économique « dématérialisée » des particuliers est de plus en plus complexe à gérer : L’information de consommation est pléthorique, multi-sources (…), multi-formats (…) et multi-supports (…).
Les particuliers attendent une solution simple et centralisée pour consulter et utiliser eux-mêmes leurs informations de consommation. Ils recherchent ainsi :(i) un service capable d’agréger automatiquement toutes les informations issues de toutes les sources hétérogènes (universalité),
(ii) une impartialité / objectivité dans le traitement et l’exploitation de ces informations (neutralité),
(iii) une palette de services capables de leur simplifier concrètement la vie quotidienne (utilité).Nous retiendrons ici l’attente principale des clients : l’universalité.
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2 – Quelles sont les objectifs et les contraintes du « vendeur » (l’institutionnel) ?
À l’ère du numérique, le client particulier est de plus en plus exigeant, versatile et informé (réseaux sociaux, comparateurs, forums…). Face à la croissance des coûts d’acquisition, la capacité de fidélisation est un enjeu majeur.
Le vendeur cherche donc une solution pour(i) apporter un service pertinent à ses clients (valeur ajoutée) et
(ii) développer un nouveau point de contact récurrent et privilégié avec eux (unicité). Le Bureau Numérique doit ainsi s’intégrer parfaitement aux services « cœur-métier » proposés en ligne par le vendeur s’il entend maximiser l’efficacité relationnelle de chacune des connexions client.Nous retiendrons ici l’attente principale des vendeurs : l’unicité.
La fréquence des visites clients, générée par l’intérêt du service, permet au vendeur d’augmenter le nombre et la récurrence des points de contacts utiles… En d’autres termes : le vendeur utilise l’intérêt du particulier pour des informations qui ne proviennent pas uniquement de lui pour générer une fréquence élevée de contacts qu’il va exploiter pour son propre compte.
L’unicité se nourrit donc de l’universalité.
3 – Comment concilier un service Universel pour le client et unique pour le vendeur ?
L’universalité du contenu présuppose un « libre accès » aux informations du client que le Bureau Numérique entend agréger (quelle qu’en soit la source).
Mais compte tenu de l’unicité des points de contact que génèrent ces informations au seul profit du vendeur… quel est alors l’intérêt pour un autre vendeur de laisser libre accès aux informations de ses clients à un Bureau Numérique tiers ? Aucune, sauf à accepter délibérément de perdre une occasion de contact avec ses propres clients ! En l’absence d’intérêt commun ou partagé, le Coffre-Fort Numérique proposé par chacun des institutionnels sera ainsi dans l’incapacité d’agréger les informations clients des autres vendeurs. Nous sommes ici au cœur de la problématique … les attentes (i) d’universalité client et (ii) d’unicité vendeur sont incompatibles !Face à cette incompatibilité, deux choix sont possibles :
Choix n°1 : Renoncer à l’universalité.
C’est le choix qu’opèrent actuellement les institutionnels (…). Réduire le service proposé à un simple espace de stockage dont les sources d’agrégation sont extrêmement réduites et que l’utilisateur doit principalement alimenter lui-même. L’attente principale du client n’est pas satisfaite. (…)
Chronique d’un fiasco annoncé !Choix n°2 : Renoncer à l’unicité.
C’est-à-dire permettre et encourager les autres Institutionnels/vendeurs à communiquer avec leurs propres clients au sein même du Bureau Numérique. C’est un choix audacieux, novateur, voir révolutionnaire. (…)
Compte tenu de la multiplicité des offres de bureaux numériques qui est proposée aux particuliers, il est mathématiquement impossible qu’un institutionnel capte 100% de ses propres clients au sein de son offre… Une partie non négligeable de la clientèle de cet institutionnel sera donc utilisatrice d’un bureau numérique proposée par un autre institutionnel dont elle est également cliente. Si l’institutionnel concerné s’oppose à transmettre les informations de ses clients à ces Bureaux Numériques tiers, ces derniers s’opposeront eux aussi à transmettre leurs propres informations… retour à la case départ de l’universalité.(…)
En conclusion
Le « Bureau numérique », qu’il soit proposé par un institutionnel ou un indépendant, doit intégrer une
dimension relationnelle entre l’utilisateur particulier et ses différents institutionnels/vendeurs.
Chaque institutionnel proposant un Bureau Numérique doit ainsi se préparer(i) à développer des espaces relationnels dédiés aux autres institutionnels/vendeurs au sein de son espace
(ii) à interagir avec ses propres clients au sein des « Bureaux Numériques» proposés par les autres institutionnels ou indépendants.(…)
Le gros problème de ces coffres forts numérique est bien la manière de les alimenter
Soit ils sont alimentés automatiquement, soit simplement (bouton à cliquer comme le « in » de linkedin ou le « f » de facebook) voire un glisser déposer.
Sinon, vu la complexité de connexion et d’upload, on ne l’alimentera jamais
Bonjour,
Cet article est intéressant car il prend le parti d’opposer les deux positions du vendeur et de l’acheteur. Toutefois, comme d’habitude, la vérité est entre les deux. Le service prend de la valeur, comme l’indique Kalousdian, s’il est facilement utilisable.
Que met on dans un coffre fort (numérique) ? Des objets précieux, des informations de valeur. Toutefois, contrairement au coffre fort traditionnel qui vise à mettre dans un endroit sanctuarisé des objets et informations, le coffre fort numérique aura pour valeur d’assurer la fluidité de ce patrimoine informationnel. Entre l’universalité et l’unicité, il faut prendre en compte la capacité à faciliter son usage en entrée (glisser déposer, voire un accès direct, comme un « virement » bancaire), et aussi en sortie du coffre fort.