Malgré les clauses de réversibilité des données présentes dans les contrats cloud, le transfert de données d’un fournisseur à un autre reste difficile. Benoît Huet fait le point sur la situation dans le dossier cloud computing du mondeinformatique.fr
« Nos contrats cloud sont très clairs, ils prévoient différents niveaux de garantie (SLA) et une clause sur la réversibilité des données, à savoir que le client qui souscrit à une offre cloud peut sans difficulté majeure récupérer ses données ». Ce discours, tous les fournisseurs de services cloud le tiennent. Il est vrai que les mises en garde sur la réversibilité des données sont largement diffusées auprès des entreprises par la presse, les associations, les pouvoirs publics, les prestataires de services et les syndicats du secteur IT à l’instar du Syntec, par exemple, qui a écrit un guide contractuel à destination des entreprises qui désirent souscrire à une offre Saas.
Dans les faits, la réversibilité est effectivement prise en compte dans les contrats, mais les garanties ne sont pas toujours très claires. En effet, les entreprises peuvent effectivement récupérer leurs données, mais après qu’en font-elles réellement ? « La réversibilité, ce n’est pas seulement un problème de récupération de données, mais c’est aussi le passage de ces données d’un fournisseur à l’autre ou de réinternaliser ces données dans son propre SI. Il faut passer d’une notion de réversibilité à une approche de transférabilité, pas si évidente aujourd’hui par un manque réel de standardisation et de normalisation des offres cloud », explique judicieusement Alexandre Morel, chef de produit chez OVH.
Pour Benoît Mercier, directeur technique de Telehouse, au niveau de l’Iaas, les problèmes de standardisation ou du moins techniques sont essentiellement liés aux clouds hybrides où il faut assurer des transferts sécurisés entre l’existant chez le client et son cloud public chez le prestataire. Pour le reste, on ne peut certes pas bouger les machines virtuelles en exploitation d’un hyperviseur à un autre, mais des outils agnostiques qui permettent d’échanger entre les principaux hyperviseurs du marché existent.
Standardisation : les services PaaS et SaaS dans l’impasse ?
« La transférabilité des données est surtout un vrai problème pour les services cloud de type PaaS et SaaS », précise de son côté Julien Contal, responsable architecture SI chez Solucom.
En effet, les services PaaS sont basés essentiellement sur des frameworks spécifiques propres à chaque fournisseur. Le développeur réalise une application pour Windows Azure ou une application pour Google App Engine mais pas une application pour ces deux plateformes. Google App Engine est limité à Java et Python alors que le développement Windows Azure supporte un plus grand nombre de langages comme .NET ou Java, mais impose au minimum un lanceur en .NET.
Quant aux SaaS, les formats de fichiers sont le plus souvent propriétaires. De plus, de nombreuses applications SaaS ne disposent pas d’API, c’est d’ailleurs souvent des applications spécifiques que l’on retrouve dans les petites et moyennes entreprises qui répondent, il est vrai, à leurs besoins. Dans ce cas, on est bloqué. (…)
(…) « Les surcoûts engendrés par cette réexploitation des données en interne ou sur une autre plateforme peuvent être conséquents », avoue Julien Contal. Et d’ajouter : « il est donc très important pour l’entreprise de ne pas tout externaliser, mais de définir préalablement les données à mettre dans un cloud ».
De son côté, Sylvain Siou, directeur technique chez Vmware, tient à nuancer ce discours ambiant autour du manque d’interopérabilité des applications SaaS. « Ce problème de compatibilité a toujours existé au niveau des applications IT, prenons l’exemple des ERP, à chaque changement de plateforme, les clients ont toujours débloqué un budget significatif pour faire migrer leurs données d’une plateforme à l’autre dans les meilleures conditions ».
Des connecteurs pour résoudre les problèmes d’intégration
Ce manque de normalisation et de standardisation est certes aujourd’hui un handicap, mais, à en croire nos interlocuteurs, cette problématique sera sûrement résolue dans les cinq ans à venir. « On voit de plus en plus de fournisseurs de services cloud ouvrir leur plateforme en créant des passerelles pour passer d’une à l’autre », indique Alexandre Morel. « Chez Google Entreprise, nous mettons à disposition gratuitement des API pour faciliter la migration vers d’autres plateformes », rebondit Éric Haddad, directeur Europe du Sud de Google Entreprise. (…)
Des sociétés comme MuleSoft, Talend ou RunMyProcess en ont même fait leur métier en proposant une multitude de connecteurs facilitant l’interopérabilité entre les services cloud et le système d’information ou l’intégration des données vers diverses plateformes.
Chez RunMyProcess, on revendique plus de 200 connecteurs permettant une intégration technique complète avec Google Apps et plus de 1000 connecteurs disponibles dans une bibliothèque dédiée pour Salesforce, Zoho, Oracle CRM, pour n’en nommer que quelques-uns. RunMyProcess offre aussi des outils pour configurer en toute simplicité de nouveaux connecteurs. (…)Dans cette normalisation, l’Europe devrait d’ailleurs jouer un rôle important d’ici à la fin de l’année 2013. En septembre dernier, la commission européenne a d’ailleurs mis « un peu » la pression sur les fournisseurs en appelant à une clarification des normes pour assurer l’interopérabilité du cloud (…)
En attendant, la Commission encourage les administrations publiques à montrer la voie en adoptant plus de services cloud basés sur des standards ouverts. C’est d’ailleurs la démarche de l’Etat français avec la création de son cloud souverain Cloudwatt qui utilise la plateforme IaaS OpenStack (…). Rappelons qu’OpenStack qui se veut une alternative aux IaaS propriétaires est un projet Open Source (…).
Bravo à RunMyProcess
Il y a un gros marché à conquérir : la migration de SI de syndics.
Aujourd’hui : que de la ressaisie !