Je suis allé au Learning Technologies France, salon dont l’édition 2019 a accueilli plus de 5000 professionnels du e-learning, de la formation, des ressources humaines et de la gestion des talents du monde entier. Mon objectif ? Capitaliser sur l’expérience des entreprises qui ont lancé des projets de transformation en terme de formation, afin de mieux aider nos clients à réussir les leurs.
Incorporer l’e-learning : qu’en disent ceux qui ont réussi ?
La formation représente un enjeu fondamental pour une organisation. Les cycles sont dorénavant compressés : il fallait 50 ans pour que la moitié de ses compétences deviennent obsolètes il y a une génération, aujourd’hui cela peut prendre 2 ans seulement.
C’est à la fois une opportunité et une menace, que ce soit pour les organismes de formation ou pour leurs clients. Le marché du travail est en tension dans certains secteurs (qui trouve assez de développeurs Java compétents ?), alors qu’au même moment le taux de chômage reste relativement élevé en France. L’e-learning, ou l’apprentissage électronique n’est qu’un outil parmi d’autres pour répondre à ces besoins, mais il était le point focal de ce salon. Comment réussir la mise en place de l’e-learning dans son organisation ? Voici un tour d’horizon des bonnes pratiques
Construire des mesures pertinentes
Je dirais entre 500 et 1200 calories
Dédier des ressources à la formation se justifie si l’organisation peut en tirer un bénéfice suffisant. Il faut donc réfléchir aux indicateurs qui seraient impactés positivement ou négativement pendant et après la mise en place d’outils d’e-learning. Cela dépendra fortement du secteur d’activité, voire des types de formations suivies :
- Saint-Gobain a par exemple commencé par une formation sur les conflits d’intérêts, et l’une des métriques importantes était le nombre de questions posées par les collaborateurs au département Compliance, indiquant une meilleure sensibilisation à la problématique.
- Dans le cas des formations linguistiques, 7Speaking conseille de cartographier le niveau de ses collaborateurs, et d’établir une cartographie de la cible de besoin linguistique nécessaire pour le métier. Cela permet d’avoir un point de départ, un objectif et une série de rendez-vous intermédiaires qui permet de vérifier si l’écart entre le niveau actuel des collaborateurs et la cible est bien en train de se combler, et à quel rythme.
- Galeries Lafayette mesure le succès de sa démarche en partie grâce à la réduction du time-to-market des nouveaux produits, pour lequel la formation en e-learning est bénéfique.
Engendrer l’adhésion au projet : Et si on commençait par penser à ceux qui forment ?
Introduire une part importante d’e-learning a non seulement un impact sur les collaborateurs qui suivent les formations, mais cela en a surtout sur les collaborateurs dont c’est le métier : les formateurs.
Si beaucoup d’entre eux fonctionnent dans une salle, avec un tableau blanc, des chaises et beaucoup d’échanges, le métier est en train d’incorporer une part plus importante de création de modules et de parcours de formations en ligne. L’objectif est souvent qu’à terme, la charge consacrée à la formation en présentiel répétitive soit réduite pour laisser place à un travail d’ingénierie pédagogique, qui est peut-être plus stimulant intellectuellement. C’est en tous cas un changement à appréhender et à gérer.
Il faut faire comprendre aux formateurs que s’approprier un outil ne représente que 20% du travail. Il reste 80% de pédagogie, qui est leur point fort – Isabelle Boisard, Directrice de la Formation, L’Académie – Galeries Lafayette; BHV Marais
Le rythme de sortie de nouvelles formations et de mise à jour
D’après Charlène Berneau, Corporate Learning Innovation & Transformation Manager à Saint Gobain, les contenus liés au groupe sont relativement stables, avec une durée de vie de 4-5 ans. Cependant, les contenus métier sont beaucoup plus variables et évoluent selon les besoins. C’est donc a priori là que sera concentrée la charge de travail.
Comment faire pour réussir le lancement de ses nouveaux modules et parcours de formation ?
C’est là que les philosophies divergent, avec des approches top-down ou des modèles de transmission virale. Galeries Lafayettes mise sur le rôle du manager, qui joue un rôle d’incitation à se former ; il faut qu’il ajuste son discours en conséquence. A l’inverse, Saint-Gobain s’appuie sur des profils intéressants : les influenceurs, les meilleurs apprenants, les role-models. Ils reçoivent en priorité les contenus nouveaux et sont plus à même de s’y plonger et d’en parler autour d’eux. Mais tous s’accordent sur une chose : il faut marquer le lancement de l’opération. Certains consacrent une semaine par an à la formation dans toute l’entreprise et célèbrent l’apprentissage comme à Saint-Gobain.
Les profils influenceurs peuvent faire des merveilles, encore faut-il les identifier
Les erreurs à éviter : Rater l’opportunité des outils disponibles ATAWAD
ATAWAD, pour Any Time, AnyWhere, Any Device, désigne la possibilité d’accéder à sa formation à tout moment, tout endroit, et sur n’importe quel support, notamment le smartphone qu’on a tout le temps sur soi. Le concept renforce l’un des avantages inhérents à l’e-learning : l’allègement de la logistique associée à la formation. Choisir un outil qui ne soit pas probant sur tous types de supports sera un facteur limitant dans la plupart des organisations.
Ne pas fournir de certification valorisante
L’e-learning souffre toujours de l’image d’un mode de formation moins légitime que la formation en présentiel. Sous-estimer l’importance de la certification portera forcément atteinte au succès de votre projet. Un professionnel qui peut afficher fièrement sa certification sera plus demandeur non seulement parce qu’il sent que son effort est reconnu, mais aussi parce qu’il a le sentiment que la formation délivrée a de la légitimité. C’est une des clés du succès remontées par 7Speaking, Galeries Lafayette et Services Industriels de Genève.
Cloisonner les parcours de formation
On pourrait penser qu’il est bon pour les collaborateurs de se cantonner aux formations que l’on a choisi pour eux. Ce serait déjà bien s’ils suivaient toutes les formations obligatoires. Mais les témoignages des entreprises présentes au salon montrent que les inscrits sur les plateformes sont parfois très demandeurs, et n’hésitent pas à demander accès à des parcours qui ne les concernent pas directement, mais qui sont adjacents à leur métier. Une bonne manière de favoriser le recrutement interne ?
Prolonger tous les modules
Que ce soit pour Services Industriels de Genève ou Saint-Gobain, les modules courts règnent en maîtres. L’objectif est d’avoir des petites « capsules de connaissance » que l’apprenant peut s’approprier pendant les interstices de formation, c’est-à-dire les petits temps morts dans la journée, que l’ATAWAD permet de valoriser : assis dans le bus, en attendant un client, etc. Toutes les formations ne se prêtent pas à ce format, mais il faut être conscient que certains y sont adaptés.