Nous suivons régulièrement le sujet (comme beaucoup) sur le numérique et l’éducation : la distribution des tablettes, le Byod préconisé par l’Education nationale dans la foulée, et maintenant un retour sur l’impact de ces équipements sur l’apprentissage ! Enfin, une étude statistique sur le terrain de la raison d’être de l’école à l’ère du numérique : faire progresser l’apprentissage. Alors, tablette or not tablette ? Quel équipement pour les élèves ?
L’étude publiée 2021 : « premiers résultats du plan de 2015 »
Dans une étude récente, la DEPP fait une évaluation multidimensionnelle de l’impact des équipements numériques mobiles sur les apprentissages. Il s’agit de prendre du recul sur les tablettes distribuées aux élèves depuis 2015 et de savoir ce que cela apporte à leurs apprentissages.
Comme vous le savez, le plan Tablettes est un investissement très élevé (initialement un milliard d’euros), qui mérite effectivement une évaluation.
La DEPP fait donc une étude sur environ 70 classes de 5ème et de 4ème en comparant des classes avec des élèves équipés et non équipés de tablette ou d’ordinateur portable : un Equipement Individuel Mobile (EIM). Cet EIM peut provenir du Plan Numérique (avec distribution des tablettes) financé par l’éducation nationale ou non. Seul l’accès de l’élève à un équipement pendant la période d’observation compte, indépendamment de la source de financement de l’EIM.
Dans son introduction, l’étude cite la bibliographie des études précédentes menées dans le monde, rappelant que ce sujet du lien entre le numérique et l’amélioration de la pédagogie va bien au-delà des frontières de notre Education nationale : ces études varient dans le niveau d’impact, mais comme dit l’étude « Les études trouvant des effets négatifs sont rares ». Elles existent pourtant et le sujet mérite une observation continue et vigilante.
Saluons ce travail statistique de longue haleine qui permet à la France d’alimenter une doctrine en capitalisant, dans la durée, sur les investissements faits. Que nous dit donc cette étude ?
L’équipement numérique des élèves améliore les compétences
En synthèse, je retiens que la distribution aux élèves de tablettes ou d’ordinateurs portables semble porter des fruits pédagogiques :
« En fin de cinquième, on observe un effet positif des EIM sur les résultats des élèves en compréhension orale du français et sur leurs compétences numériques.
En fin de quatrième, les résultats des élèves bénéficiaires d’EIM connaissent également une évolution positive en compréhension écrite du français et en mathématiques par rapport aux élèves non équipés.
De manière générale, les effets mesurés deux ans après la distribution des EIM correspondent à la progression d’un rang dans la classe pour un élève médian ».
Pour citer un des résultats majeurs de l’étude (ci-dessous en graphique), les élèves semblent développer presque dans tous les niveaux sur quatre matières plus de compétences que le groupe des élèves non équipés.
Au-delà de la tablette, le professeur !
Dans les facteurs d’explication de ces remarquables écarts entre groupes d’élèves, une des explications vient des professeurs : les établissements de l’échantillon dont les élèves sont dotés d’EIM comptent en effet plus de professeurs eux-mêmes dotés d’outils numériques. Près des trois quarts des enseignants de ces établissements sont eux-mêmes équipés, contre un peu plus de la moitié pour les collèges standards.
Et dans les collèges dotés, ces professeurs ont senti une plus grande liberté dans l’utilisation du numérique au service de l’enseignement : sans se sentir plus compétent ou sans déclarer être mieux formés et sans développer plus de pratiques collaboratives entre professeurs, ces enseignants intègrent néanmoins plus le numérique dans le projet éducatif et l’accompagnement des élèves et créent plus de séquences avec les élèves pendant lesquelles ces derniers utilisent le numérique.
La note s’achève par un insupportable suspens : une étude ultérieure nous dira dans quelle filière s’oriente les élèves de l’échantillon observée quand ces derniers passeront après leur classe de troisième. A suivre, donc.
Retour sur PISA 2018 : le numérique encore lui !
Sans attendre la suite de l’étude de la DEPP (que nous serons néanmoins heureux de lire), nous avons retrouvé ce fragment de texte dans nos cartons d’articles antérieurs non publiés : dans l’étude PISA 2018, un focus avait été fait sur les éléments pouvant avoir une influence sur les niveaux de l’élève, l’usage de l’élève de matériel informatique pendant ses études a un impact sur ses résultats. Sur 31 pays[1], les élèves qui répondent utiliser du matériel informatique pour étudier[2] ont des meilleures moyennes en mathématiques que ceux qui déclarent ne pas en utiliser.
En rouge, les notes moyennes des groupes d’élèves qui utilisent du numérique dans l’échantillon de pays de PISA.
En France, les élèves ayant accès à des équipements et ressources numériques ont en moyenne un résultat de 503 points, alors que les autres élèves ont un résultat de 434 points.
D’une certaine façon, l’étude de début 2021 de la DEPP confirme cette tendance et commence à poser des pistes d’explication : ces meilleurs résultats sont dus au travail développé par le professeur dans ce nouvel environnement, dans lequel le numérique est mieux accepté.
[1] Parmi les 37 pays, PISA n’a pas de données sur 6 pays : Canada, Colombie, Allemagne, Pays Bas, Norvège et Portugal
[2] Averages for age 15 years PISA mathematics scale: overall mathematics, by Available for you to use at home: Portable laptop, or notebook