Depuis le 13 mars, les écoles sont fermées pour des raisons sanitaires légitimes. Dans la foulée l’annonce, les écoles devaient organiser la « continuité pédagogique ». Une transformation menée tambours battants pour de nombreux professeurs, avec les moyens du bord et beaucoup de bon sens personnel. Que restera-t-il le 11 mai ?

Quelques repères sur l’éducation en France

Commençons par les chiffres clés : l’éducation nationale, ce sont d’abord 12,5 millions d’élèves, dont 6,7 millions en primaire et 5,7 millions dans le secondaire (6ème à terminale, toutes voies confondues).

Ces élèves se répartissent dans environ 62 000 établissements, dont 53 000 établissements publics et 9 000 privés. Ces établissements sont d’abord 50 000 écoles élémentaires, 7 000 collèges et 4 000 lycées.

Le moteur dans le réacteur, ce sont 880 000 enseignants, tous niveaux confondus, pour un Ministère qui compte 1 145 000 fonctionnaires.

Enfin, le coût annuel d’un élève passe de 6 000 à 12 000 euros entre primaire et les dernières classes.

Le résultat de tout cela produit 80% de bacheliers dans une génération.

Rappel des épisodes précédents

Le numérique ne s’improvise pas et ces projets prennent du temps. Observons ce qui se passe depuis quelques années entre l’école et le numérique.

À la rentrée 2016, 103 collectivités territoriales sur 108 avaient engagé un plan numérique pour équiper 1668 collèges. 239 établissements avaient déjà reçu les équipements pendant l’année scolaire 2015-2016, les autres le recevront durant l’année 2016-2017. Rappelons-nous que ces autres établissements dont nous parlons ce sont plus de 5 000 collèges…

Fin 2018, 23% des établissements étaient raccordés à la fibre. Pas gagné.

L’équipement, lui, est plus généralisé, suite à un plan d’investissement d’un milliard d’euros, sur 3 ans. On a en moyenne, 1 terminal pour 3 élèves au lycée, 1 pour 5 collégiens et 1 pour 16 élèves du primaire (ce qui revient à 2 par classe de plus de 30 élèves, mais en même temps, « les écrans nuisent à la santé », c’est connu…). Ce qui est dommage, c’est que ce sont les élèves du primaire qui représentent les plus gros effectifs (cf. chiffres clés).

Vous me direz qu’un milliard c’est énorme. Effectivement, c’est beaucoup beaucoup d’argent. Avec une dépense de 150 milliards par an (pour toute l’Education nationale), il faut donc comparer ce milliard investi au budget de 3 ans de 450 milliards. Ce qui fait un investissement en équipement de 1/450, soit 0,22% (ah oui, quand même…).

Les deux dimensions suivantes pour piloter cette transformation étaient :

  • les expérimentations, sorte d’avant-postes des évolutions. eCarto en recense moins d’une centaine sur tous les établissements fin 2018…
  • les logiciels, qui restent une composante, de la transformation numérique. Les établissements ont mis en place un Espace Numérique de Travail (ENT) pour permettre de proposer aux élèves, professeurs et administration d’avoir un espace commun. Fin 2018, 85% des élèves du secondaire avaient accès à un ENT et 20% du primaire.

En 2019, en se rendant compte que 94% des élèves de 12 à 17 ans ont déjà leur équipement, l’Education nationale change de stratégie, pour promouvoir le Byod.

Et en 2020, le Covid vient tout ubériser

13 mars 2020, confinement d’urgence. Les professeurs doivent apprendre à travailler à distance, changer l’habitude de 30 élèves dans une classe. Le Ministère diffuse un guide Vademecum détaillé dès le 20 mars, pour répondre à toutes les questions.

Il y indique notamment que :

« Pour assurer la continuité pédagogique, les professeurs s’appuient sur :

  • Les supports papiers usuels comme les manuels scolaires en possession des élèves, dont la
    plupart sont désormais accessibles en ligne gratuitement.
  • Les supports numériques usuels tels que :
    o Les ressources de l’espace numérique de travail de leur école ou établissement ;
    o Des supports numériques, ressources créées par les professeurs et les ressources
    éditoriales disponibles (BRNE, Eduthèque…) ;
    o La plateforme du CNED « Ma classe à la maison » ;
    o La plateforme « Jules » du CNED pour consolider le travail personnel de l’élève ;
    o Les ressources disciplinaires ou transversales du site académique et des autres sites
    institutionnels. »

Les établissements – qui cherchent des solutions depuis le 13 mars – ont utilisé différents systèmes, détourné de nombreuses applications, pour faire classe : on retrouve des plateformes de Gamers comme Discord, des outils comme Zoom, ou Google Classroom ou Teams ! D’autres se mettent à utiliser classe-numérique ou Laliloo ! Certains diront que ce n’est pas parfait, que cela a été improvisé. Je préfère remercier les professeurs pendant cette période d’avoir su évoluer très rapidement.

Le 11 mai 2020, les professeurs – volontaires – retournent dans les établissements pour amorcer une rentrée des élèves – volontaires eux mêmes – jusque début juin.

Comment valoriser tous les progrès dans la digitalisation qui ont pu être faits grâce et avec les professeurs ? Avec les élèves ? Comment ne pas oublier tout cela dès le 11 mai, en rêvant que la rentrée de septembre 2020 sera « comme avant » ce fameux bon vieux temps…

Pour ceux qui trouvent que je ne vais pas assez loin, je vous recommande aussi cet article.

 

Sources :

  • Education nationale, chiffres clés
  • Synthèse eCarto 2018
  • Vademecum de l’éducation nationale du 20 mars 2020