Le 11 novembre ne sera plus uniquement le jour où l’on commémore l’Armistice de la Première Guerre Mondiale pour les aficionados du Web3. En effet, le 11 novembre 2022 marquera cet écosystème par la chute du géant FTX, l’une des plus grandes plateformes centralisées d’échange de crypto-monnaies. Entraînant ainsi tout un écosystème déjà fragile, peut-on parler de la fin du Web 3 ?

Comment le géant a-t-il pu s’effondrer ?

Pour le grand public, le problème FTX commence le 2 novembre 2022. C’est à cette date que le site d’informations cryptographiques CoinDesk publie un rapport qui va faire grand bruit. Une société de négociation de crypto-monnaies, Alameda Research, également fondée et gérée par Sam Bankman-Fried, le CEO de FTX, qui détenait un montant anormalement élevé de ses plus de 14 milliards de dollars d’actifs en FTT, jeton émis par FTX. A la suite de ça, son plus grand rivale Binance a annoncé qu’il vendrait tous ses jetons FTT. Cela a naturellement fait chuter le prix de ces jetons entrainant un mouvement global. FTX a ainsi été contraint de geler les retraits de sa bourse.

Quelques jours plus tard, le 8 novembre, Binance a annoncé qu’elle avait conclu un accord pour renflouer FTX en rachetant la société avant de faire machine arrière en s’appuyant sur des enquêtes et rapports sur la mauvaise gestion des fonds. Le 11 novembre, Sam Bankman-Fried se résigne à quitter son poste de PDG avant d’être arrêté un mois plus tard aux Bahamas, lieu de résidence de son ancienne société déchue, ainsi que de son holding qui lui avait permis de s’acheter ainsi qu’à ses proches et à certains cadres pour plus de 120 millions de dollars de propriétés.

Le coup fatal pour le Web 3 ?

Cette crise s’inscrit ainsi dans une histoire d’un écosystème déjà fortement fragilisé. Alors qu’elle avait déjà connu plusieurs variations depuis sa création, la célèbre cryptomonnaie Bitcoin, sorte d’étalon de la santé de l’écosystème, avait atteint son âge d’or entre 2020 et 2021 en atteignant la valeur record de 64 895$ en avril 2021. Pour autant, l’impact tardif de la crise COVID, la guerre russo-ukrainienne, l’augmentation des taux d’intérêts directeurs et du prix de l’énergie viennent bouleverser de la célèbre valeur étalon de l’écosystème.

Il n’en fallait donc pas moins que le Web 3 continue sa dégringolade. Les promesses de multiverses n’étant pas du tout encore à la hauteur des attentes, la pullulation de « shitcoins » (crypto-monnaie sans réelle valeur ou intérêt définie) et l’utilisation encore bien en deçà de son potentiel des NFT ont créer une bulle autour d’un marché encore très volatile.

C’est dans ce contexte que la chute de l’entreprise FTX est venue donner ce que certains nomment déjà le « coup de grâce » de cet écosystème, faisant fuir les investisseurs de ce marché encore en pleine expansion et remplies de promesses.

Le Web 3 sera décentralisé ou ne sera pas

Comme évoqué lors de l’introduction, FTX était certes hégémonique, mais il s’agissait d’une plateforme dite centralisée (servant donc d’intermédiaire entre vendeur et acheteur). A l’instar du projet métaverse de l’entreprise Meta (anciennement Facebook), FTX est venue profiter d’un secteur innovant en plein essor spéculatif, faisant fi de l’une de ses valeurs cardinales : la décentralisation. On estime aujourd’hui qu’environ 95% des échanges cryptos se font via des plateformes centralisées, ce qui n’est pas forcément au goût de tout le monde, comme en témoigne Moxie Marlinspike, fondateur de la messagerie chiffrée Signal.

Si ce même principe est également la cause d’une certaine crainte, c’est pourtant sur cette idée que s’est fondée l’idéologie du Web3, à commencer par le cryptomonnaies. Loin d’être, à l’origine, un rêve spéculatif pour les neo-traders et autres digital nomads, c’est cette décentralisation et cette absence de régulation qui fait craindre sur sa stabilité malgré son but originel de pouvoir s’écarter peu à peu du modèle bancaire classique considéré comme faillible suites aux différentes crises.

Additionné à la défiance de certaines figures d’autorité de la tech, la concentration de la possession des Bitcoins, aux critiques plus ou moins légitimes (consommation énergétique, financement du terrorisme), force est de constater que le Web3 n’est pas encore prêt de s’installer dans le quotidien du grand public, pour le moment.

Ainsi, si le Web3, ou a minima, ses promesses sont encore loin d’être tangibles, la chute de FTX semble être une preuve de plus que le Web 3 sera décentralisé, ou ne sera pas.