Jeudi 22 juin se tenait à Nantes un séminaire sur L’industrie du futur organisé par l’association ADN’Ouest (Association des Décideurs du Numérique). La journée fut ponctuée d’interventions en plénière et de retours d’expérience sous forme d’ateliers en petits groupes. Les intervenants, industriels, éditeurs de logiciels et sociétés de service de la région Nantaise, nous ont fait part de leur vision de l’industrie du futur. Voici mon retour sur cette journée riche d’enseignements !

Industrie du futur – retours du séminaire ADN’Ouest

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L’industrie 4.0, un mythe ?

Pour Christophe Cantin, senior manager chez Exeis Conseil, l’industrie 4.0 est bien d’actualité ! « Usine du futur », « Industrie 4.0 »…  les appellations varient mais les concepts sous-jacents se rejoignent.  Il s’agit de programmes d’ampleur nationale soutenus par les gouvernements (Allemand pour l’un, Français pour l’autre) visant à accompagner et développer la croissance du secteur industriel. Et ne vous méprenez pas, il ne s’agit pas de parler uniquement de technologie : l’industrie du futur c’est un changement de mentalité avant tout.

En effet, il s’agit de mettre en œuvre une démarche alliant trois dimensions indissociables : les technologies, l’organisation et la stratégie de l’entreprise. Et cela ne peut être possible qu’en changeant les organisations, en intégrant l’homme au centre du projet, grâce à un sponsorship fort de la Direction…

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Enfin, il est nécessaire d’aborder une réflexion d’industrie 4.0 avec un regard critique sur la maturité des technologies ; tout n’est pas bon à prendre tout de suite. Il y a donc trois étapes indispensables à mener dans l’optique d’initier une démarche d’industrie 4.0 :

  1. Votre projet doit être guidé par les enjeux sinon ce sera un échec
  2. Il est primordial d’évaluer les gains a priori, qu’ils soient financiers ou non, mesurables ou non
  3. Il est nécessaire d’avoir une vision claire des horizons de mise en œuvre des différentes technologies (approche « quick wins », différenciation des horizons stratégiques et tactiques, veille sur les technologies non matures…)

La région nantaise, un terreau favorable au développement de l’industrie 4.0

Les témoignages l’ont prouvé tout au long de la journée, la région nantaise a des atouts et beaucoup d’envie pour lancer des initiatives d’industrie 4.0. Le terreau y est favorable avec un fort écosystème industriel et une culture du numérique très présente.

Le témoignage de Gebo Cermex, labélisé « Vitrine Industrie du Futur » en 2016, en est un parfait exemple.

 

Et là, on est plutôt surpris et content de voir que l’industrie 4.0 c’est bien concret ! Pour Gebo Cermex on parle d’agir pour survivre dans un milieu fortement concurrentiel : la rupture était donc nécessaire. Quelques efforts de priorisation ont été indispensables dans le foisonnement des technologies possibles ; les choix se sont portés sur :

  • les solutions de réalité virtuelle et augmentée pour faire visiter la ligne d’assemblage au futur client
  • la mise en place de cobots sur les lignes afin de gagner en agilité et s’adapter à la demande
  • la collecte et analyse de data pour développer la maintenance prédictive
  • le « jumeau numérique » pour concevoir la ligne virtuelle en 3D et faire des scénarios dans un environnement de simulation afin de détecter les problèmes très tôt dans la conception

Et Fabien Chiron, Industrial IT manager de Gebo Cermex, nous le confirme : « bien sûr ça a un coût, mais le client est satisfait ; c’est une tendance, si on n’y est pas les premiers, la concurrence y sera avant nous »…. Il s’agit bien d’une démarche orientée vers la satisfaction du client, et qui porte ses fruits avec des gains rapides comme la réduction du time-to-market de 25% et du lead time en atelier de 70% !

 

En tout cas, la région peut compter sur une structure forte pour soutenir, favoriser et développer les initiatives d’industrie 4.0 avec le programme transverse Alliance Industrie du Futur et le Pole EMC2.

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« La transformation numérique, ce n’est pas que de la technique, si on n’accompagne pas les équipes c’est un échec »

Voici le témoignage de Tony Connradt et Mathieu Nicolas de la société Armor sur leur expérience réussie depuis plusieurs années déjà de mise en œuvre de projets d’industrie 4.0. Ils nous livrent en toute humilité leurs facteurs clés de succès :

  • une Direction Générale fortement impliquée et motrice
  • un chef de projet avec une forte connaissance terrain mais surtout pas un expert technique
  • une équipe projet aux profils divers, autonomes et motivés, orientés vers l’utilisateur final
  • une méthode agile, laissant place à l’erreur et acceptant la remise en question

 

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« Et concrètement, sur le terrain, comment avez-vous fait ? » demande un participant dans la salle. La réponse des deux ingénieurs d’Armor est pleine de bon sens :

  • communiquer beaucoup et dès le début auprès des opérationnels pour entendre les craintes et lever les doutes
  • réaliser un pilote avant de déployer sur toute l’usine
  • procéder par itérations en ajoutant des fonctionnalités nouvelles à l’outil toutes les trois semaines et en testant au fur et à mesure
  • choisir des « key users » parmi les opérationnels ; ce sont des interlocuteurs uniques dédiés au projet qui permettent de gagner en efficacité dans la remontée des feedbacks du terrain
  • accompagner sur le terrain lors du déploiement par des formations individuelles si besoin, la validation des acquis…

La data : le pétrole du numérique, il faut l’avoir et l’exploiter !

Au milieu de toutes les prouesses technologiques et concepts innovants qu’on nous a présentés il y a bien un sujet qui fait unanimité : la donnée. Tous s’accordent à dire qu’il s’agit d’un enjeu fort de la 4ème révolution industrielle. Savoir collecter la donnée, en permanence, en temps réel et de manière précise, et pouvoir l’analyser est essentiel dans les nouvelles démarches d’industrie 4.0. Eric Poupry (Wonderware) insiste : « On ajoute de l’information à l’information qu’on avait déjà. Donc l’IoT (Internet of Things) ce n’est pas que l’information qu’on collecte, ce n’est pas que les capteurs mais bien les solutions applicatives qu’il y a derrière pour exploiter l’information avec la meilleure expérience utilisateur possible ».

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L’industrie 4.0 ambitionne de changer les mentalités et notre relation au travail

Pour finir, je retiendrai les propos de Maxime Baudry, qui a conclu ce séminaire en nous faisant part d’un retour d’expérience vécu chez Manitou. L’entreprise française spécialiste du matériel de manutention et basée dans la région Nantaise, s’est lancée dans un certain nombre de démarches d’usine 4.0. Parmi les projets mis en œuvre, il y a eu la formation des tous les opérateurs à la suite Google. Les opérateurs savent désormais se servir de GoogleSheet, GoogleForms… C’est ainsi qu’un petit groupe a eu l’idée de réaliser les checklists qualité sur la ligne de production grâce à un questionnaire GoogleForms qu’ils ont ensuite implémenté sur des tablettes qu’ils avaient eux-mêmes acheté. Tout cela s’est déroulé hors du cadre habituel des projets de la DSI. La Direction Générale a été séduite par leur initiative et a accompagné la mise en œuvre. Alors finalement, la 4ème révolution industrielle ne serait-elle pas ce changement des mentalités qui permet de laisser la place aux initiatives portées par les hommes de terrain, à la prise de risque, à la créativité et l’innovation ?

 

Si vous souhaitez plus d’informations sur la vision de l’industrie du futur portée par le cabinet Exeis Conseil, je vous encourage à lire leurs articles dédiés L’industrie 4.0, la révolution de demain ? et Le carnet de bord – Usine du futur