La transformation numérique constitue une opportunité de désenclavement des territoires et de maintien de la vitalité de nombreux départements ruraux. La Loi pour une République Numérique d’octobre 2016 offre ainsi aux collectivités territoriales qui le souhaitent la possibilité de mettre en place une stratégie de développement local des services numériques tirée par les usages.

Une ambition numérique locale élevée

L’Agence du Numérique a été missionnée pour formaliser en 2017 les Orientations nationales pour le développement des usages et des services numériques dans les territoires document devant servir de cadre aux territoires dans la mise en place des usages du numérique.

Les priorités retenues par les départements et intégrées au plan stratégique numérique s’organisent autour de quatre thématiques principales :

  • La mise en place de services numériques aux citoyens : digitalisation des demandes à l’administration et de l’information sur les services rendus (par exemple, l’état des routes), Open Data, démarches favorisant la démocratie participative.
  • Le lancement d’initiatives permettant de favoriser le développement économique : Smart City, Réseau wifi public unifié, espaces de co-working, fab-labs.
  • Le déploiement du numérique éducatif dans les collèges :  ordinateurs ou tablettes, accès réseau, supports de cours en ligne, formation au numérique.
  • La modernisation des administrations locales : dématérialisation des échanges, archivage électronique, hébergement des applications dans le Cloud, outils de pilotage des politiques publiques.

Ces initiatives induisent de nombreuses améliorations des conditions de vie des citoyens, tant sur le plan de la consommation (gains de pouvoir d’achat, accès à une offre plus diversifiée) que sur le plan des services publics (efficacité, fluidité des démarches, économies, etc.) et vont permettre de réduire l’isolement de certains territoires ruraux.

Des populations en souffrances à accompagner

Toutefois des inégalités persistent dans l’accès aux équipements et aux réseaux de télécommunications, même si elles tendent à se réduire sous l’effet conjugué de la baisse des coûts du matériel informatique et du déploiement du THD. Ce dernier chantier notamment est nécessaire afin que la dématérialisation des services de l’état atteigne son ambition de simplifier les démarches des citoyens sans créer de fracture sociale. Nécessaire mais non suffisant.

En effet, de manière plus inquiétante, c’est dans la capacité d’utilisation du numérique que les inégalités se creusent. 17% des français se déclarent en pénibilité sur le numérique et plus de 5 millions d’entre eux cumulent exclusion numérique et difficultés d’insertion. Par ailleurs 39% des français se déclarent inquiets face à la généralisation des démarches administratives en ligne. Sans surprise ceux qui restent à quai sont les populations les plus fragiles : personnes âgées ou handicapées, allocataires de minima sociaux, sans domicile fixe ou populations rurales (pour poursuivre sur le sujet, voir notre interview de Margault Phélip, Directrice Adjoint de Emmaüs Connect).

Le succès des stratégies numériques territoriales passe donc par un accompagnement au plus près des populations les plus vulnérables informer, former, donner confiance et faire évoluer les habitudes.

De par leur mission de proximité sociale avec les citoyens, les conseils départementaux jouent un rôle clé dans l’inclusion des populations au numérique. Si de nombreuses initiatives locales ont été mises en oeuvre (atelier mobile informatique, fablabs “ruraux”, formation au numérique, etc.), la cohérence nationale est encore à mettre en oeuvre. En ce sens l’Assemblée des Départements de France a produit un rapport regroupant 22 propositions visant à uniformiser et partager au niveau national les initiatives mises en oeuvre localement. Parmi ces propositions on retiendra notamment :

  • la nécessité de se coordonner au niveau national dans la proximité ;
  • la proposition de mutualisation les investissements nécessaires à la mise en oeuvre de ces usages numériques ;
  • l’opportunité de développer de nouvelles solidarités en mettant en réseau les initiatives des principaux acteurs de proximité  (services sociaux, associations solidaires, bailleurs sociaux, etc.)

Sur un plan opérationnel, il est nécessaire que l’accompagnement des populations les plus sensibles et les plus éloignées du numérique soit personnalisé et incarné par un interlocuteur de proximité clairement identifiable.