En cette période de congés je me suis intéressé à l’impact du numérique sur mes congés d’été. En effet j’ai l’impression de ne pas avoir le moins du monde changé mes pratiques en termes de vacances d’été nonobstant le fait que mes enfants, évidemment vivent leur propre vie et ne viennent plus avec leurs vieux parents, mais pour le reste j’ai l’impression que je suis un indécrottable casanier et que rien n’a changé. C’est probablement qu’il n’y a pas eu de révolution mais en y regardant de plus près, est-ce vraiment le cas ; quels sont les changements apportés par le numérique ?
L’apparence de la stabilité
Je peux sans crainte affirmer que je ne suis ni un grand voyageur ni un grand innovateur dans la façon dont je passe mes vacances. La faute à une grande curiosité qui me permet de m’intéresser à tout près de chez moi (même si j’apprécierais sans nul doute des voyages lointains et plus dépaysants notamment sur le plan culturel). La faute également à des principes que je me suis fixés il y a longtemps du fait à la fois d’un mode de vie essentiellement citadin pendant l’année, d’origines bretonnes, et d’une parenthèse militaire à la montagne (un truc qu’on appelait le service militaire au siècle dernier). Bref les vacances c’est donc toujours (quasiment) :
- Pas dans une grande ville
- Une partie à la montagne
- Une partie à la mer
- Une partie consacrée à la famille (parents, oncles & tantes…) : cette partie là étant simple à mutualiser avec le critère “Mer” puisque toute ma famille a longtemps été répartie à 80/20 entre le pays d’Iroise (Finistère) et la côte d’Emeraude (Côtes d’Armor) et jamais à plus de 5km de la mer.
Bref autant vous dire qu’avec ces caractéristiques et contraintes de vacances la révolution numérique semble bien loin et objectivement je ne vois aucune révolution en 30 ans sur la façon dont je passe mes congés d’été.
A y regarder de plus près, quels sont les impacts de la “révolution numérique” sur le déroulement de mes congés.
Les trajets en voiture
Le premier impact du numérique concerne les trajets en voiture. Les 10 premières années, chaque trajet nécessitait la présence de dizaines de cartes dans la voiture (certes j’ai toujours aimé les cartes). Et mon épouse, lorsqu’elle ne conduisait pas, tentait tant bien que mal d’endosser la casquette de copilote et de lire les cartes routières. Ce qui finissait très rapidement (vraiment très rapidement) et systématiquement par une engueulade mémorable et des embranchements ratés. Tout cela s’est arrêté brutalement au début des années 2000, à vue de nez vers 2005 lorsque les GPS (TomTom par exemple) se sont démocratisés. Depuis lors plus un seul haussement de ton au sujet du trajet. Je peux vous dire que pour la paix des ménages ça n’a peut-être pas été une révolution mais ça a permis de faire des voyages sans se faire la tête. Cela n’a fait que s’améliorer avec les GPS intégrés aux voitures puis finalement l’intégration des GPS dans les smartphones et les applications gratuites d’itinéraires Waze, Google maps, Apple plans… qui ont ringardisé les GPS intégrés aux véhicules.
Chaque trajet nécessitait aussi un temps de préparation en amont, d’étude du parcours, de calcul des endroits où s’arrêter pour dormir, manger… Avec le GPS plus besoin d’étudier tout ça en amont. Il suffit de renseigner sa destination, des éventuels points de passage et d’appuyer sur OK. Bon ça c’est la théorie, grand moment de solitude en 2014 lorsque voulant partir en Croatie, et ayant en guise de préparation juste regardé la veille l’itinéraire global et sélectionné l’itinéraire Allemagne-Autriche-Slovénie (par opposition à la variante Italie-Slovénie par le tunnel du Mont-Blanc), je m’aperçois en démarrant ma voiture que la Croatie était le seul pays européen absent des cartes “Europe” intégrées à mon GPS. Moment de surprise vite oublié puisqu’à cette époque les smartphones et applis telles que Waze fonctionnaient déjà parfaitement.
Les réservations de logements de vacances
Nous avions été, au tout début, intéressés, peut-être aussi car nos enfants étaient jeunes, par les séjours clés en mains (clubs de vacances tout compris type VVF-Belambra, Vacanciel…)
Puis ensuite nous avons testé les locations de gites (avec le sempiternel site internet “gites de France” qui, à l’époque en tout cas, fonctionnait très mal : lenteurs, recherches dysfonctionnelles…) Mais au bout de plusieurs heures de préparation, recherches nous finissions par trouver ce que nous voulions et n’avons jamais été déçus par nos choix. Mais pour ne pas prendre de risques nous forçions la dose sur le critère de notation des logements (les fameux nombre d’épis, l’équivalent des étoiles pour les hôtels).
Puis les progrès réalisés par les plateformes de location entre particuliers telles que Airbnb, Abritel, Homelidays… ont damé le pion à ces acteurs traditionnels et nous permettent désormais de trouver des logements moins chers et répondant plus précisément à nos critères de destination et de confort et, au début en tout cas (avant que les professionnels n’investissent ces plateformes), d’avoir des contacts avec les habitants des régions visitées. Bref d’augmenter notre liberté tout en diminuant nos coûts de séjours.
Le travail en vacances
Déjà il faut préciser que j’ai souvent eu besoin de travailler un peu pendant mes congés.
Je me rappelle encore des km que j’ai parfois dû parcourir avec mon téléphone GPRS et mon PC portable pour aller, comme me l’avait dit le berger local, après le 4ème kilomètre au point où le sentier s’orientait vers le nord et où une petite vallée s’ouvrait vers l’ouest et là ça captait le réseau mobile et je pouvais envoyer ma proposition commerciale zippée à mort avec mon téléphone GPRS relié en infrarouge à mon PC portable (véridique – c’était dans le Vercors).
Je n’ai plus jamais eu besoin de recourir à de telles extrémités depuis 20 ans. De toute façon je regarde maintenant la carte des réseaux mobiles sur https://www.cartoradio.fr/index.html#/ et je sais à l’avance si mon lieux de vacances permettra d’être bien connecté. Et au pire je me déplacerais de quelques dizaines de mètres avec mon smartphone (plus besoin de PC portable puisque mon smartphone me permet de faire 100% de ce que permet mon PC en terme de communication internet, les normes 3G, 4G et 5G sont passées par là).
Par contre je n’ai plus besoin d’aller discuter avec les locaux ou les bergers du coin pour connaître les endroits où la connexion passe bien. Dommage c’était sympa et rigolo.
Depuis le Covid, le télétravail a progressé et je n’ai désormais plus de problèmes à rester sur mon lieu de vacances quelques jours de plus pour travailler tout en profitant un peu du bon air. Cela est autant dû à la technologie qu’à une évolution des pratiques et des mentalités à cause d’un événement exceptionnel, mais en tout cas le constat est là. C’est maintenant possible : la technologie ET la culture le permettent.
Les randonnées en montagne
Je restais, il y a encore 5 ans, adepte du porte-carte autour du cou, de l’indispensable carte IGN TOP25 et de la boussole. Une des premières choses que je faisais d’ailleurs, en arrivant en montagne, c’était d’aller dans la première librairie venue et d’acheter un topo guide et les 2 ou 3 cartes IGN TOP25 nécessaires pour couvrir correctement ma zone de randonnée. Je savais que mon téléphone me permettait pas mal de truc en terme de cartographie mais il y avait le problème de l’autonomie. Désormais, sauf à partir à l’aventure pour plusieurs jours, les téléphones ont une autonomie impressionnante, même avec le GPS allumé, et les jeunes connaissent aussi très bien l’utilisation de batteries supplémentaires dont ils se servent pour regarder Youtube à longueur de journée. Donc le jour où je dois partir pour plusieurs jours je pars avec une ou deux batteries d’appoint chargées à bloc. Bref, même moi, j’ai abandonné mon porte-carte, mes cartes IGN et ma boussole. Tout ça, mon smartphone le fait en mieux, avec son écran machin-LED il est assez lumineux pour être regardé en plein soleil et ils sont tous étanches pour être désormais utilisés sans crainte sous la pluie.
Bien sûr l’avantage majeur du téléphone c’est que son GPS intégré vous positionne avec une précision incroyable à l’endroit où vous vous trouvez sur la carte. Valeur inestimable pour ceux qui ont du mal à se repérer sur une carte. Même pour les apprentis topographes comme moi et qui adorent les cartes, je me souviens avoir parfois passé de longues dizaines de minutes à chercher, utiliser ma boussole et faire plusieurs recoupements avec plusieurs points pour comprendre où je me trouvais. Sans parler du brouillard qui rendait tout repérage impossible ! Avec votre téléphone désormais, brouillard ou pas vous savez toujours où vous êtes. A ce sujet, je pense que peu de personnes l’ont vraiment remarqué, mais la progression des GPS est hallucinante. En 2005 les GPS mettaient parfois de longues minutes à se caler et avaient une précision limitée à quelques dizaines de mètres. Désormais ces “GPS” exploitent les données des Wi-Fi et de plein d’autres satellites que les satellites GPS américains d’origine. Galiléo et autres… Ces “GPS” ont désormais une précision de positionnement que j’estime (à vue de nez) de l’ordre du mètre. Je ne me suis pas penché sur la question d’un point de vue technique, mais je peux vous affirmer que d’un point de vue utilisateur adepte de montagne, un smartphone et une bonne cartographie sont devenus des compagnons incontournables.
Les prévisions météorologiques et côtières
L’autre impact, que ce soit à la mer ou à la montagne, ce sont les prévisions météo et côtières (marées, hauteurs de vague, houle, …). Dans nos jeunes années, que ce soit en Bretagne près des côtes ou en montagne c’était toujours un sujet de discussions et de moqueries inépuisables, et au début, un temps fou à tester les sites et les paramètres qui faisaient que les prévisions étaient meilleures que celles du journal de Claire Chazal. Cela nous permettait de moquer les performances des Français de Météo France et de constater combien les Suisses ou les Italiens même sur des vallées situées en France étaient bien meilleurs. Désormais cela est bien fini. Même si je ne me suis pas connecté sur une appli de Météo France depuis 20 ans, je suis quasiment certain que ça fonctionne correctement désormais et que les prévisions doivent être au même niveau que les autres ou presque. Personnellement j’utilise Foreca (https://www.foreca.com/) depuis 15 ans et j’en suis toujours satisfait que ce soit à la mer comme à la montagne. Plus Windfinder (https://fr.windfinder.com/) pour les marées, le vent, les hauteurs de vague…
Autant dire qu’en Bretagne comme en montagne, je regarde désormais les prévisions météo systématiquement la veille pour organiser mes journées et que je les regarde plusieurs fois au cours des journées pour ajuster mon planning le cas échéant.
Quel bilan au global ?
Toutes ces technologies sont désormais fonctionnelles et accessibles, elles révolutionnent à petit pas et silencieusement la manière dont nous gérons nos activités de loisir et de vacances au détriment parfois de la communication et du temps passé avec les sachants, les locaux. Je regrette parfois le temps passé à discuter avec certains guides ou accompagnateurs de montagne au sujet de météo, d’itinéraires… Globalement tout le monde regarde son téléphone au lieu de discuter avec ses voisins. C’est compréhensible car cela est très efficace, mais il ne faut pas oublier que le contact humain est également incomparable et qu’une bonne discussion avec un pêcheur local en Bretagne ou le local de l’étape en montagne (pas plus tard que cet été avec l’adjoint au maire d’un village de montagne croisé en VTT) permettent également d’apporter beaucoup.
Dans nos activités de consultants et de chefs de projet chez ISLEAN, nous savons bien que pour nos clients les projets d’amélioration ou de transformation sont des aventures technologiques ET humaines. Si vos projets nécessitent l’endurance du montagnard, l’agilité et la stabilité du marin breton, une bonne dose d’équilibre et de gestion des nouvelles technologies et de l’humain, contactez nous !
Excellent article et très sympa , rédigé en télétravail sur le smart phone j’espère 😉
Merci Eric pour ce bon papier.
Tu es peut-être trop jeune pour évoquer la période précédente où pour le « télétravail » il fallait faire le plein de pièces, la queue devant le publiphone par plus de 30° au soleil, et dans un temps très limité faire le point avec les équipes et se caler pour la résolution des problèmes.
Et à peine quelques années plus tard vivre l’incertitude de la connexion avec le modem qui faisait plein de sons curieux, le franchissement tout aussi aléatoire du firewall, pour au bout de 15-30mn consulter quelques Ko de mails si l’on avait de la chance, ou sinon bruler des cierges à Saint-Isidore (patron des informaticiens) pour que les mails se chargent automatiquement en moins de 8 heures.