Guillaume Coulange a effectué un stage de consultant à ISlean Consulting. Sa mission pour le Ministère de l’Économie portait sur l’usage des TIC pour l’amélioration continue de la performance des PME en France. À l’issue de deux années d’études en classes préparatoires aux grandes écoles au lycée Thiers (Marseille), il a rejoint l’école d’ingénieurs Telecom SudParis, puis un double cursus diplôme Ingénieur-Manager à Telecom École de Management en se spécialisant dans les TIC. Il a également eu l’opportunité d’effectuer une partie de ses études au sein du département Management Science and Innovation de l’University College London, où il a obtenu les First-Class Honours. Il s’est en outre investi dans la vie de son campus en tant que représentant de promotion et Vice-Président réélu de la Maison des Élèves.
Après deux années de prépa, j’ai eu la chance d’intégrer en 2011 une grande école d’ingénieurs française pour suivre un parcours double diplôme Ingénieur-Manager et de partir étudier dans une prestigieuse université britannique.
Le numérique en prépa se résumait à la présence d’un poste de télévision dans la salle de cours. Il faut attendre d’arriver en grandes écoles pour que les technologies de l’information et de communication (TIC) soient plus présentes : WiFi, vidéoprojecteurs, agenda électronique, plateforme éducative en ligne, intranet, quelques tableaux blancs interactifs. Quel contraste tout de même avec la craie et le tableau noir !
En allant étudier à Londres en 2014, je ne m’attendais pas à constater à nouveau un contraste dans l’utilisation des TIC par rapport à mon école d’ingénieurs française. Premier jour sur un campus immense, accueillant 26 000 étudiants : comment se repérer dans tous les bâtiments ? Très simple, il suffit de télécharger l’application mobile de l’université ! Oui, mais comment faire quand on n’a pas de forfait mobile chez un opérateur britannique ? Pas de problème, le WiFi est disponible sur l’intégralité du campus et on récupère les identifiants avec sa carte étudiant. La configuration s’effectue en quelques secondes seulement avec une application vraiment « user-friendly », c-à-d. belle, simple, ergonomique et intuitive d’utilisation.
Les outils mis à disposition
Ce que je ne savais pas encore, c’est que tous les étudiants bénéficient de la bureautique collaborative Office 365 et dispose d’un espace de stockage dans le Cloud ainsi mis à disposition par l’université. Finis les échanges de fichiers par mail, les plateformes d’échanges de fichiers laborieuses et mal fichues, avec par exemple les conflits de versions lors du travail en équipe ! Grâce à ces outils collaboratifs, tout le monde peut travailler, de manière simultanée sur le même document et voir la progression des autres, avec suivi des versions et des révisions.
Le numérique, partie intégrante de la pédagogie
Mais ce ne sont pas seulement les moyens mis à disposition des étudiants qui interpellent, mais surtout le recours au numérique pour l’enseignement. Une des différences entre les écoles d’ingénieurs françaises et l’université anglaise est que les étudiants n’ont qu’une quinzaine d’heures de cours par semaine et doivent fournir un important travail personnel de préparation. Cependant ils ne sont pas seuls dans leur apprentissage. Au-delà du sacro-saint livre de référence toujours disponible en version papier mais aussi sur tablette, la plateforme éducative en ligne (Moodle) centralise l’ensemble des outils mis à disposition des étudiants : vidéos de préparation au cours, QCM, DM, blog, forum.
J’avais également la possibilité d’accéder aux videos des cours auxquels j’avais participé. Comment ? Londres est la ville des CCTV (Closed Circuit TeleVision c-à-d. videosurveillance). En Grande Bretagne, même les bus publics ont plusieurs caméras. Le panneau “CCTV” avec un pictogramme de caméra est partout. Et chaque salle de cours est équipée d’une caméra. Celle-ci, au-delà de servir à la surveillance des salles, est utilisée en synergie à des fins pédagogiques pour enregistrer les cours qui sont ensuite disponibles en ligne sur la plateforme Moodle dans la journée. La vidéo est couplée au document de présentation ce qui permet de naviguer facilement vers un point particulier de la séance. Et c’est votre cours, celui du 20 mars où, à la 34è minute, vous avez été distrait (le temps de récupérer un numéro de téléphone pour organiser la visite du week-end), au moment où le professeur a pris un exemple particulier en illustration. Et pas le cours tourné il y a 2 ans, avec d’autres exemples, avec une chronologie différente où vous ne vous reconnaîtriez pas aussi facilement!
Cet outil de capture video est totalement transparent et automatique pour l’enseignant: il suffit d’allumer le micro-cravate pour que l’enregistrement commence automatiquement, et s’arrête lors de l’extinction du micro-cravate. La publication en ligne est également automatique. Lors de mes cours en France, il fallait réserver caméras et personnel à l’avance auprès du service audio-visuel, récupérer les vidéos, monter, publier… En outre il est arrivé que le système ne soit pas opérant au début du cours, obligeant professeur et élèves à attendre avant de démarrer.
Communiquer par mail ? Oui, mais pas seulement !
Chaque département possède son compte Twitter et pour certains cours, l’utilisation des réseaux sociaux fait partie intégrante de l’évaluation des étudiants. Les étudiants sont amenés à réagir et à débattre sur des articles d’actualité en lien avec le cours. Twitter est aussi utilisé pour donner les consignes d’évacuation lors d’exercice de préparation aux incendies.
Au-delà de la pédagogie, dans la relation entre les élèves et les professeurs, le numérique a aussi pris une place importante : pour assouplir les contraintes spatiales et temporelles, certains professeurs utilisent Skype plutôt que de recevoir systématiquement les étudiants en réunion présentielle. De plus, cet outil permet de réaliser des cours par vidéoconférence en cas de conditions ne permettant pas la tenue normale du cours : grève des transports ou conditions climatiques extrêmes.
Vers la fin du support papier ?
On peut également parler de dématérialisation proche de 100%. L’ensemble des devoirs (sauf examen final) sont remis via la plateforme éducative en ligne (Moodle) qui intègre des fonctions de gestion de dates de remises ; les devoirs sont en outre soumis à un logiciel anti-plagiat (Turnitin). Pour les présentations orales, c’est la même chose, les supports associés doivent être soumis la veille. Le jour de la présentation, le document est déjà présent sur le poste de travail du professeur, prêt à être projeté, supprimant les laborieuses copies depuis des clés USB, les formats incompatibles, etc.
L’enseignant annote numériquement le document avant de le restituer via la plateforme en ligne. Cela permet aux élèves de ne pas se soucier des impressions, mais cette méthode est aussi plus efficace pour l’enseignant : les devoirs peuvent être corrigés à partir d’une tablette et la note est directement ajoutée aux bulletins de l’étudiant sans double saisie et sans risque d’erreur lors du report.
À retenir !
Ce qui ressort de ces exemples est que le numérique, dans les institutions françaises d’enseignement supérieur que j’ai pu fréquenter, est déjà présent mais est insuffisamment exploité, en regard de ce que j’ai pu vivre en Angleterre. En discutant avec d’autres élèves et étudiants, mon cas semble loin d’être unique.
Il n’est pourtant pas nécessaire de réaliser des investissements colossaux en prestation et en équipement. Il faut que le numérique existant soit accessible aux utilisateurs en rendant son utilisation transparente. Il faut avoir le souci de l’efficacité, de la simplicité, du sans couture, se mettre dans la peau de l’utilisateur, dans une logique de service de bout en bout. Il faut avoir le souci du détail, pour rendre l’utilisation lisse et sans accroc. La technologie ne doit plus se voir, seule la valeur d’usage doit rester, avec une impression de progrès et de simplicité.