Les progrès réalisés par les technologies de l’information sont incommensurables et inconnus de la plupart des gens, et même de ceux qui travaillent dans ce secteur, tellement il est ramifié et son activité est foisonnante. Chaque semaine nous découvrons de nouvelles choses intéressantes, et tous les trois mois des choses aptes à transformer profondément des activités existantes. Par exemple l’utilisation très simplifiée d’algorithmes de machine learning nous a récemment permis de doubler la marge d’un de nos clients en améliorant les prévisions de ventes en magasin. La conséquence est que ceux qui savent cela et l’exploitent gagnent un avantage considérable sur ceux qui continuent à bouger des tas de terre à la cuiller à café. Ces derniers sont majoritaires, et ils ont le même droit de vote. Quelles peuvent en être les conséquences ? Comment éviter qu’elles soient facheuses ?

Le progrès numérique fracture-t-il la société ?

Dernières nouvelles du front du progrès numérique

L’an dernier nous conduisions une missions dont le but était de concevoir et construire, avec un partenaire intégrateur, une solution pour ancrer dans la BlockChain l’attribution demi-heure par demi-heure de l’argent des clients d’un broker d’électricité, Volterres, à des producteurs d’électricité renouvelable, afin de favoriser le développement des producteurs et un équilibre du réseau. Ce fut très subtil car il fallait apporter la preuve du bilan électrique chaque demi-heure, source par source, sans divulguer la liste des producteurs et des consommateurs, informations commercialement sensibles.

Energie verte

Cette année, nous avons construit une solution reposant sur des algorithmes de machine learning, qui, en analysant les ventes passées avec les autres données disponibles, ont permis de doubler la marge de notre client, en améliorant la prévision des ventes. Le gain était très significatif sur les invendus, à la charge de notre client, que nous avons réussi à réduire considérablement.

Dans un mode moins high tech, l’ENC de la rue Blomet, pour laquelle nous conduisons depuis 2018 la transformation numérique, a pu traverser le confinement en conservant le lien entre professeurs, parents et élèves, grâce aux solutions de collaboration grand public que nous avons recommandé de déployer, dont la visioconférence. Cette dernière, utilisée moins de dix fois en première semaine de mars 2020, a été utilisée en moyenne 640 fois par semaine en avril et mai 2020, pour des durées moyennes de 45 minutes, et 15 participants en moyenne. Dans d’autres écoles, des élèves n’ont pas eu d’interaction avec certains de leurs professeurs depuis mi-mars 2020.

Vous aviez vu arriver Internet dans les années 1990, avec le RPA, voici venu Intersystem. Qu’est-ce que cela veut dire ? D’abord le RPA : Robotic Process Automation. Donnons un exemple : une nouvelle recrue démarre dans votre entreprise, vous créez un utilisateur dans le système d’information de collaboration, pour qu’il ait un mail, un agenda, la capacité à travailler avec ses collègues AnyTime, AnyWhere, on Any Device (ATAWAD). Puis il faut le créer dans le système de paie. Zou : saisir à nouveau son nom, son prénom, son mail, etc. Vous trouvez cela stupide : c’est de la perte de temps et en plus on peut se tromper dans les nouvelles saisies. Vous demandez à l’éditeur de logiciel de paie s’il a une interface (API, Application Programmable Interface) avec Google Suite ou Microsoft365 : « non, car nos clients ne nous l’ont pas demandé ». Pas d’angoisse ! Il y a le RPA. Le RPA, ce sont des actions mécaniques, simples ou compliquées, mais toujours les mêmes, qu’il est très facile de faire faire par des logiciels  car les règles sont stables. Pour ceux qui en ont déjà fait, ce sont des Macros. Mais au niveau du poste de travail : le RPA prend  des infos dans la fenêtre A où se trouve le nouvel utilisateur créé dans Google Suite, et ouvre le logiciel de paie pour créer un nouveau salarié et copier où il faut les données déjà disponibles dans Google Suite. Internet connectait des réseau qui échangent des données, le RPA permet de connecter des systèmes qui échangent des informations : vive l’Intersystem.

Sur les lecteurs de ce blog, je suis curieux de savoir combien d’entre vous avaient idée que de telles applications étaient possibles,  à des coûts tout à fait abordables : CAPEX de moins de 100 k€, OPEX de quelques dizaines de k€/an, voire quelques k€/an. Si vous avez 2 minutes, je vous invite à me donner l’information sur le questionnaire en fin d’article.

A notre étonnement, très peu de nos clients, pourtant chefs d’entreprises, directeurs, dirigeants, savaient cela.

Nous-même découvrons tous les jours de nouvelles potentialités, à des prix très faibles.

Le progrès numérique fracture-t-il la société : oui !

Si vous attendiez du suspense, il n’aura pas duré longtemps. Toutes les personnes et entreprises qui savent tirer parti des technologies numérique vont faire mieux et bien plus vite ce que font les autres, voire vont faire des choses que personne ne faisait car tout le monde pensait et pense encore que c’était impossible à faire avec les moyens disponibles.

C’est une excellente nouvelle ! Les rentiers de situation, qui tiraient parti de l’effort fait par leurs prédécesseurs sans apporter de  nouvelle valeur, vont être balayés par des nouveaux venus homo creator, qui vont nous rendre la vie plus facile, et nous libérer du temps pour le rendre à notre discrétion. Il faut donc continuer à pousser le progrès, pas de moratoire, pas d’interdiction. On n’arrête pas à cuire nos aliments parce que le feu peut brûler.

A toute pièce il y a un revers : c’est une mauvaise nouvelle pour ceux qui ne sont pas formés, ou qui ont peur de la nouveauté, ou qui ne savent pas s’en saisir, ou qui aspirent à des choses stables et immuables. Ça peut faire beaucoup de monde.

Quelles conséquences à cela ? Le Totalitarisme ?

A l’occasion d’un diner de l’association X-Mines auteurs, j’ai redécouvert Arthur Koestler et son livre « Le zéro et l’infini », « Darkness at noon » en anglais. Ce livre raconte la période des purges staliniennes, pendant laquelle la deuxième génération de révolutionnaires, dont le gris Gletkin, élimine graduellement et systématiquement la première génération, dont le héros Rubashov, qui a vécu la transition de l’ancien monde inégalitaire honni vers le paradis communiste égalisateur par l’extermination au goulag. Dans un des passages, Arthur  Koestler développe ce qu’il appelle la « Théorie des Masses ».

Cette théorie dit que, après une période de forts progrès technologique, les « Masses » sont déchirées entre les happy few qui  bénéficient des progrès, et les autres qui voient l’opulence mais n’en bénéficient pas. Cela conduit à des désordres, et l’arrivée d’un gouvernement totalitaire, au moins le temps de la diffusion des progrès dans les « Masses » de la société.

Je vous laisse découvrir le texte original :

Theory of the masses (https://en.wikipedia.org/wiki/Darkness_at_Noon#Theory_of_the_masses)
Rubashov resigns himself to the reality that people are not capable of self-governance nor even of steering a democratic government to their own benefit. This he asserts is true for a period of time following technological advancements—a period in which people as a group have yet to learn to adapt to and harness, or at least respond to the technological advancements in a way that actually benefits them. Until this period of adaptation runs its course, Rubashov comes to accept that a totalitarian government is perhaps not unjustified as people would only steer society to their own detriment anyway. Having reached this conclusion, Rubashov resigns himself to execution without defending himself against charges of treason.
Every jump of technical progress leaves the relative intellectual development of the masses a step behind, and thus causes a fall in the political-maturity thermometer. It takes sometimes tens of years, sometimes generations, for a people’s level of understanding gradually to adapt itself to the changed state of affairs, until it has recovered the same capacity for self-government as it had already possessed at a lower stage of civilization. (Hardy translation)
And so every leap of technical progress brings with it a relative intellectual regression of the masses, a decline in their political maturity. At times it may take decades or even generations before the collective consciousness gradually catches up to the changed order and regains the capacity to govern itself that it had formerly possessed at a lower stage of civilization. (Boehm translation)
― Arthur Koestler, Darkness at Noon

Depuis 2017, je vois dans l’avancement du monde une triste similarité avec ce qui est théorisé par Arthur Koestler.

La route de la servitude. Le Totalitarisme. Vous en voulez ? Moi pas !

Que faire pour éviter ça ? Créer demain. Maintenant.

Nous avons vu pourquoi et comment le numérique pouvait, comme tout progrès, fracturer la société. Que faire pour réduire et surmonter cette fracture ?

La période écoulée avec le coronavirus a été anxiogène pour nos générations, d’autant plus que nous n’avons pas connu les morts violentes de la guerre, et, pour les moins de 45 ans, n’ont pas fait de service militaire, donc pas touché une arme et jamais eu à se projeter dans une défense armée, jamais eu à considérer la mort comme hypothèse à envisager. Tout ceci nous pousse à déverser des dizaines de milliards d’euros dans la santé, en plus des centaines qui étaient déjà déversées.

Un secteur, pourtant prioritaire pour éviter le totalitarisme, est délaissé par ce déversement de moyens : l’éducation. Pour éviter ce grand écart entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas, il faut former, expliquer, enseigner.

Pour préparer l’avenir, il faut former les jeunes à ce que permet le numérique, et leur apprendre à apprendre par eux-mêmes pour aller plus loin et suivre le train des innovations qui, fort heureusement, ne va pas s’arrêter de sitôt.

Je ne prône pas l’aspersion du secteur de l’éducation à grand coup de sprinkler d’argent public, car plus de moyens ne signifie pas nécessairement plus de résultats. Il faut déployer des moyens, expliquer le sens de cela, et donner des pistes de comment s’y prendre à  ceux qui ne voient pas comment faire.

Dans nos missions de transformation, nous procédons de plusieurs manières :

  • nous amenons de l’expertise de l’extérieur : spécialistes, experts technologiques, experts métiers
  • nous permettons et favorisons l’émergence et la circulation des idées et  innovations à l’intérieur des organisations

Les deux manières se complètent : la première permet de lancer une dynamique, de rompre avec le statu-quo. Comme le disent les Canadiens : « Ce n’est pas en améliorant la bougie qu’on a inventé l’électricité ». La deuxième permet l’appropriation, la diffusion au sein de l’organisation, l’amélioration incrémentale.

En diffusant le savoir dans le secteur de l’éducation, on pourra former nos enfants et les électeurs et décideurs de demain.

Reste à s’occuper des électeurs et décideurs d’aujourd’hui, car ce sont eux qui voteront pour ou contre la liberté dans la démocratie ou le totalitarisme et la servitude.

C’est le contenu de notre métier de consultant en stratégie et transformation à l’ère du digital. Nous faisons découvrir toutes les opportunités à nos clients : faire mieux, plus vite, et faire ce qu’on ne faisait pas, grâce aux technologies. Et une fois cette découverte mise à jour, démarrer la transformation, avec une première étape, pour voir, sans brûler tous ses navires : on prend un besoin très compliqué, pour que ce soit démonstratif, sur un périmètre restreint, pour que le coût reste admissible. Une fois la démonstration faite auprès des équipes qui deviennent ambassadrices de la transformation, la généralisation peut avoir lieu, avec une plus grande facilité.

C’est ainsi que nous contribuons à créer demain, maintenant, en espérant éviter de se retrouver « in the Darkness at noon ».

 

 

Questionnaire : combien d’entre vous pensait qu’on pouvait mener les projets suivants, avec les moyens associés.

Nous vous enverrons les résultats fin août 2020