Dans le cadre de nos rencontres avec des entrepreneurs, nous avons eu la chance de rencontrer Grégoire Berger, fondateur de LIVSTY, une plateforme de financement participatif pour le viager. Grégoire partage pour ISlean consulting son parcours entrepreneurial et son expérience.

Viager et financement participatif : Rencontre avec Grégoire Berger, Fondateur de la plateforme Livsty

Quel est le problème à résoudre qui a lancé Livsty ?

Nous avons fait le constat d’une forte demande pour la vente de viager qui n’était pas satisfaite. Les vendeurs ne trouvent pas facilement d’acheteurs. On compte en effet 5 vendeurs pour seulement 1 acheteur.
Il nous est donc apparu intéressant de proposer une nouvelle approche de façon à rééquilibrer ce marché et aider les personnes âgées qui aimeraient se financer via la vente en viager de leur bien et qui aujourd’hui n’y arrivent pas.
La problématique à laquelle nous avons voulu répondre est « Comment aider les personnes âgées à bien vivre leur retraite ? ».

L’inconvénient du viager est sa mauvaise réputation, alors qu’il s’agit d’un outil formidable pour répondre à un besoin très important des seniors : comment financer et mieux vivre leur retraite. Quand on analyse le fonctionnement d’une opération en viager, on remarque que c’est beaucoup d’argent et beaucoup de risques. Beaucoup de risques car l’opération repose sur l’espérance de vie, qui est une statistique. Sur 100 personnes, la statistique trouve une résonnance mais à l’échelle d’une seule personne, elle n’a plus beaucoup de sens. En plus de cela, le mécanisme de paiement via une rente mensuelle est un gros risque pour l’acheteur. D’une part il ignore le montant définitif de son achat et d’autre part il n’a pas la possibilité de contrôler ce risque, sauf par l’achat de 5, 10, 15 viagers, ce qui n’est pas accessible à la plupart des acheteurs en viager.

Nous avons donc repensé le concept du viager, avec notre plateforme. A partir de la valeur vénale d’un bien (sa valeur estimée) nous allons appliquer une décote qui dépendra notamment du bien, de l’âge et du sexe du propriétaire. Cette décote correspond à la valeur des loyers qui auraient été perçus s’il avait été loué, alors qu’il restera occupé par le vendeur, qui ne paye pas de loyer. Ce montant décoté est le montant que le vendeur perçoit aujourd’hui pour la vente et qui sera financé par les investisseurs. L’intérêt est double :

  • d’une part, l’appartement est acheté à un prix fixe (avec décote) et pourra être revendu au prix du marché plus tard à une valeur plus importante (du fait de la disparition de la décote d’occupation et de l’évolution des prix de l’immobilier)
  • d’autre part, le projet est divisé en parts de 1 000€ chacune, permettant aux investisseurs de participer à un ou plusieurs projets pour des montants relativement accessibles et de mutualiser leurs risques.

Quelle est la promesse face au problème ?

Nous avons mis en place une approche basée sur un financement participatif qui présente plusieurs avantages :

  • permettre de mieux gérer le risque pour les investisseurs en le limitant et le diversifiant : en participant au projet, ils savent exactement le risque qu’ils prennent
  • rendre l’opération plus accessible : permettre un investissement avec des montants plus faibles de façon à ouvrir ce marché à plus de personnes (comparé à ce qui peut se faire aujourd’hui) dans l’optique de rééquilibrer l’offre et la demande

Pour le vendeur : avoir un acteur identifié qui puisse l’accompagner dans sa problématique de financement et présent pendant toute sa retraite, proposer un processus simplifié, sans aléas et différenciant par rapport aux opérations classiques. De plus notre solution est personnalisable aux besoins spécifiques du vendeur : le vendeur perçoit immédiatement le montant global de sa vente mais nous pouvons voir avec lui pour prévoir une rente viagère sans pour autant changer le modèle pour l’investisseur.

Comment avez-vous lancé le projet ?

Je viens du monde l’investissement. J’ai travaillé en banque d’investissement à Londres, et j’aimais bien l’immobilier. Je consultais souvent les petites annonces pour voir un peu ce qui se faisait et c’est ainsi que je me suis rendu compte du nombre important d’offres en viager.

J’ai constaté la demande du côté des seniors, et un fort déséquilibre entre l’offre et la demande. Alors que c’est une formidable opportunité pour aider les seniors à mieux vivre leur retraite, il y avait tous ces inconvénients pour l’acheteur ! J’ai commencé alors à réfléchir à une façon plus intéressante de résoudre ces problèmes.

Après avoir étudié différentes approches possibles, j’ai trouvé que le financement participatif (tendance montante) est une approche intéressante : une implication dans l’investissement réalisé, une optique de solidarité et un investissement gagnant-gagnant. C’était pour moi une manière de faire de l’innovation utile en mariant financement participatif et viager.

J’ai commencé seul cette aventure. Je n’ai pas voulu attendre d’avoir forcément un associé pour démarrer le projet, mais j’ai cherché et trouvé par la suite quelqu’un de passionné par le projet pour se joindre à l’aventure.

Livsty aujourd’hui ?

Livsty existe depuis 6 mois. Nous sommes aujourd’hui 2 associés accompagnés par un incubateur, « Studio» qui nous accompagne.

Nous travaillons sur 6 appartements. Il y en 2 qui sont déjà très avancés dont un en finalisation. En termes d’utilisateurs sur notre plateforme, nous avons 200 inscrits et environ 40 visiteurs uniques chaque jour. Des chiffres encore modestes mais la dynamique est très bonne. Sur les premiers projets, nous avons déjà plus de 30 investisseurs avec un ticket moyen autour de 5 000 euros. L’idée est qu’aujourd’hui n’importe qui puisse investir dans l’immobilier avec 1 000 euros. L’objectif est maintenant de monter en puissance.

Les suites du développement ?

Le viager est un secteur de niche marqué par les a priori. Nous repensons complètement le viager et à proposons une toute nouvelle solution. Il y a donc une importante démarche d’apprentissage, d’éducation et de communication à faire.

Nous avons aujourd’hui un produit très simple et fonctionnel avec un parcours utilisateur fluide, totalement transparent et totalement digital.

Notre volonté est de mettre à la disposition de l’utilisateur, le maximum d’information pour qu’il soit totalement autonome dans sa décision d’investissement et que l’équipe se focalise plus sur le sourcing d’appartement et l’accompagnement des seniors pour trouver la meilleure solution face à leurs besoins (comment les opérations se déroulent ? Quel montant doivent-ils espérer de leur vente ? …).

Je suis en charge aujourd’hui du développement produit et de tout le volet sourcing. Harold, mon associé est plus sur le volet commercialisation et relations avec les investisseurs. Maintenant que toutes les briques sont en place, l’enjeux est aujourd’hui de donner un coup d’accélérateur à l’activité.

Notre démarche actuelle n’est pas de faire croître à tous prix le nombre de biens en portefeuille. Nous préférons rester prudent sur les biens que nous proposons sur notre plateforme et trouver une solution pour chacun des Seniors avec qui nous travaillons, notamment en finalisant les opérations en cours. Aujourd’hui les gens qui viennent sur notre site et qui font tout en autonomie, démarrent avec des placements de 1 000 à 3 000 euros sur les opérations. Il est normal que des personnes qui n’ont jamais entendu parler du projet soient prudentes au départ. Cela veut donc dire que pour des biens ayant des valeurs élevées, il faut beaucoup d’utilisateurs pour atteindre les objectifs de financement ou avoir des personnes qui mettent beaucoup plus. C’est pour cette raison qu’il faut adresser plus d’investisseurs.

Concernant l’accompagnement des Seniors, l’enjeux est de progressivement explorer plus de régions, notre activité est aujourd’hui en région parisienne et Paca (Provence-Alpes-Côte d’Azur). Le but est à terme de pouvoir apporter une réponse adaptée à n’importe quel Senior en France.

Quels enseignements de cette aventure entrepreneuriale ?

Je suis très content d’avoir fait ce choix.

L’entrepreneuriat n’est pas quelque chose de facile mais s’avère une expérience très excitante où on se pose beaucoup de questions ! On n’est jamais sûr de rien.

Je ne voulais pas simplement me lancer pour dire “je suis entrepreneur”, ou “je suis mon propre patron”, mais plutôt monter un projet avec un sentiment d’utilité.

Je suis content d’avoir fait ce test là et d’avoir quitté ma situation de salarié. Je pense qu’on a quelque chose à apporter avec ce projet. On ne sait pas dans 6 mois ce qu’il en sera mais pour le moment les retours sont bons, les gens nous encouragent dans ce projet. Il n’y a plus qu’à transformer l’essai à présent.

Quelques conseils pour ceux qui voudraient se lancer ?

Il faut parler de son projet. Dans mon cas, je n’étais pas particulièrement vendeur de mon projet tant que j’estimais qu’il n’était pas suffisamment avancé alors que c‘était une erreur. Il ne faut donc pas avoir peur d’en parler même si le projet n’est pas encore au stade auquel on souhaite l’amener.

Autre chose, il ne faut pas avoir peur de se lancer. Ça fait toujours un peu peur, on se pose beaucoup de questions… mais en fait, on ne joue pas sa vie. On a le droit de faire des erreurs, l’important est de tester et corriger. Tant qu’on n’a pas encore testé quelque chose, on ne peut jamais savoir si ça va marcher ou pas. Si ça ne marche pas, ce n’est pas grave.

Il faut bien s’entourer. C’est difficile d’être tout seul dans son projet.

Enfin, il faut apprendre à persévérer : c’est un peu bateau à dire mais il ne faut pas s’arrêter au premier « non ». Il y aura toujours des « oui » et des « non » dans cette aventure !