D’après une étude Ricoh Europe de 2018, 59% des PME françaises ne seraient pas prêtes à affronter la transformation numérique qui s’opère aujourd’hui : retard sur le marché, perte de clients, départs de collaborateurs ; les symptômes sont nombreux mais de quelle maladie parle-t-on exactement ?  Le numérique est-il LA réponse à l’affliction dont semblent souffrir les petites et moyennes entreprises françaises ? Suffit-il de se doter des dernières technologies pour opérer sa mue numérique ?

Pourquoi la transformation numérique ne passe pas que par le numérique

La performance ne s’achète pasInvestissement, numérique

Par biais, l’investissement dans de nouvelles technologies, dans de nouveaux outils, est souvent vu comme une nécessité néanmoins garante de la performance de son organisation ; en d’autres termes il suffirait d’investir pour être performant. La diversité des solutions tout en un, des solutions packagées (ERP, outils collaboratifs, technologies de pointe) encourage cet état d’esprit : à mon problème, à mon besoin il existe UNE Solution avec un grand S. Cette Solution n’est que le fruit d’un Benchmark consciencieux… mais limitant. Pire encore : penser « Solution implique Problème/Besoin ». Il suffit d’observer la proportion des échecs des projets du leader des ERP pour s’apercevoir que cet état d’esprit est probablement très répandu : moins de 50% des projets SAP atteignent les objectifs qu’ils s’étaient fixés. En somme, il est aisé mais biaisé de penser par le prisme de l’Outil, de la Technologie, de LA Solution plutôt que par celui du juste besoin. Est-on sûr d’avoir défini notre problème, notre besoin, celui de notre entreprise ? Cette technologie apportera-t-elle une valeur ajoutée significative à mon organisation au regard de son coût et des risques ? Mes problèmes ne s’inscrivent-ils pas plutôt dans une dynamique peu fertile et systémique intrinsèque à mon organisation ? En d’autres termes, la performance ne s’achète pas, elle se construit et s’entretient, notamment par l’innovation.

L’innovation ne se commande pas

InnovationPour innover, suffit-il d’investir dans la R&D et de déposer des brevets ? Ce sont en tout cas les deux indicateurs phares pour juger de la propension à innover d’une entreprise aujourd’hui.  Cela correspond à une vision, selon moi, très procédurière de l’innovation : une idée est émise, on l’étudie, on la sécurise, on investit, on la valide, on l’industrialise pour au final obtenir le Graal, le brevet. Le fait est que l’innovation est un mécanisme par essence anarchique, entropique, contingent et donc difficile à mesurer, d’autant plus que sa performance doit être jugée à l’aune de la valeur créée. Une fois de plus, il ne suffit pas d’investir pour innover, il s’agit d’abord de mettre en place un environnement propice à l’innovation. « On ne fait pas pousser une plante en tirant sur la tige » ! Innover c’est comme vouloir faire pousser des céréales dans un champ : pour réussir, il n’est pas forcément nécessaire d’avoir un beau tracteur, de belles clôtures et un grand champ, il faut d’abord :

  • Acquérir une terre fertile : responsabiliser, impliquer les agents de son organisation, promouvoir l’agilité dans les projets
  • Multiplier les variétés de semences pour voir celles les plus adaptées, penser fail fastla culture de l’innovation c’est pour beaucoup la culture du test
  • Planter les céréales qui sont consommées : intégrer la voix du client dans les réflexions, grâce au design thinking par exemple
  • Casser les clôtures : favoriser les synergies par exemple en pratiquant l’Open innovation

Cette « wishlist de l’agriculteur innovant » présente quelques bases pour développer un environnement propice à l’innovation qui apporte de la valeur pour les clients et pour les collaborateurs d’une organisation mais elle élude le carburant essentiel de l’innovation : l’Homme.

Il faut des Hommes pour innover

A une époque où l’obsolescence des compétences n’a plus grand chose à envier à celle des smartphones, il devient de plus en plus difficile, notamment pour les PME et TPE, de se munir des connaissances nécessaires pour survivre au Darwinisme numérique. A mesure que ces compétences nécessaires fluctuent, l’équation offre/demande se complexifie : plus que jamais, l’éducation et la formation sont au centre de cette équation. La multiplication des Fablabs et autre Innovation Labs est symptomatique de ce besoin en compétences. La demande considérable vécue dans le conseil en stratégie et transformation digitale depuis 24 mois est un autre symptôme. De la même manière, la mise à disposition de certaines données publiques (Open data) correspond à un besoin double : un besoin en compétences et un besoin d’amélioration. D’autre part, n’oublions pas que l’enjeu des compétences se retrouve également de l’autre côté de l’échiquier : les premiers demandeurs à l’acquisition de nouvelles compétences sont les employés eux-mêmes ; réserver des moments et des espaces dédiés à la formation est un enjeu à la fois pour l’organisation et pour ses employés. Pour le vérifier, il suffit d’observer la prolifération des nouvelles méthodes d’apprentissage : Mooc, Webinar, Lunch & Learn, autoformation ; globalement l’e-learning. Pour être performant, pour innover il faut des compétences, et donc des Hommes.