Les radars automatiques rapportent 1 milliard d’euros à l’Etat chaque année. Le nombre de morts et de blessés sur la route ne diminue plus. Et pourtant on rajoute des radars et des mesures liberticides au lieu de promouvoir les véhicules autonomes.

Les radars automatiques : 1 milliard d’euros par an pour l’Etat

Tombé récemment sur un article « Jamais les radars automatiques n’ont rapporté autant à l’État » disant que les radars rapportaient maintenant 1 milliard d’euros par an (1 G€/an), je suis resté pensif. 1 G€, c’est… 3% de l’impôt sur les sociétés ! Les dépenses de l’Etat central en France, c-à-d. hors sécurité sociale, chômage et collectivités territoriales, c’est environ 400 G€.

L’article ne précise pas si ce sont des ressources nettes pour l’Etat, c’est-à-dire si ce montant est ce qui reste à l’Etat quand les opérateurs privés ont prélevés leurs frais d’installation et de fonctionnement, ou bien des ressources brutes. On apprend également que 95% des recettes portent sur des contraventions pour des dépassements de vitesse mineurs (< à 10 km/h). Par ailleurs, le nombre de tués semble buter sur une limite d’environ 3 000 par an. Le nombre de blessés est de l’ordre de 10 fois le nombre des tués.

Le nombre de tués ne diminue plus : on n’est pas allé assez loin !

Comme ces nombres funestes ne diminuent pas, il y a deux conclusions possibles :

1- soit on n’est pas allé assez loin dans la politique actuelle
2- soit la politique menée à ce stade a atteint ses limites et il faut chercher autre chose

Concluant sans risque et avec facilité dans le sens de ce qui est connu et a marché par le passé, l’Etat a donc choisi le 1-.

Et nous nous sommes donc retrouvés avec ce texte de loi adopté par le parlement le 12 octobre 2016 :

– La dénonciation obligatoire par les employeurs
– Une amende quintuplée pouvant grimper jusqu’à 1 875 euros pour les employeurs contestataires
– La conduite sans permis et/ou sans assurance sanctionnée d’une simple amende forfaitaire (NDLR : et pour cause,  à force de perdre un point par ci, un par là, de plus en plus de gens conduisent sans permis ! Entre 500 000 et 750 000 !)
– L’obligation de payer les amendes par le propriétaire du véhicule
– L’obligation d’avoir un permis pour avoir une carte grise
– La création d’un fichiers des conducteurs non assurés
– L’extension de la confiscation du véhicule

En tant que conducteur de moto, je suis le premier à me réjouir de pouvoir rouler sans risquer la mort à cause de chauffards. J’ai vu un utilitaire couper une route passante en grillant un feu rouge la semaine dernière, et je comprends le sens de vouloir dénoncer les coupables de ces infractions pouvant ainsi occasionner de graves accidents.

Effets pervers

Et en même temps, je me rends compte que je passe beaucoup trop de temps à scruter mon compteur de vitesse pour ne pas dépasser les limites. Passer de la vision de près à la vision de loin prend une bonne seconde. En moto, sur les boulevards périphériques bondés, c’est long une seconde : 28 mètres à 100 km/h. Voulant rester concentré en surveillance de ma route, je me suis dit que le mieux serait de me caler instinctivement à la limite : 70 km/h, 90 km/h… Pas du tout évident sans regarder le compteur ! Je trouve qu’il y a une vitesse »de confort », ni trop rapide car perçue comme dangereuse, ni trop lente, car générant de l’ennui. Cette vitesse est éminemment multifactorielle, et subjective. Elle dépend : du trafic, de la qualité et de la nature, ville, campagne ou voie rapide, de la route, de la météo, de la visibilité, de la forme du conducteur… En étant donc à une vitesse inférieure à celle de confort, au bout de quelques minutes, l’attention faiblit. Il y a un autre facteur de danger : comme tout le monde se cale à la limite, on se retrouve à rouler en grappes de véhicules à la même vitesse, motos, voitures et camions, et on finit invariablement dans un angle mort. Donc on freine ou on remet des gaz pour sortir de la grappe parce qu’on s’y sent en insécurité. Et s’il y a à ce moment là un radar, on perd un point.

Pareillement en voiture, à force de perdre un point en roulant à 116 km/h au lieu de 110 km/h, j’ai fini par acheter un dispositif coyote, à fixer le régulateur de vitesse et à prendre des cafés pour ne pas m’endormir. Heureusement à 130 km/h sur autoroute, la vitesse de défilement rend la conduite moins monotone.

Au-delà du régulateur de vitesse, il y a maintenant des technologies de voitures autonomes. Je rêve de ce moment que j’espère proche, où je pourrai partir le soir de chez moi dans mon véhicule, dormir ou faire n’importe quoi d’autre mais pas conduire, et me retrouver le lendemain n’importe où en France, reposé, et prêt pour une nouvelle journée.

Que va devenir cette manne avec la voiture autonome ?

Je connais les objections du type « le problème du tramway » qui font dire à certains que la voiture autonome n’est pas pour demain : si le système de décision d’un véhicule autonome a à choisir entre tuer ses occupants ou écraser un groupe d’enfants devant lui, que fera-t-il ? Si, privilégiant l’altruisme, il sauve les enfants, le premier constructeur automobile qui se dira que ses clients préfèrent acheter chez eux pour survivre vendra plus de voitures. Quoi qu’on en dise, c’est la nature humaine. Si le système privilégie les occupants (et acheteurs) du véhicule, d’aucuns s’élèveront en fustigeant la présence de robots tueurs de plusieurs tonnes x vitesse au carré sur les routes.

Ce débat est intéressant mais se trompe à mon avis de sujet. Avec des voitures autonomes, ce n’est plus environ 3 000 morts et les autres milliers de blessés que nous aurons, mais 10, 100 voire 1 000 fois moins. Dans les voitures comme dans les avions, le maillon faible n’est pas la machine, c’est le pilote !

Un humain peut être créatif, audacieux, génial. Si jusque là on a admis de lui faire tenir un volant pour suivre des lignes blanches et garder une vitesse inférieure ou égale à une consigne affichée au bord de la route, c’est parce qu’on n’avait pas trouvé mieux. Enfin, grâce aux technologies numériques, nous avons un pilote automatique pour les véhicules légers !

Effectivement, il y aura des morts occasionnés par des voitures autonomes. En nombre infiniment plus faible qu’aujourd’hui avec des conducteurs éminemment faillibles. Est-ce une raison pour freiner voire interdire ce qui me semble être le sens de l’histoire ?

Le pire dans tout cela serait que ce soient les pouvoirs publics qui freinent l’avancée des technologies driverless. Car les 1 milliard d’euros de recette des radars auto, eux aussi vont disparaître avec les voitures autonomes. La Tesla, par exemple, reconnait les panneaux le long de la route, connait les limitations de vitesse, et adapte sa vitesse dans les plages autorisées.

Le revenu des radars, un frein au développement des voitures autonomes ?

Les lobbys seront nombreux à se battre contre la voiture autonome : constructeurs historiques qui vont voir leurs chiffres de ventes divisés, parce qu’une voiture autonome, ça se partage infiniment mieux, assureurs, qui n’auront quasi plus rien à assurer parce que le risque aura fondu, opérateurs de transport en commun, car on est toujours mieux dans un petit chez soi que dans un grand chez tout le monde, et, potentiellement l’Etat, comme tout les autres acteurs, au lieu de voir les perspectives de progrès portées par ces innovations, pourra d’abord voir ce qui va disparaître : les rentrées de TVA, le milliard des PV automatiques, la TIPP… Et tous les acteurs à pouvoir de nuisance iront lui demander de préserver l’ordre établi, menace de licenciements économiques ou de manifestations à l’appui. Cf. l’histoire récente des Taxis contre Uber.

L’Etat saura-t-il résister aux revendications de petits groupes rentiers puissants raisonnant à court terme, pour privilégier l’intérêt collectif à long terme ?

En tant que professionnels du numérique, nous avons un devoir de pédagogie pour permettre aux technologies de démontrer et déployer leurs bienfaits auprès de nos concitoyens, même si cela nécessitera – horreur ! – un effort d’adaptation.

En tant que Citoyens, c’est à nous de prendre les choses en main, car l’Etat n’est in fine que l’émanation de représentants que nous choisissons ou tolérons.