La facturation électronique : en quoi consiste cette nouvelle réforme ?
Le 30 septembre 2021, le Ministère de l’économie, des finances et de la relance a émis le « Dossier de spécifications externes de la facturation électronique » afin de poser les principes de fonctionnement de la réforme.
Le dossier précise les exigences nécessaires :
- Au dépôt, à la réception et à la transmission des factures sous forme électronique
- À la mise à jour des informations sur le cycle de vies des factures
- À la transmission de données liées aux transactions B2B à l’étranger et B2C en France
La réforme sur la réception et l’émission de factures électroniques sera mise en application en respectant le calendrier suivant :
- 1er juillet 2024 : réception pour toutes les entreprises et émission pour les grandes entreprises
- 1er janvier 2025 : émission pour les ETI
- 1er janvier 2026 : émission pour les PME et TPE
Cet article a pour but de vous donner une vision synthétique de cette nouvelle mesure et de ses implications pour les entreprises concernées.
Présentation du contexte
L’existant en matière de dématérialisation
La dématérialisation de la facturation s’inscrit dans une volonté politique de moderniser l’économie française.
Cette mesure fait suite à plusieurs initiatives gouvernementales dont la première remonte au 4 aout 2008 avec la « loi de modernisation de l’économie » (LEM). L’État a mis en place la solution « Chorus Factures » destinée aux fournisseurs des entités publiques (relations B2G). Via cette plateforme, les fournisseurs des entités publiques pouvaient envoyer leurs factures de manière électronique. L’ordonnance du 26 juin 2014 a ensuite généralisé la LEM à toute la sphère publique à compter du 1er janvier 2017. Les entreprises avaient dès lors l’obligation d’émettre les factures à destination des entités publiques de manière électronique via le nouveau portail « Chorus Pro ».
Dans le but de faciliter les relations interentreprises au sein de l’Union Européenne, la France a mis en œuvre des réformes juridiques en proposant des dispositifs facilitant cette modernisation des échanges. C’est ainsi qu’avec l’article 153 de la loi de finances 2020, l’échange électronique de factures est rendu obligatoire pour les transactions domestiques entre assujettis à la TVA.
Les objectifs de la réforme
De manière générale, la réforme vise à transformer la chaîne de facturation au bénéfice de l’ensemble des acteurs. Elle poursuite quatre objectifs :
- Simplifier la vie des entreprises et renforcer leur compétitivité grâce à l’allègement de la charge administrative et à la diminution des délais de paiement. Le passage à la facturation électronique représentera un gain pour l’économie d’au moins 4,5 milliards d’euros ;
- Simplifier, à terme, leurs obligations déclaratives en matière de TVA grâce à un pré-remplissage des déclarations.
- Améliorer la détection de la fraude ;
- Améliorer la connaissance en temps réel de l’activité des entreprises.
Quelques chiffres
La réforme s’appliquerait à 4 millions d’entreprises, dont plus de 96% sont de très petites entreprises (TPE), échangeant chaque année près de 2 milliards de factures en B2B. Le ministère estime que le passage à la facturation électronique représentera un gain pour l’économie d’au moins 4,5 milliards d’euros.
Pour le gouvernement, les gains seraient plus importants notamment pour ce qui attrait à la lutte contre la fraude. En effet, la Cour des comptes et l’INSEE estiment que le manque à gagner en terme de fraude fiscale est de l’ordre de 10 à 20 milliards d’euros par an.
En quoi consiste la réforme sur la facturation électronique ?
Cette réforme vise à fournir un accès unifié pour les entreprises aux fonctionnalités de dépôt, de traitement et de suivi des factures.
Pour échanger leurs factures, les entreprises pourront choisir de passer par une des plateformes de dématérialisation partenaire qui, une fois immatriculée par l’administration, pourra transmettre directement la facture à son destinataire. Elles pourront autrement accéder directement et gratuitement au portail public de facturation afin de s’acquitter de leurs obligations et d’échanger leurs factures.
Présentation des acteurs de la facturation électronique
Le portail public de facturation (PPF)
Le PPF a pour vocation de centraliser les échanges de factures entre les différents acteurs économiques et constituera la plateforme par défaut pour l’échange dématérialisé des factures.
Le PPF assure les missions suivantes :
- Administrer l’annuaire central ;
- Garantir l’échange des factures électroniques (hors plateformes de dématérialisation partenaires) ;
- Recueillir les données de facturation, de transaction et de paiement ainsi que les informations relatives aux statuts de traitement des factures ;
- Transmettre les données à l’administration fiscale.
Les plateformes de dématérialisation partenaires (PDP)
Les PDP joueront le rôle d’intermédiaire entre les entreprises et le portail public de facturation. Ces entreprises devront être immatriculées. Le numéro d’immatriculation a une durée de trois ans renouvelable et l’entreprise doit s’engager à remettre un audit de conformité à l’administration avant la fin de la première année d’immatriculation.
Les entreprises ou leur opérateur de dématérialisation
Les entreprises peuvent jouer le rôle de fournisseurs ou d’acheteur dans le schéma de la facturation électronique. Elles peuvent interagir directement avec le PPF ou choisir une Plateforme de Dématérialisation Partenaire.
Ces dernières ont également la possibilité de faire appel à un opérateur de dématérialisation complémentaire qui jouera le rôle d’intermédiaire. N’étant pas immatriculé, les opérateurs ne peuvent pas transmettre directement des factures aux destinataires ni transmettre des données au PPF. Il ne peuvent donc en aucun cas faire office de PDP ou remplacer le PPF
Les entités publiques
Les institutions publiques interagiront avec le PPF de la même manière que les entreprises fournisseurs ou acheteurs comme statuée dans la LEM de 2008 et sa généralisation en 2014. L’Administration Fiscale recevra, quant à elle, les données consolidées du PPF.
Présentation des circuits de la facturation électronique
Les entreprises auront le choix entre 3 « circuits » pour échanger leurs factures :
- Circuit A : les deux entreprises échangeront via le portail public de facturation directement ;
- Circuit B : une entreprise utilise le portail public de facturation et lorsque l’autre fait appel à une plateforme de dématérialisation partenaire ;
- Circuit C : les deux entreprises ont recours à des plateformes de dématérialisation partenaires.
Présentation de l’annuaire
Afin de déterminer si l’acheteur utilise le portail public de facturation (circuit A ou B) ou une plateforme de dématérialisation partenaire (circuit B ou C), le schéma en Y nécessite la mise en place d’un annuaire permettant d’identifier la plateforme choisie par chaque destinataire de factures.
Les types de flux
La plateforme regroupe toutes les données liées à la facturation et à l’identité de ses acteurs. Quatre types de flux seront amenés à transiter sur le PPF :
- E-invoicing : permet le dépôt, la transmission et le suivi des factures B2B domestique et B2G ;
- E-reporting : permet le traitement par le portail public de facturation des données déposées directement sur le PPF, pour les transactions B2B non domestiques et B2C ;
- Cycle de vie des factures : les différents acteurs doivent également transmettre les statuts de traitement des factures (environ une dizaine) ;
- L’annuaire : les acheteurs/fournisseurs, via une plateforme de dématérialisation partenaires ou non, devront mettre à jour les informations les concernant dans l’annuaire.
Voici, dans les grandes lignes, en quoi consiste la facturation électronique. Cette réforme est synonyme de grands bouleversements pour les assujettis à la TVA. Même si la réforme ne prendra pleinement effet qu’à partir du 1er janvier 2026 , il est dors et déjà nécessaire d’en anticiper les impacts. Si bien préparée, cette mesure peut permettre aux entreprises de gagner en productivité du fait de la standardisation et l’uniformisation des pratiques. Nous pouvons déjà faire le lien avec une technologique que nous apprécions tout particulièrement : la Robotic Process Automation (RPA). Bien sûr, une transformation de ce type n’est pas sans difficultés à moins d’être bien accompagné.
L’article ne mentionne pas ou peu l’impact sur les déclarations de TVA, pourtant quand on voit les schémas de fonctionnement présentés on ne peut s’empêcher de penser que la déclaration de TVA devient quasiment 100% inutile.
Bonjour,
Merci pour votre commentaire. En effet, c’est un des objectifs majeurs de cette réforme. Vous avez raison de préciser que la facturation électronique éliminera la charge associée à la préparation de la déclaration de TVA.