Depuis 2018, nous avons accompagné 10 institutions d’enseignement dans la définition de leur stratégie, et dans la mise en oeuvre de cette stratégie. Nous avons tiré quelques enseignements pour réussir l’adoption du numérique dans une école.

Réussir son projet numérique à l’école

Le voyage pourra avoir lieu avec trois éléments

Nous avons constaté qu’il fallait réunir trois éléments pour réussir un projet d’intégration des outils numériques à l’école :

  • Des infrastructures numériques ;
  • Une plateforme logicielle pédagogique ;
  • L’accompagnement des enseignants.

Un projet numérique est comme un voyage : il nécessite 1- des infrastructures routières, 2- un véhicule homologué et sûr et 3- des conducteurs disposant du permis de conduire.

Détaillons ce que recouvrent ces trois éléments.

Les infrastructures numériques

Voir une animation de ce que vous pointez

Pourquoi pas des tablettes ?

Plusieurs éléments d’infrastructures sont à réunir :

  • Avoir un accès à Internet à très haut débit ;
  • Distribuer Internet sans fil dans tous les espaces de l’école ;
  • Attribuer à chaque élève une machine identique ; ces deux facteurs sont cruciaux ;
  • Avoir des moyens de projection, d’impression, adaptés.

Sans Internet, impossible de collaborer, d’avoir accès à l’infinité de ressources disponibles.

L’accès doit être sans fil, car le déploiement est bien moins coûteux, et l’usage bien plus souple.

Chaque élève doit être équipé avec sa machine, dont il est responsable. Cela permet d’avoir une machine tout le temps disponible, au moins dans l’enceinte de l’établissement, voire à la maison également. Les machines doivent être identiques, surtout parce que cela permet l’entraide en classe, et simplifie radicalement la résolution de problèmes. Cela aussi réduit les coûts d’achats, évite les distinctions liées à l’origine familiale.

Il y a là une évidence cachée qu’il faut dévoiler : quand on déploie de l’informatique dans des écoles, on déploie des machines pensées pour des adultes, voire pour des professionnels, à des enfants en cours d’apprentissage, entre la maternelle et le lycée.

Ces machines ne sont pas du tout pensées pour être pratiques à utiliser en classe !

Rien que le démarrage, dans un cours qui dure 50’, ne peut pas prendre plus de quelques secondes. Hors de question d’avoir un écran bleu ou une mise à jour de 15 minutes.

Autre exemple : la possibilité pour l’élève de s’échapper sur Internet. L’enseignant doit pouvoir cadrer l’usage de la machine strictement à son cours, et doit pouvoir ramener tout le monde en classe en sortant les élèves du puits d’attention qu’est l’ordinateur.

Les machines les plus adaptées que nous avons pu utiliser sont les Chromebooks, qui sont bien plus simples à déployer et gérer, sûrs, avec un démarrage quasi instantané, beaucoup moins cher, et tout à fait cadrables pour un usage ciblé, même si cela demande un paramétrage parfois compliqué depuis la console.

L’autre possibilité est d’utiliser des Cloud PC, simplement accessibles dès le boot d’une machine. Ces PC virtuels, hébergés dans un Datacenter, accédés par les élèves depuis n’importe quelle machine, peuvent être complètement dédié à une matière, cibler les accès à quelques sites de l’Internet, et permettre le retour en classe par une commande de l’enseignant qui passe tous les écrans au noir.

Ce qu’il faut retenir relativement aux infrastructures, c’est donc qu’elles doivent permettre l’accès sans fil à Internet, et que les ordinateurs doivent être adaptés aux besoins des enseignants et des élèves, adultes en devenir. Une machine “standard” de seconde vie donnée par une grande entreprise n’est pas une solution, c’est un problème, qui finit dans un placard.

La plateforme logicielle pédagogique

Exemple de plateforme collaborative

Les infrastructures routières ne servent à rien sans voitures, les infrastructures numériques ne servent à rien sans services applicatifs, idéalement regroupés et accédés via une plateforme collaborative.

Quelles sont les composantes de cette plateforme pédagogique ?

Tout d’abord, des choses qui ne sont pas spécifiquement pédagogiques, mais nécessaires dans le contexte pédagogique :

  • du mail ;
  • du partage de fichiers ;
  • une suite bureautique ;
  • de la visioconférence ;
  • de la messagerie instantanée ;
  • des agendas partagés ;
  • des contacts.

Cette plateforme aux services indifférentiés d’un usage en entreprise, est tout aussi utile dans le contexte d’une école. Et là, pas besoin d’aller chercher plus loin, il n’y a que deux plateformes qui dépassent toutes les autres de la tête et des épaules : Microsoft 365 et Google Workspace, et leurs déclinaisons pour le secteur éducatif.

Les autres “ENT”, Environnement Numérique de Travail, contiennent des fonctions indispensables comme le cahier de texte, les devoirs, les bulletins de notes. Mais toutes leurs fonctions de partage de document sont très inférieures à celles des géants Microsoft et Google. Un exemple vécu récent : pas possible de joindre une video de 50 Mo, nécessité de mettre un lien vers le compte Youtube personnel d’un enseignant, avec la licence gratuite où vos données sont utilisées par Google.

Au-dessus des services indifférentiés des suites collaboratives, il y a les services spécialisés pour l’éducation, et ils sont de deux natures :

  • administrative : Gestion des admissions, gestion des scolarités, cahiers de texte, dossier scolaire, bulletins de note, conseils de classe, facturation ;
  • pédagogique : élaboration de cours, animation de classe, quizz, création de contenu…

Sur ces deux natures, la plateforme collaborative peut rendre de grands services, même si elle n’est pas spécifiquement pensée pour l’éducation. Les outils contenus dans la boîte peuvent servir à des buts très utiles dans une école.

L’accompagnement des enseignants

BYOD professeur

Le plus beau métier du monde

Quand on a une autoroute et une voiture, il reste à trouver des conducteurs pour emmener les passagers en voyage. Les conducteurs, ce sont les enseignants, et les passagers, les élèves.

Les conducteurs doivent apprendre à conduire leur véhicule, la plateforme numérique pédagogique, sur les infrastructures numériques mises à leur disposition.

Sinon, plateforme et infrastructures ne servent rigoureusement à rien. D’où les nombreuses armoires pleines d’ordinateurs, tablettes, appareils, Ecrans numériques interactifs. Et les nombreuses licences de logiciels achetées et pas ou peu utilisées, certes moins visibles car immatérielles.

Il faut permettre aux enseignants de prendre en main plateforme et infrastructures.

Pour cela, les dispositifs qui fonctionnent sont :

  • de la communication multicanal (réunions, affichages, mails, site web, X-tweets) de la Direction vers les enseignants et parents ;
  • des sessions de formation collectives sur des éléments de base : se connecter au Wi-Fi, au video projecteur, à l’imprimante, à la suite collaborative ;
  • des sessions de formation individuelles : en fonction du niveau, de la matière et de l’appétit de chaque enseignant ;
  • la mise en place d’une équipe d’enseignants référents numériques, disponible pour apporter du support tout le temps ;
  • des ateliers de recherche et de partage de logiciels en fonction des besoins différents d’une matière à l’autre. Un enseignant de langue n’a pas les mêmes besoins qu’un enseignant de physique-chimie.

Un des objectif majeur de la formation des enseignants, au-delà de leur permettre d’être à l’aise avec les outils, est de leur permettre de faire “du neuf avec du neuf”, c-à-d. inventer de nouvelles manières d’enseigner, et non pas de “faire du vieux avec du neuf”, c-à-d. se borner à substituer un écran à une feuille de papier, même si c’est parfois une étapes incontournable.

Conclusion

Pour que l’école, comme les autres activités humaines, bénéficie de l’énorme potentiel qu’apporte l’outil numérique, il faut réunir les trois éléments que sont les infrastructures, les logiciels dans leur plateforme, et des enseignants formés et sensibilisés au potentiel des outils numériques.

C’est comme ça qu’on peut réussir le voyage consistant à former les jeunes apprenants en utilisant le numérique.

Il reste un élément, tout aussi crucial, qui pose la question du type de voyage qu’on souhaite faire. Pour le dire avec les mots des chefs d’établissement, quel est le projet pédagogique qu’on destine pour édifier les jeunes apprenants. C’est une question que chaque responsable doit se poser, qu’on voudrait pouvoir traiter à part mais qui n’est pas séparable des outils à disposition, et qui pourra faire l’objet d’une autre discussion.