La signature électronique est un sujet mal appréhendé autour duquel sont véhiculées de nombreuses fausses vérités (je vous donnerais ma vision de ce sujet foisonnant dans un prochain article ). Or, en 2023, tout projet de dématérialisation inclut ou a partie liée avec la signature électronique. Pourtant trop de personnes ignorent ce qu’est et ce que n’est pas la signature électronique. Hormis les équipes directement concernées ou les plateformes nécessitant d’intégrer une signature, la signature électronique reste le parent pauvre des projets de dématérialisation. Les organisations vont choisir de laisser la compétence sur ce sujet à des équipes spécialisées car elles pensent légitimement que le sujet est trop complexe (c’est vrai il l’est).  Pour autant, il ne faut pas baisser les bras. Informer et former, aux bases de la signature électronique, les agents publics qui instruisent des dossiers dématérialisés ou les agents qui font du support utilisateur sur les plateformes de gestion dématérialisée des services publics par exemple me semble absolument nécessaire. ISLEAN le fait sur tous ses projets de dématérialisation et nous aussi nous devons nous améliorer et le faire encore mieux. Le sujet le mérite.

Il était une fois la plateforme de gestion dématérialisée qui demandait du papier

La plateforme de la Direction Générale des Etrangers – Episode 1

Pas plus tard que la semaine dernière, j’ai utilisé la plateforme de la Direction Générale des Etrangers en France (https://administration-etrangers-en-france.interieur.gouv.fr/). Ceci pour avoir un avis sur une convention de stage d’un étudiant étranger d’une école à l’étranger (Centrale Casablanca). Je vous passe les détails d’un première clôture du dossier pour une raison de sécurité sociale (apparemment erronée mais j’attends toujours la réponse de l’Urssaf Caisse Nationale – anciennement ACOSS – et du CLEISS ), j’ai donc du retransmettre, pour ne pas perdre de temps, une nouvelle demande avec des documents complémentaires.

La plateforme de la Direction Générale des Etrangers – Episode 2 – Signature électronique qualifiée

Quelques jours plus tard, je reçois un mail de la plateforme me disant que ma demande est incomplète car, en substance, la convention de stage n’est pas signée. Je me reconnecte, pensant avoir fait une fausse manipulation, je reviens sur mon dossier, rouvre le document transmis et constate qu’il est bien signé.
Je coche la case, « je laisse le document initial inchangé » et je rajoute un commentaire précisant que j’ai bien vérifié et que le document est bien signé et qu’il s’agit par ailleurs (en plus de l’image de ma signature et du tampon de ma société) d’une signature électronique qualifiée.
J’avais utilisé pour signer ce document un certificat de signature qualifiée eIDAS (règlementation eIDAS sur le site de l’ANSSI), soit le plus haut niveau de sécurité sur une signature électronique. Etant d’un naturel prudent, j’ai depuis toujours également pris soin d’adjoindre à cette signature électronique une image de ma signature avec le tampon de ma société (c’est un paramètre dans le logiciel de signature qui permet de rajouter ces éléments visuels). Cela ne rajoute strictement rien en terme de valeur de la signature, mais je comprends que pour certains destinataires, cela puisse aider à la confiance dans la signature et à la transition de l’ancien monde (le papier signé) vers le nouveau monde (le document électronique avec une signature électronique).

La plateforme de la Direction Générale des Etrangers – Episode 3 – Signature électronique qualifiée – j’insiste

5 jours après, je reçois de nouveau le même message disant que « ma convention de stage n’est pas signée ». Je me rereconnecte, je rerevérifie la convention de stage. Tout est nickel. Je rajoute un 2ème message leur précisant en 5 mots ce qu’est la réglementation eIDAS et leur précise qu’ils peuvent ouvrir le document avec Adobe Acrobat Reader pour vérifier la validité de la signature. Et je rerecoche la case « je laisse le document initial inchangé » et rererenvoie le dossier en instruction pour la troisième fois.

La plateforme de la Direction Générale des Etrangers – Le support utilisateurs – la signature électronique ça va pas ?

En parallèle j’essaie (et j’arrive, ça vaut le coup de le signaler) à contacter un n° de support. Mon interlocuteur sympathique fait la même chose que moi, se connecte sur mon dossier, vérifie et aboutit à la même conclusion que moi. « Oui votre convention de stage est bien signée, je ne comprends pas ». Puis ensuite « Je ne sais pas quoi faire pour vous, attendez ça va se résoudre tout seul… ». Je leur explique que j’ai pas trop confiance dans le « attendez, ça va se résoudre tout seul ».
Voyant que j’étais bien embêté, la personne me dit « attendez je vais me renseigner, quittez pas je vous reprend ». Là évidemment je suis persuadé, comme cela m’est arrivé si souvent, que c’est terminé. Mon appel va être repris au bout de 15 minutes de musique d’attente par une personne à qui je vais devoir tout réexpliquer…
Suprise ! ce n’est pas le cas. Au bout de 5 minutes mon interlocuteur reprend l’appel et me dit « je me suis renseigné : il faut que vous imprimiez votre convention de stage, que vous fassiez une signature manuscrite, et que vous rescanniez et re-téléversiez le document signé, numérisé »….. !
Ouate zeu f*** !
J’explose calmement et évoque à mon interlocuteur le caractère kafkaien voire ubuesque, ou l’inverse, de sa demande. En pure perte (spoiler : apparemment) puisqu’il me dit ne rien pouvoir faire. Il me réitère sa première recommandation d’attendre un peu car de toute façon je ne peux rien faire sur mon dossier tant que celui-ci n’a pas encore été refusé pour la 3ème fois.

La plateforme de la Direction Générale des Etrangers – Epilogue

Quelques jours après, un avis positif est rendu. Je ne sais pas si ce sont mes messages, mon insistance (toute bretonne) à leur expliquer ce qu’était une signature électronique, mon appel au n° de support, ou simplement mon insistance (bien finistérienne) à transmettre le même dossier 4 fois (ou les quatre raisons à la fois). Mais bref ça a fini par fonctionner.

Tout projet de dématérialisation doit inclure une formation aux bases de la signature électronique

En 2023 tout projet de dématérialisation doit informer ou expliquer ce qu’est une signature électronique (et ce que n’est pas une signature électronique). Même sur des projets de dématérialisation qui n’incluent pas directement de fonctionnalités de signature, je m’oblige à informer et expliquer certaines bases sur la signature électronique.
Il faut le faire au sein de votre groupe projet, mais aussi et surtout dans les comités de pilotage où souvent les décideurs (qui sont souvent des signataires de documents) sont sensibles à ce sujet mais en ont des idées souvent partiellement fausses. Ce n’est pas une critique, le sujet est complexe et il n’est pas du tout évident d’y voir clair entre les visions 100% juridiques des juristes et les visions 100% techniques des informaticiens.
Il faut également expliquer, lors des formations, ce qu’est la signature électronique à tous les agents susceptibles d’interagir avec des citoyens (que ce soit parce qu’ils sont en charge d’instruire des demandes ou que ce soit dans le cadre du support à l’utilisation de plateformes de gestion dématérialisée de certaines démarches). La difficulté ici est de savoir vulgariser le sujet car encore une fois, entre la complexité juridique, la complexité numérique du sujet et à l’interface entre les deux : la complexité de la réglementation eIDAS (ou d’autres réglementation) : c’est un sujet difficile à vulgariser. C’est pourtant nécessaire pour éviter la mésaventure que j’ai rencontrée avec la plateforme de la Direction Générale des Etrangers en France
Vous avez des projets de dématérialisation en difficulté ? Vous souhaitez améliorer la gestion de vos services instructeurs de dossiers dématérialisés ? ou vos centres de support usagers ? appelez nous !