Dans le cadre de nos entretiens avec des innovateurs et entrepreneurs, nous avons rencontré Arnaud de La Taille, co-fondateur et Président d’AssoConnect, une entreprise fondée en 2011 qui développe une plateforme innovante pour les associations. Arnaud revient pour ISlean consulting sur son parcours et sur les premières années de son entreprise.
Le « problème à résoudre » qui a lancé le projet : la transformation digitale pour toutes les associations ?
La transition numérique a tardivement impacté les associations.
Elles représentent pourtant près de 10% des emplois en France[1]. Et 1 français sur 2 est impliqué dans une association ! Elles sont présentes dans tous les domaines de la société.
Alors que les entreprises commençaient à prendre le virage de la transformation digitale et que de nombreuses offres apparaissaient pour ces dernières, personne ne proposait vraiment au monde associatif des solutions adaptées. Nous avons eu envie de proposer une solution moderne pour répondre au sous-équipement de l’époque des associations.
Les associations passent beaucoup de temps sur la gestion. Certaines en passent beaucoup trop, souvent parce que leurs outils sont peu modernes, peu intégrés, voire inexistant… Nous voulions donc doter les associations d’outils modernes pour qu’elles puissent aller plus vite sur la gestion et passer plus de temps sur les activités de leur cœur de mission.
Prenons l’exemple du paiement : le trésorier reçoit un chèque, le vérifie sur des listings – et perd son temps à récupérer la dernière version. Ensuite il passe cela à la comptabilité qui va à son tour passer les écritures sur le chèque. Puis une troisième personne ira le déposer à la banque. Et une quatrième personne fait le rapprochement bancaire. Je caricature, mais cela existe encore.
Nous voulons donc, avec AssoConnect, simplifier les outils des associations pour les aider à mieux gérer leurs membres. C’est peut-être moins sexy que de proposer uniquement un site internet mais nous estimons que c’est aussi cela qui les aide se développer.
Le projet aujourd’hui ?
AssoConnect est utilisé par plus de 1 500 associations qui ont engagé leur transformation digitale. Nous avons passé plusieurs années à développer le produit avec des clients. Nous faisons partie des start-ups orientées produit (par opposition aux start-ups orientées marketing, ndlr) : nous avons affiné notre produit et ses fonctionnalités avant de vouloir passer à l’échelle. Nous avons donc d’abord investi sur notre produit (et pas son marketing). Un réflexe d’ingénieur, peut-être ?
AssoConnect propose 4 modules organisés autour de la base de données adhérents et membres de l’association : la gestion de la relation adhérent/membre, la communication, le paiement en ligne et la comptabilité.
Depuis cet été, nous avons un produit arrivé à un nouveau palier de maturité. Et il rencontre son marché : nous accueillons deux nouvelles associations par jour en moyenne !
Notre Business model, c’est une solution en Saas, facile à prendre en main et avec un abonnement mensuel. Ce qui permet de démarrer sans se sentir lié pour l’éternité et d’avoir un coût d’entrée bas (tarif d’entrée à 20 €, ndlr). Ce qui est particulièrement adapté au secteur associatif.
Le secteur associatif et la transformation digitale ?
Le secteur est en cours de professionnalisation. Un certain nombre d’associations quittent les outils bricolés et acceptent dorénavant d’investir dans des outils modernes et adaptés à leurs situations. De plus, la génération Y a rejoint leurs équipes. Et avec elle, de nouvelles visions des outils et des usages. Les offres d’outils se sont adaptées, avec des solutions plus économiques et plus ergonomiques. Nous en faisons partie !
Nous souhaitons aider les associations : nous avons donc publié deux livres blancs pratiques pour les associations (comment monter un site internet et une liste des outils adaptés aux associations.
Comment est né le souhait d’entreprendre ?
J’avais suivi un cursus classique qui m’avait amené en école d’ingénieur. Je n’avais pas vu le potentiel des technologies (j’avais des cours d’informatique, avec du C++…). On était loin de la transformation digitale et du potentiel des nouvelles solutions Web… Puis, j’ai eu la chance de faire un échange aux Etats-Unis où j’ai
décidé d’entreprendre.
Ce désir d’entreprendre sur le web est apparu progressivement lors de mon expérience à Berkeley : j’ai découvert l’entrepreneuriat et j’ai eu envie de lancer le Groupon Etudiants. Le but était de regrouper les étudiants pour avoir des tarifs avantageux. Au fil de l’eau, cette idée s’est transformée : c’est ce qui est vraiment intéressant avec l’entrepreneuriat. Au départ, toutes les idées se valent. Au moins, elles ouvrent toutes des opportunités. Après, c’est le marché qui tranche !
Votre retour d’entrepreneur à titre plus personnel – pour ceux tentés par cette aventure de la start-up ?
J’ai la chance de faire un métier qui me plait. D’abord, être entrepreneur, c’est apprendre en faisant, se remettre en question, faire face à l’incertitude, rencontrer beaucoup de nouvelles personnes… Ouvrir des portes… Tout cela me passionne. Et j’ai la chance de le faire dans le secteur associatif, pour lequel je sens que notre projet est utile. C’est un secteur aussi vivant que diversifié. Nos clients nous obligent à répondre à différents cas de figures. Et nous permettent de rencontrer de nombreux interlocuteurs passionnants.
Enfin, c’est une expérience qui me permet de « mettre les mains dans le moteur ». La start-up oblige à être polyvalent et permet de voir les résultats de ses actions tous les jours. L’entrepreneuriat force à sortir de sa zone de confort. On y passe beaucoup de temps.
Mais une fois que l’on a trouvé un secteur aussi intéressant et une super équipe, c’est beaucoup de plaisir.
Notre étude sur la rupture digitale dans les associations.
Notes :
(1) http://www.recherches-solidarites.org/media/uploads/france-associative-2016.pdf
C’est une bonne chose que de proposer aux associations des ERP qui ne disent pas leur nom. Et comme les ERP, même si le ticket d’entrée n’est pas élevé, quand l’association et ses membres ont fait l’effort d’apprendre à s’en servir et ont mis dedans des centaines d’heures de travail avec des documents et des transactions, le « switch cost » vers d’autres solutions devient insurmontable.
A quand des modèles de données standardisés permettant un changement facile d’outil ?
Bonjour Philippe,
Nous ne parlons effectivement en général pas d’ERP associatif parce que c’est un terme qui est obscur pour bien des responsables d’association.
Et lorsqu’on parle ERP, on pense souvent à des solutions type SAP pour lesquelles il faut une armée de consultants pour une implémentation efficace. Ces outils sont puissants, mais souvent aussi surdimensionnés pour les besoins d’une association. Des logiciels en mode SaaS comme AssoConnect me paraissent infiniment plus simples à mettre en place. L’investissement en temps n’est plus autant un enjeu.
Ceci dit, je suis d’accord avec vous sur le fait qu’il y a nécessairement un « switching cost » dès qu’on passe d’un système à un autre. Et c’est d’autant plus vrai lorsqu’on a affaire à des systèmes type ERP puisqu’ils s’appliquent à des aspects proches du cœur de métier de l’organisation.
Je trouve personnellement l’approche de se dire « il y aura un switching cost élevé si on veut changer » très défensive. Il est important d’en avoir conscience et en discuter avec l’éditeur, mais il y a un moment où il faut se jeter à l’eau si l’association veut se doter d’outils performants.
Enfin, je vous rejoins à 100% sur l’idée que des standards d’export seraient bénéfiques. En l’absence de telles normes, nous essayons chez AssoConnect de diminuer au maximum le switching cost pour les associations qui décidereaient de nous quitter. Toutes les données peuvent être exportées sous des formats simples (typiquement Excel) et organisées de manière intelligible.
Bon réveillon !