En 2017, nous parlions avec un ami du permis de conduire. Il me disait ne pas vouloir le passer (manque de temps, d’argent et de volonté) et attendre l’essor de la voiture autonome. 4 ans plus tard, où en sommes-nous ?
C’est un fait, les jeunes passent de moins en moins leur permis
En 1980, 90% des 18-24 ans avaient leur permis de conduire. Aujourd’hui ils ne sont plus que 80%. En 2014, 740 000 jeunes de cette tranche d’âge avaient obtenu leur permis, en 2019 ils n’étaient que 663 000 d’après les chiffres du ministère de l’Intérieur, soit une baisse de 10% (le nombre total de candidats par âge n’est pas disponible).
La faute à qui ? A de multiples raisons
L’exode rural
Si le permis de conduire est indispensable à la campagne, on s’en passe plus facilement en ville. Plus de 9/10 des français vivent en zone urbaine (une zone de bâti continue comptant au moins 2 000 habitants). Ils restent 5/10 à vivre dans des villes de plus de 100 000 habitants. En ville, la voiture est souvent associée au manque de places de stationnement et aux amendes
La difficulté de l’examen peut être décourageante
Avec 3 passages à l’examen pratique et une centaine d’heures de cours à mon actif, je peux en témoigner ! Ceux qui l’ont passé dans les années 1990 voire avant n’ont vraisemblablement pas eu du tout les mêmes conditions d’examen qu’aujourd’hui. Sans parler de ceux qui l’ont passé à l’armée.
En fait, l’examen en soi n’est pas difficile, il dure 35 minutes, comprend une phase de conduite en agglomération, une phase de conduite sur voie rapide et une manœuvre. Il faut obtenir suffisamment de points sur le barème et ne pas faire de faute éliminatoire (ex. refuser une priorité). Et pourtant… je pense que si tous les automobilistes devaient le repasser aujourd’hui, un petit nombre seulement l’obtiendraient. En disant cela, je pense au très grand nombre de conducteurs qui parfois ne mettent pas leurs clignotants, coulent les stops (il faut marquer l’arrêt !), passent un peu vite sur une priorité à droite… Vous me direz qu’il suffit de respecter les règles du code de la route pour réussir. C’est vrai, mais ce n’est pas tout. L’examen du permis B est bien plus complexe qu’un examen scolaire tant la part d’imprévu est importante. L’épreuve peut s’avérer bien difficile pour un candidat qui panique facilement (conduire avec les mains moites et les chevilles qui tremblent, ce n’est pas idéal). Et dire qu’il faut que le candidat « apprenne à gérer son stress », c’est régler le problème un peu vite. Pour repasser son permis en cas d’échec, un candidat attend en moyenne 5 mois. Et dans les grandes villes c’est plutôt 8 à 12 mois ! Bien-sûr, pour ne pas perdre la main et être prêt à l’examen suivant, il faut continuer de prendre des heures de cours de conduite, qui ne financent pas toutes seules… Avec de tels enjeux, on comprend le stress des candidats et le fait que beaucoup renoncent à le passer ou abandonnent.
La sensibilité aux enjeux environnementaux
Enfin, le trafic automobile et la fabrication des véhicules sont un facteur important de pollution, et ils sont nombreux parmi les 18-30 ans à préférer s’abstenir de conduire pour préserver l’environnement, quitte à se compliquer un peu plus la vie.
Est-ce en anticipation des véhicules autonomes ?
Est-ce que ces candidats qui ne se présentent pas à l’examen du permis de conduire sont comme cet ami qui, pour diverses raisons, préfèrent attendre l’essor de la voiture autonome plutôt que de consacrer à cet examen de l’argent et du temps qu’ils n’ont pas ?
Ceux qui ne conduisent pas pour des raisons écologiques ne se tourneront probablement pas vers la voiture autonome, qui annonce un désastre environnemental. La multiplication des équipements électroniques à produire en masse (ordinateurs, caméras, radars et autres capteurs) vont faire exploser la demande de métaux rares et la compétition sur les ressources. Et l’industrie minière est une des plus polluantes pour les cours d’eaux.

Précipitation d’hydroxydes de fer dans un affluent du Missouri
Pour le moment, la loi est très claire : même en ce qui concerne les voitures autonomes il est obligatoire de détenir un permis de conduire pour rouler sur les routes. Un fait logique car le système est encore récent est n’est donc pas à 100% infaillible. Les conducteurs de véhicules autonomes peuvent donc être contraints à tout instant de reprendre le volant. Pour l’IEEE (institut des ingénieurs en électronique et électrique), la disparition du permis de conduire ne surviendra pas avant 2040, période à laquelle les véhicules autonomes devraient représenter 75% du parc automobile.
La LOM (la loi d’orientation des mobilités) crée aussi le cadre légal pour permettre la circulation des véhicules autonomes en régime permanent, d’ici à 2020 pour les navettes collectives et à 2022 pour les véhicules particuliers. Pour le moment, la Stratégie nationale de développement de la mobilité routière automatisée 2020-2022 prépare le déploiement du « niveau 3 », où le conducteur délègue totalement la conduite dans des situations prédéfinies (par exemple dans les embouteillages). Le conducteur doit malgré tout être capable de reprendre la main immédiatement, surtout lorsque le véhicule signale son incapacité à gérer la situation. Cela nécessite donc le permis de conduire. Pour l’IEEE, la disparition du permis de conduire pourrait survenir d’ici 2040. Ce n’est pas pour tout de suite…
On peut toujours imaginer un permis simplifié, calqué sur le principe du permis passé sur boîte de vitesses automatique, qui ne donne le droit de conduire que des voitures… à boîte automatique, à compléter par une formation de quelques heures pour conduire sur boîte manuelle.
Le permis de conduire est un marché trop juteux pour qu il soit abandonné de si tôt.
En ce qui concerne la voiture autonome j ai peur qu elle représente un plus grand danger que les voitures actuelles. Manque de vigilance du conducteur, manque de réactivité de ce dernier au moment critique etc…
@Bonetto, merci pour ce retour. Il est certain que ceux qui vivent du système institué par le permis de conduire ne vont pas lâcher leur gagne pain facilement. Ce sera intéressant de voir comment l’état gérera cela.
Pour la voiture autonome, je pense que vous faites implicitement référence à celle de niveau 4 et inférieur, qui nécessitent l’attention du conducteur. Je ne m’étais jamais posé la question ainsi. Je pense comme vous sur les routes nationales et départementales, et bien sûr, en ville. Les situations sont trop compliquées, et tant qu’on n’est pas au niveau 5, s’il faut être attentif tout le temps, ce n’est pas intéressant.
Sur les autoroutes, je pense qu’il peut en être autrement, car elles sont bien plus normées. Pas de croisement, des rails, du simple sens… En consultant google, je tombe sur ce doc : https://www.autoroutes.fr/FCKeditor/UserFiles/Image/ASFA/ASFA_depliant_AM13.pdf « SÉCURITÉ SUR AUTOROUTES, ACCIDENTS MORTELS, CHIFFRES CLÉS 2013 » qui donne les causes d’accidents mortels :
31 % somnolence et fatigue (=> facteur humain)
21% alcool, drogues (=> facteur humain)
15% vitesse excessive (=> facteur humain)
=> 67% des accidents mortels pourraient donc être évités en remplacant l’humain qui tient le volant et pousse des pédales pour tenir une trajectoire et une vitesse.
J’adore conduire, mais passé 2h sur autoroute, je ne rêve plus que d’arriver à destination. Quelle délivrance si un système me décharge de tenir le volant, ralentir derrière une voiture ou un camion puis réaccélérer, et m’alerte suffisamment tôt quand il sent qu’il ne saura pas gérer tout seul !